Depuis 2018, 2260 islamistes sont sortis de prison !
Mais que recouvre précisément le terme «hors d’état de nuire» , dans son esprit? Au reste, comment évolue ce vivier, sachant que de nouveaux cas sont signalés chaque semaine par les services antiterroristes?
VÉRIFIONS. Dès le 31 août, l’hôte de Beauvau avait pris soin de désigner l’ennemi: «Le risque terroriste d’origine sunnite demeure la principale menace à laquelle est confronté notre pays» , lâchait-il, dans son discours au siège de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). C’était à la veille du procès des attentats de janvier 2015. Il dénombrait alors 8132 individus inscrits au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).
Il poursuivait: «À ce jour, 505 détenus terroristes islamistes en lien avec la mouvance islamiste» sont recensés, auxquels s’ajoutaient, selon lui, «702 détenus de droit commun susceptibles de radicalisation» . Les 231 radicalisés cités sur CNEWS ce mercredi correspondent aux individus qui, dans l’ensemble des profils ainsi répertoriés, ont été identifiés en octobre dernier comme étant de nationalité étrangère, en situation irrégulière et suivis pour radicalisation. Des étrangers «qu’il nous faut expulser» , disait le ministre. Parmi eux, figuraient 180 détenus incarcérés.
De nouveaux noms sur la liste
À ce jour, à la date précise du 26 janvier 2021, parmi ces 231 indésirables, selon Beauvau, «113 ont quitté le territoire national ; 83 d’entre eux sont placés en assignation à résidence (AAR) ou centre de rétention administrative (CRA) ; 35 ont été incarcérés.» Le compte est bon sur un plan purement arithmétique: 231 individus ont bien été traités par le ministère de l’Intérieur. Mais avec les limites que l’État de droit impose: certains expulsés peuvent revenir, puisque les frontières nationales ne sont pas totalement hermétiques ; l’assignation à résidence n’est pas aussi sûre qu’une incarcération et le placement en rétention ne peut excéder 90 jours pour un profil de droit commun ou 210 jours en cas d’activité terroriste.
En outre, la liste de ces individus dangereux n’est pas figée. Depuis l’identification des 231 profils à risques du mois d’octobre, 146 nouveaux étrangers radicalisés en situation irrégulière ont été inscrits au FSPRT. Parmi eux, 115 représentent de nouveaux «objectifs » intégrés au fichier antiterroriste, au fil des affaires et des signalements, ou ont été détectés après un nouveau «criblage » effectué par l’Unité de coordination et de lutte antiterroriste (UCLAT) sur des profils qui avaient été, en quelque sorte sous-estimés. Il faut y ajouter 31 cas d’islamistes radicalisés dont le titre de séjour a été abrogé, retiré ou non renouvelé. Ce qui fait bien 146 au total.
L’entourage du ministre le dit, sans l’ombre d’une hésitation: «Ce que nous avons fait avec les 231, nous allons le faire avec les 146.» Avec évidemment les mêmes limites que celles rencontrées pour la première liste établie en octobre. L’hôte de Beauvau le reconnaît lui-même: en pleine crise du coronavirus, raccompagner des clandestins dans leur pays d’origine n’est pas simple. «On est dans une crise pandémique, et les couloirs aériens sont fermés, donc il n’est pas si facile de le faire» , a-t-il ainsi concédé.
En résumé, Gérald Darmanin a bien fait expulser la majorité des islamistes radicaux étrangers en situation illégale que ses services ont pu identifier. Il a, par ailleurs, empêché la remise en liberté de ceux qui ne pouvaient être éloignés pour le moment, en raison du contexte sanitaire ou du manque de coopération de certains pays d’origine. Au total, environ 500 étrangers en situation irrégulière et fichés pour terrorisme ont déjà été expulsés de France depuis le début du quinquennat Macron. Les mettre «hors d’état de nuire » est bien une priorité gouvernementale.
Pourquoi la France n’arrive pas à expulser les étrangers radicalisés?