La « Charte des principes de l’islam de France » du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) a été tramée par le Pouvoir pour imposer l’idéologie républicaine aux Imams et par-delà à tous les Musulmans de l’Hexagone. Le CFCM a involontairement réussi à mettre d’accord les organisations et les personnalités musulmanes les plus diverses pour désapprouver les dispositions du document. Les plus courageux énumèrent méthodiquement leurs points de désaccord et les autres se contentent de condamner en bloc l’absence de neutralité et l’ingérence anticonstitutionnelle de l’Etat français, son autoritarisme, son irrespect de la laïcité consacrée et la subordination servile du CFCM. D’illustres inconnus sortent aussi de leurs cocons et s’aventurent prudemment à pétitionner et à manifester. L’ensemble de ces mimodrames ne changera naturellement rien au déroulé et à l’épilogue du film. Sans chercher trop loin, il faut se réjouir que des Autorités musulmanes – pas très nombreuses et avec plus ou moins d’autorité et d’influence – se dressent contre cette charte infamante. C’est d’autant plus nécessaire qu’il s’en trouve encore trop au sein de la communauté musulmane à attendre l’aval des « prescripteurs de fatwas » pour rejeter ce qui contrevient à leur foi ou admettre ce qui est en conformité. D’où l’intérêt d’inciter les Musulmans lambda, « non professionnels », à se cultiver suffisamment pour devenir religieusement autonomes et profitables, pour distinguer d’emblée entre le vrai et le faux et le bien et le mal, pour faire primer le nécessaire sur le superflu et pour se dispenser des exégèses aléatoires des « savants » brevetés ou autoproclamés. En écoutant les élucubrations des « grandes gueules de l’Islam », s’il n’y avait pas une parole d’exception pour confirmer la règle,[1] il y aurait parfois de quoi se demander si la piété n’est pas inversement proportionnelle au savoir.
Sur certains sites communautaires, des musulmans complaisants s’obstinent à vouloir persuader que l’Islam authentique n’est pas ce qui a été codifié et pratiqué depuis quatorze siècles mais la marmelade républico-compatible qu’ils excrètent sur commande gouvernementale. A les entendre, près d’une cinquantaine de générations se sont succédées sans comprendre aussi bien qu’eux les subtilités du Coran et de la Sunna sur la Salat (l’Office de Prière), le Ramadan, le Halal, le Hijab, le Niqab, etc. Ces esprits retors et impies voire apostats[2] ambitionnent en vain de remettre en cause ce qui a clairement été révélé au Prophète de l’Islam (ص). Nos cyber-vicieux extrapolent et glosent sur les préceptes basiques qui nous sont parvenus, issus de la pratique prophétique. S’estimant sans doute plus intelligents que la normale, ils se piquent de réinterpréter les textes et de moderniser leur compréhension à seule fin de les accorder avec les égarements occidentaux. DIEU a révélé le Coran à un bédouin illettré au fin fond de l’Arabie, mais nos réformateurs en herbe folle voudraient nous persuader qu’il faut un doctorat de troisième cycle pour comprendre les enseignements islamiques.
Avec cette charte odieuse, sous prétexte de combattre l’islamisme radical, allégrement confondu avec les déviances extrémistes et le terrorisme, le Régime et ses collabos de culture musulmane surfent sur les amalgames pour stigmatiser l’Islam en faisant mine de ne pas y toucher. Les arnaques de débutants ne trompent personne y compris ceux qui, par lâcheté, duplicité ou calcul, ont dédouané l’Etat de son ostracisme et ont ratifié ses directives outrancières. La technique de nos maquignons amateurs consiste à combiner évidences, corrélations, stéréotypes et exigences pour faire passer leur rosse pour un étalon. Considérant l’Islam comme un adversaire trop redoutable, le gouvernement en est réduit à utiliser des procédés déloyaux pour enrayer sa propagation en muselant ses artisans, en assujettissant ses fidèles à des principes antinomiques et en planifiant par étapes sa volatilisation de l’espace public.
Quand bien même des lois impies et absurdes s’imposent à lui, contraint et forcé, un Croyant digne de ce nom ne les considérera jamais en son for intérieur comme supérieures à ses convictions religieuses, ni DIEU comme subalterne à n’importe laquelle de ses créatures.[3] Peut-on parler de compatibilité entre la République et l’Islam quand l’une répugne à toute spiritualité et que l’autre donne la préséance au spirituel sur le temporel, quand l’une dénie à l’autre certaines de ses déclinaisons comme le Salafisme, le Tabligh, les Frères Musulmans et veut prohiber la liberté d’expression politique dans les lieux de culte, quand l’une exerce sur l’autre un totalitarisme qu’elle désavoue outre frontières ? Toutes les religions, et pas seulement l’Islam, sont impactées par la future « loi contre le séparatisme » qui remet en cause directement ou par capillarité les arrangements de la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État. Certaines ont d’ores et déjà manifesté leur désapprobation quant à ces altérations et seront donc tout autant d’accord pour ne pas être d’accord.
Daniel-Youssof Leclercq
[1] إِنَّمَا يَخْشَى اللَّهَ مِنْ عِبَادِهِ الْعُلَمَاءُ – « Craignent DIEU, parmi ses esclaves, ceux qui savent. » (Coran 35/28).
[2] Profitons qu’on ait encore le droit de le dire sans être inculpé par la Charia républicaine.
[3] لا طاعة لمخلوق في معصية الله – « Pas d’obéissance à la créature dans la désobéissance à DIEU » (Mousnad d’Ahmad Ibn Hanbal 5/66).