Conseil constitutionnel a tranché suite au recours déposé par plusieurs députés pour contester la proposition de loi Sécurité globale. (Illustration) — Lionel Urman
Le 5 mai dernier, six députés, principalement de gauche, étaient venus défendre devant le Conseil constitutionnel leur recours pour contester la proposition de loi Sécurité globale adoptée par le parlement le 15 avril . Le Conseil a rendu son avis ce jeudi et décidé de censurer l’ex-article 24 de la proposition de loi LREM qui punit la « provocation à l’identification » des forces de l’ordre.
Dans leur décision, les Sages ont estimé que « le législateur (n’avait) pas suffisamment défini les éléments constitutifs de l’infraction contestée » et dès lors que l’article « (méconnaissait) le principe de la légalité des délits et des peines ».
Manque de précisions
Le Conseil constitutionnel a jugé insuffisamment précis le paragraphe 1 de l’article 52, qui réprime de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende « la provocation, dans le but manifeste qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, à l’identification d’un agent de la police nationale, d’un militaire de la gendarmerie nationale ou d’un agent de la police municipale lorsque ces personnels agissent dans le cadre d’une opération de police, d’un agent des douanes lorsqu’il est en opération ».
« Ces dispositions ne permettent pas de déterminer si le législateur a entendu réprimer la provocation à l’identification d’un membre des forces de l’ordre uniquement lorsqu’elle est commise au moment où celui-ci est « en opération » ou s’il a entendu réprimer plus largement la provocation à l’identification d’agents ayant participé à une opération, sans d’ailleurs que soit définie cette notion d’opération » a justifié le Conseil constitutionnel. « D’autre part (…) les dispositions contestées font peser une incertitude sur la portée de l’intention exigée de l’auteur du délit » a-t-il ajouté.
Darmanin se félicite, les syndicats de police se désolent
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a tout de suite réagi sur Twitter en proposant au Premier ministre « d’améliorer les dispositions » de la proposition de loi. « Je me félicite des nombreuses dispositions validées qui aideront notre politique de sécurité », a-t-il ajouté.
L’article 24 était largement soutenu par les syndicats policiers. « La censure de l’article 24 démontre que la France stagne sur les droits de certains humains et continue de priver les policiers du droit à protéger leur identité », a réagi sur Twitter Linda Kebbab, du syndicat Unité SGP Police FO. « J’avais évoqué ma crainte de l’absence de précision » dans la rédaction de l’article, a-t-elle ajouté. « Ce débat méritait mieux qu’une joute partisane », a-t-elle encore déploré.
Censure aussi sur l’utilisation des drones
L’article 24, devenu article 52 une fois la loi adoptée par le parlement le 15 avril, avait suscité une farouche opposition et provoqué des manifestations en novembre et décembre 2020. Au total, les Sages de la rue Montpensier ont censuré totalement ou partiellement sept des 22 articles dont ils ont été saisis, par des députés, sénateurs et le Premier ministre, Jean Castex. Ce dernier avait seulement saisi le Conseil constitutionnel au sujet de l’ex-article 24 , qui avait pour ambition de protéger les forces de l’ordre en opération en pénalisant la diffusion malveillante de leur image et est largement soutenu par les syndicats policiers.
Autre camouflet de taille, le Conseil Constitutionnel a également censuré une large partie de l’article qui organisait l’utilisation des drones par les forces de l’ordre , notamment lors de manifestations. Comme l’ex-article 24, cette disposition avait suscité l’ire des défenseurs des libertés publiques.
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