Mardi 19 janvier, le personnel ainsi que la directrice de l’école maternelle de la Porte du Miroir à Mulhouse ont été la cible d’une violente altercation et de menaces proférées par deux parents d’élèves qui avaient réussi à s’introduire à l’intérieur de l’établissement. D’après un communiqué de l’académie de Strasbourg, les deux adultes sont entrés dans l’école lors de la sortie des classes.
Les enfants qui ont été témoins ainsi que l’équipe éducative sont «très affectés », rapporte l’académie, ajoutant que ces derniers «ont reçu le soutien de l’inspecteur de circonscription et de l’adjointe aux affaires scolaires de la ville de Mulhouse ». Momentanément fermée après les faits, l’école de la Porte du Miroir a rouvert le jeudi 21 janvier. Le motif de l’agression est d’ordre familial, les parents en question ayant fait l’objet par la directrice de l’établissement d’un signalement pour maltraitance vis-à-vis de leur enfant. Une enquête a été ouverte.
Insultes et menaces de mort
L’affaire aurait éclaté lorsque la directrice de l’établissement, également institutrice au sein de l’école, a signalé aux autorités une maltraitance des parents vis-à-vis de l’un de ses élèves, a précisé au Figaro la procureure de la République de Mulhouse Edwige Roux-Morizot. Le couple s’est alors rendu à l’école où est scolarisé leur fils et a menacé de mort l’institutrice. Les deux parents ont été placés en garde à vue mais, la mère de famille étant enceinte de plusieurs mois, son état a été jugé incompatible avec une garde à vue.
La directrice de l’établissement s’est vue attribuer 5 jours d’Incapacité totale de travail (ITT) et les parents comparaîtront devant le tribunal correctionnel de Mulhouse dans quelques semaines pour «outrage à l’égard d’un agent chargé d’une mission de service public et menaces de mort ». Le couple encourt une peine d’environ 7500 euros d’amende et plusieurs mois d’emprisonnement. «J’estime qu’après ce qui s’est passé avec Samuel Paty, ce sont des faits qui peuvent amener à de telles conséquences », a affirmé la procureure.
«Cette directrice d’école était dans son rôle en signalant un cas de maltraitance, elle faisait son métier », a réagi auprès du Figaro la maire de Mulhouse Michèle Lutz. «Aucun contentieux ne justifie cette violence. Certains parents ne respectent plus les valeurs de la République, or nous sommes à l’école de la République. Je souhaite donc qu’il y ait une sanction à la hauteur de ce qui s’est passé, que la justice donne un signe à la communauté éducative avec une peine exemplaire », a ajouté l’élue.
«Certains parents ne voient plus les limites»
«En quelques semaines, il y a eu plusieurs remontées d’agressions de parents d’élèves à l’égard des enseignants dans la région. Ils dénigrent les professeurs et remettent en cause leur façon de travailler, leur pédagogie », explique au Figaro la secrétaire du SNUipp-FSU Ghislaine Umhauer, soulignant que l’esclandre de l’école de la Porte du Miroir fait partie d’une série de plusieurs faits similaires envers les enseignants de la région. «C’est la troisième fois que nous sommes confrontés à de telles scènes de violences de la part de certains parents d’élèves vis-à-vis des professeurs. Aujourd’hui, certains parents se permettent de plus en plus de choses, ils ne voient plus les limites et ressentent un certain pouvoir du fait que le ministère nous impose une politique de ‘pas de vagues’ », ajoute-t-elle. Laure*, institutrice en primaire à Mulhouse, fait partie de ces enseignants de la région ayant subi, il y a quelques semaines, des violences similaires à celles infligées à la directrice de l’école maternelle de la Porte du Miroir. «J’avais peur de revenir au travail. Mon mari m’emmenait tous les jours et, en classe, je risquais de m’effondrer en larmes à tout moment. L’Éducation Nationale, à force de ne pas nous soutenir face à certains parents d’élèves, conduit à ce que certains parents se croient tout-puissants », témoigne l’enseignante.
La maire de Mulhouse Michèle Lutz a assuré sur Twitter suivre «de près cette affaire » et a affiché son «soutien indéfectible » au personnel enseignant face à «des actes de violences qui n’auront jamais leur place au sein de l’école de la République ». Le président de la région Grand Est Jean Rottner a, de son côté, fait savoir son «total soutien au personnel enseignant », ajoutant que «l’autorité républicaine doit s’exercer partout ».
L’académie de Strasbourg précise qu’une cellule d’écoute et de soutien au personnel de l’école de la Porte du Miroir a été mise en place «avec des conseillers pédagogiques de la circonscription, une Psy-En et un professeur des écoles spécialisé ». Trois membres de l’équipe de sécurité dépendants de l’académie assurent par ailleurs la surveillance de l’établissement.
*Le prénom a été modifié
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