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Razika Adnani, philosophe et islamologue, démontre que cette idée reçue n’est pas fondée.
Beaucoup de personnes pensent que le voile est un élément essentiel qui détermine l’appartenance de la femme à la religion musulmane. Razika Adnani(1), philosophe et islamologue, démontre que cette idée reçue n’est pas fondée. Ouest France
Publié dans Ouest France
« Le port du voile est la pratique la plus très répandue de la charia . Liée à la culture méditerranéenne ancestrale, elle constitue une discordance avec notre époque et avec ses valeurs fondamentales que sont l’égalité et la liberté. Le voile discrimine la femme, car il n’est imposé qu’à elle, et déshumanise l’homme en le présentant comme un être soumis au diktat de ses instincts. Si on l’examine d’un point de vue religieux, c’est au nom de l’islam qu’il s’impose y compris en Occident.
Les trois versets recommandant pour la femme une manière de s’habiller n’évoquent pas sa chevelure. Ainsi le foulard, la pièce principale du voile sans laquelle la femme ne peut être considérée comme voilée, n’apparaît pas dans le Coran. On peut donc logiquement déduire que le voile n’est pas une prescription coranique.
Le foulard n’est pas cité dans le Coran
En effet, le verset 31 de la sourate 24, la Lumière, le plus cité, affirme que les femmes doivent rabattre « leur khimar sur leurs djouyoub ». Le terme djouyoub, pluriel de djaïb, est traduit par poitrine même si certains commentateurs pensent qu’il s’agit du col du vêtement. Quant au mot khimar, qui signifierait le foulard islamique, il ne peut dans ce cas qu’être le châle ou l’écharpe.
Le verset 59 de la sourate 33, les Coalisés, recommande aux femmes « de ramener sur elles leurs djalabib », pluriel de djilbab. Ce mot désigne une robe longue sans aucune précision sur sa longueur ; elle aussi couvre le corps et non la tête. En réalité les philologues ne savent pas quel est le sens exact de ces mots ni quelle était la mode vestimentaire de l’époque du prophète en Arabie. Ils se réfèrent à des commentaires datant de plusieurs siècles après sa mort.
Quant au verset 60 de la sourate 24, la Lumière, il parle du vêtement en général sans aucune précision. Il ne parle pas non plus de la chevelure ni de la tête de la femme. Le terme hidjab lui-même est mentionné dans un seul verset, le 53 de la sourate 33, les Coalisés, pour désigner un rideau qui doit séparer les femmes du prophète, de ses compagnons.
Il ne suffit pas qu’une règle soit dictée dans le Coran pour qu’elle devienne obligatoire
Si cette analyse est importante, elle ne signifie pas qu’il suffit qu’une règle soit dictée dans le Coran pour qu’elle devienne obligatoire. En effet, les musulmans ne pratiquent pas toutes les recommandations coraniques. D’ailleurs, le verset 31 de la sourate 24, la Lumière, qui est présenté comme preuve que le voile est une prescription coranique indiscutable, mentionne aussi les esclaves et les eunuques à qui la femme peut montrer sa beauté. Or, l’esclavage et la castration sont deux pratiques qui sont abandonnées aujourd’hui. Et le verset 33 de la sourate 33, les Coalisés, ordonne aux femmes de rester chez elles, ce que la majorité des musulmanes ne prennent pas en compte.
Ainsi, ce sont des musulmans qui ont décidé quelle est la partie du corps de la femme qui doit être cachée et la manière dont le voile doit être porté, mais aussi quelles règles il faut suivre et celles qu’il faut abandonner.
Si les islamistes donnent autant d’importance au voile, c’est parce qu’il représente un indice important, car visible, de la réussite de leur mouvement. Leur stratégie consiste à habituer les femmes à le porter. Voilà pourquoi, ils veulent l’imposer également aux petites filles. »
Razika Adnan
Deuxième article d’une série que publie le journal #OuestFrance.
Cet article est le deuxième d’une série de 5 articles publiés par Ouest France.