Des observateurs politiques palestiniens estiment que la décision du Fatah d’expulser, Nacer al-Qudwa, membre du Comité central du Mouvement, est un indicateur clair de la crise qui secoue le Mouvement palestinien de Libération Nationale.
Nasser al-Kidwa, a member of Fatah’s Central Committee and the nephew of late Palestinian leader Yasser Arafat, speaks during a press conference in the West Bank City of Ramallah, on January 18, 2017, – Al-Qidwa, widely seen as a possible successor to Palestinian president Mahmud Abbas, held a news conference on the outgoing US administration of Barack Obama and Donald Trump’s presidency. (Photo by Abbas MOMANI / AFP) (Photo credit should read ABBAS MOMANI/AFP via Getty Images)
Le Comité central du Fatah a décidé jeudi l’expulsion d’al-Qudwa du Mouvement.
Il ressort d’un communiqué portant le sceau du président palestinien et chef du Mouvement Fatah, Mahmoud Abbas, que la décision d’expulsion intervient après la fin d’un ultimatum de 48 heures accordé, lundi, à al-Qudwa pour qu’il se rétracte de ses positions affichées publiquement, dans lesquelles « il n’a pas respecté le règlement intérieur et les décisions du Mouvement et porté atteinte à son unité » Agé de 68 ans, Nacer al-Qudwa, homme politique et diplomate connu et neveu du leader palestinien disparu Yasser Arafat, avait annoncé au cours de la période écoulée son intention de former une liste séparée du Mouvement sous le nom « le Forum national démocratique » pour s’engager lors des élections législatives prévues le 22 mai prochain. Al-Qudwa a également adressé de vives et acerbes critiques à l’endroit de la direction palestinienne et au Mouvement Fatah. Il a annoncé, aussi, qu’il envisage de soutenir le dirigeant du Mouvement, Marwen Barghouti, au cas où ce dernier déciderait de se porter candidat à la prochaine présidentielle, fixée au 31 juillet.
Aggraver la confrontation
L’expert politique palestinien, Ahmed Rafik Awadh, a estimé que cette décision est de nature à approfondir la polémique et la confrontation au sein du Mouvement Fatah, entre partisans et désapprobateurs. Dans un entretien accordé à Anadolu, l’expert a dit : « je pense qu’une pareille décision aboutira à approfondir la confrontation entre les deux camps, al-Qudwa et le Fatah, ce qui affectera l’image et le rayonnement du Mouvement. Il a ajouté : « cette décision prouve que le dialogue entre al-Qudwa et le Mouvement est arrivé à une impasse et à un point du non-retour et atteste également que le Mouvement fait preuve de fermeté pour contrecarrer tout phénomène de dislocation ou de scission, de même que cela prouve que le Fatah est secoué par une véritable crise interne ». Awadh a indiqué qu’il existe de véritables appréhensions chez le Fatah, qui veut paraître uni et refuse qu’une quelconque personnalité s’arroge le statut de porte-parole alors qu’elle n’est pas habilitée à exprimer les positions du Mouvement. Il a indiqué que « le Mouvement adresse ainsi un message à son public stipulant qu’il est fort et apte à faire face à tout dirigeant qui sortirait de l’unanimité et qui tenterait de le briser ». Il a relevé que « la décision de l’expulsion et les conséquences qu’elle génèrera auront un impact négatif sur les résultats des élections et sur la possibilité de la victoire du Fatah ». Awadh a considéré qu’al-Qudwa « ne pourra pas s’engager dans les élections sans coalitions », ajoutant que « c’est pour cette raison que nous l’entendons tenter de s’attirer les faveurs des sympathisants du dirigeant limogé du Fatah, Mohamed Dahlane, sans pour autant s’allier avec lui ».
Un état de morcellement.
Pour sa part, le professeur de sciences politiques à l’université de Bir Zit, Jihad Harb, a souligné que la « décision d’expulsion était attendue et naturelle », ajoutant que « tout mouvement ou parti, dont l’un des membres décide de s’engager sur des listes séparées lors d’un scrutin, démissionne ou est limogé ». « Al-Qudwa a une place privilégiée au sein du Mouvement et les dirigeants se doivent d’être soudés et solidaires. Le Fatah a pris la décision de l’expulsion dans une tentative de maîtriser les cadres organisationnels du Mouvement », a-t-il dit. « Toutefois, la décision montre que le Mouvement n’est pas uni et souffre d’un état de dislocation et de morcellement en raison des divergences et des différends majeurs qui le traversent, dont al-Qudwa est l’une des illustrations, en plus du membre du Comité central, Marwen Barghouti, mais auparavant le dirigeant limogé Mohamed Dahlane, un homme à l’Influence certaine sur une grande partie des militants du Fatah dans la Bande de Gaza », a expliqué le politologue. Selon Harb, « les différends internes au sein du Mouvement Fatah pourraient influer sur sa position lors des prochaines élections ». Il a ajouté, dans ce cadre, que les « voix que glanera al-Qudwa lors des élections seront déduites du réservoir électoral du Mouvement Fatah ».
Aucun impact réel d’al-Qudwa
D’un avis différent, le professeur de sciences politiques à l’Université d’al Khalil (sud), Bilal al-Chobaki, considère que « l’expulsion d’al-Qudwa n’aura pas d’impact sur le Fatah », dans la mesure où, selon lui, le neveu de Arafat « ne dispose pas d’une large base dans la Rue palestinienne ». « Al-Qudwa dispose certes d’un réseau étoffé de relations avec des politiques et des médias, mais il est dépourvu de l’appui et du soutien populaire, en particulier dans les rangs du Mouvement Fatah » a-t-il encore dit. « Al-Qudwa exprime son opposition et critique la situation palestinienne actuelle, mais n’a pas offert jusqu’à présent un programme politique, une nouvelle vision ou une quelconque alternative, raison pour laquelle aucune base ne suivra un dirigeant qui n’a rien proposé », a expliqué al-Chobaki. « Al-Qudwa n’aura de l’impact que s’il procède à la formation de coalitions politiques, comme s’allier avec des dirigeants limogés parmi les sympathisants de Dahlane. C’est à ce moment-là que, ensemble, ils pourront former une force hostile au Mouvement Fatah », a-t-il conclu.