Cette position va acheminer l’idée selon laquelle les Hommes ont formé des hypothèses explicatives, pour donner sens aux situations vécues et pour partager leurs significations ; ils ont fabriqués des sentiments communs dans leurs consciences pour s’y fidéliser ; ils ont honoré leurs sociétés en honorant des symboles de lectures de leurs univers. En ce sens la religion est une des premières formes de la rationalisation du monde.
1.2.1 «L’enseignement du fait religieux» comme enjeu de basculements et d’oscillations
En même temps, soulignons que la laïcité concerne ces savoirs et leurs espaces scolaires mais aussi par le biais de l’Ecole la société civile. On peut dès lors comprendre que la transmission des faits religieux dans l’Ecole laïque donne lieu à des luttes sociales. Ces luttes symbolisent comment la société civique investit l’espace scolaire pour ses causes partisanes. Les syndicats enseignants, mais aussi les associations de parents d’élèves, occupent notamment des places dans la structure sociale de la laïcité : ils participent à son histoire.
Si l’Ecole, en tant qu’institution laïque a pour vertu le basculement du mémoriel à l’historique, sa fonction intégratrice et de socialisation, ses finalités morales, civiques et intellectuelles expliquent les compromis entre le mémoriel et l’historique. On peut dire que cette difficulté s’exprime à travers trois dimensions dans les programmes d’Histoire. Premièrement, pour les auteurs des programmes d’Histoire l’intégration des faits religieux en Histoire participe des savoirs, des savoir-faire qui sont là pour être transmis aux élèves. Et la participation de ces faits se précise avec la constitution de la discipline historique. C’est ladimension intellectuelle de leur participation. Deuxièmement, les auteurs des programmes d’Histoire pensent que « l’enseignement du fait religieux » soit là pour que les élèves tirent des leçons de l’Histoire. L’éducation à la tolérance, au refus d’intégrisme justifie la présence de ces faits dans l’espace laïque. C’est la dimension morale de leur participation. Troisièmement, ces mêmes auteurs imaginent que l’enseignement du fait religieux soit là pour que les élèves acquièrent une compétence à l’action politique, par la connaissance de leurs passés. L’apprentissage de l’esprit critique – pour celui de la citoyenneté – justifie la présence de ces faits dans l’espace laïque. C’est la dimension civique de leur participation.
2. Modèles de transmissions des faits religieux : les cas des manuels de Baccalauréats professionnels ou ceux de Baccalauréats généraux
2.1 Le processus de sécularisation
2.1.1 Les hommes et la société de 1850 à nos jours
Dans les trois manuels d’Histoire de Baccalauréat professionnel2 les récits vont vers l’Histoire du Temps Présent : le fait religieux est une constante dans toute société. Les auteurs situent comment les processus religieux participent aux processus de multiculturalisme et y associent un autre comment pour traduire l’idée du programme : chaque « cours » ou « faire le point » a ses séquences pour traiter les deux questions du programme d’Histoire ; à savoir, la question de la genèse de la participation des religions à la société puis celle de la sécularisation comme épreuve de fabrication du vivre-ensemble d’Etat-Nation. Nous pouvons faire ce premier constat car on repère dans ces matériaux des mots du champ de l’idée de croyances, de celui d’organisation, de celui de rapports avec l’Etat et la Société ou encore, de celui d’aire d’extension (notions et concepts prescrits par le programme).
2 Le Bertrand-Lacoste-2002, le Foucher-2006 et le Hachette-2004.
De plus, dans les« cours » ou « faire le point », les auteurs des manuels ne mettent pas seulement en relation les notions et concepts du programme mais aussi, ils les remobilisent dans les progressions de leurs paragraphes et dans leurs titres. Pour chaque manuel, il s’agit en fait de rythmer leurs discours qui mettent en relation les notions et les concepts. Nous voyons ainsi que les imbrications ne sont pas les mêmes et qu’elles ne s’enchainent pas de la même manière suivant les manuels de Baccalauréat professionnel. C’est-à-dire que les notions et concepts du programme deviennent des dimensions qui orientent chaque thèse ; les mises en relations émergent alors comme des réponses à la problématique.