Dans le kaléidoscope des profils de terroristes islamistes qui menacent la France, les adolescents radicalisés continuent à être des plus préoccupants. Sur les quatre derniers projets d’attentats déjoués par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) depuis la fin octobre 2020, tous ont été fomentés par des individus mineurs (de 15 à 17 ans) ou ayant tout juste fêté leur dix-huitième anniversaire. Et, fin mai, des jeunes au même profil ont été au cœur d’un coup de filet préventif dans l’est de la France.
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Ces ados du djihad combinent l’isolement des terroristes endogènes, sans contact direct avec Daech ou al-Qaida, et l’imprévisibilité de jeunes chauffés à blanc et grands utilisateurs du numérique. Ce qui demande aux services de renseignement une extrême vigilance et une très grande réactivité. Car, comme le précise un spécialiste, «ces jeunes radicalisés sont susceptibles de passer à l’acte très rapidement avec ce qui leur tombe sous la main. On ne peut donc prendre aucun risque et les services doivent agir vite pour stopper une action ou simplement lever un doute» .
L’alerte a été chaude
Ce fut encore le cas le 26 mai avec l’interpellation de quatre garçons à Strasbourg et Schiltigheim. L’un était âgé de 16 ans, deux autres de 17 ans et le dernier avait tout juste 18 ans. Ils avaient été détectés par la DGSI pour leur adhésion à l’idéologie djihadiste et placés sous surveillance, notamment électronique. Leur radicalité se confirmait. Peu de temps avant le coup de filet, des éléments, notamment des repérages, ont laissé craindre un passage à l’acte. D’où la décision prise dans l’urgence d’interpeller le groupe, pour une levée de doute, dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet national antiterroriste pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste».
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À ce stade de l’enquête, les jeunes ont été remis en liberté à l’issue de leurs gardes à vue et des perquisitions effectuées à leur domicile. Comme toujours en matière d’interpellation préventive, nul ne saura jamais ce qui aurait pu se passer en l’absence de ce coup de filet, mais on peut gager que l’alerte a été chaude. Tout comme elle l’a été ces derniers mois à Farébersviller (en Moselle, non loin de la frontière allemande), à Mantes-la-Jolie, Marseille et Béziers. Avec, cette fois-ci, la mise en examen d’individus préparant des attentats.
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En Moselle, le 27 octobre, la DGSI avait interpellé un garçon âgé de 15 ans au domicile de ses parents. Il était visé depuis la mi-octobre – avant la décapitation de Samuel Paty par un jeune de 18 ans – par une enquête préliminaire pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste». Le jeune garçon, inconnu des services, avait fait l’objet d’un signalement. Placé sous surveillance électronique, il se montre alors désireux de frapper. Mis en examen le 29 octobre, il a en fait le profil d’un «velléitaire», ayant souhaité rejoindre la zone syro-irakienne. Mais, dans l’impossibilité de le faire, il avait décidé de perpétrer un attentat en France contre un lieu de culte, notamment une synagogue, ou bien un média.
Déjà dans les années 2000
Cinq mois plus tard, l’alerte est déclenchée en région parisienne et à Marseille pour deux projets distincts. Le 10 mars, à Mantes-la-Jolie (Yvelines), un suspect de 17 ans est interpellé au domicile de sa mère. Surveillé depuis la fin janvier et très actif sur les réseaux sociaux, il visait notamment des militaires. Même activisme sur les réseaux et même projet d’action violente chez un jeune de 18 ans interpellé à Marseille ce 10 mars également. Comme l’adolescent de Moselle, il voulait rejoindre Daech. Enfin, dans la nuit du 3 au 4 avril, c’était au tour d’une jeune fille de 18 ans d’être interpellée par la DGSI à Béziers. Elle voulait attaquer une église pour Pâques et «cibler des fidèles avec une grande épée pour les tuer et les mutiler» .
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L’implication de mineurs et de très jeunes adultes est loin d’être une première dans le terrorisme islamiste. Ils étaient déjà présents dans les réseaux d’envoi de djihadistes depuis la France dans les années 2000. Et ailleurs en Europe. Comme ces jeunes de 16-17 ans, interpellés au Danemark en 2005 et 2006. En 2019, une étude portant sur 88 attentats ou projets d’attentats déjoués entre 2015 et 2018, notait que 16 % des 163 individus impliqués étaient mineurs. Mais l’évolution du terrorisme islamiste ces dernières années rend la menace de ces ados du djihad encore plus complexe. Pour la contrer, un expert souligne l’importance de deux outils clés: la surveillance d’internet et les signalements. Lesquels demeurent très insuffisants.