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Contre le séparatisme islamiste,

Publié le 6 février 2021
Vues: 380

 …prévenir autant que punir

Rédigé par Hakim El Karoui
 

Contre le séparatisme islamiste, prévenir autant que punir
 
Le projet de loi confortant les principes républicains, actuellement en cours d’examen à l’Assemblée nationale, a pour objectif de faire reculer « le séparatisme islamiste » en lui opposant un certain nombre de dispositifs destinés à bloquer sa dynamique. Avant de les examiner, rappelons en quelques mots la situation des musulmans en France.
 
Comment les musulmans de France vivent l’islam
Sur les six millions de personnes, adultes et enfants, se réclamant de cette religion, trois catégories peuvent être distinguées : une moitié s’est insérée dans la société française, discrètement, sereinement et est en train d’inventer un islam du XXIe siècle fait de choix individuels et de pratiques collectives. Un quart, souvent des immigrés de première génération, a gardé les valeurs du pays d’origine mais ne veut pas les imposer au reste de la société.

Un autre quart enfin, qui comporte – et c’est le plus inquiétant 45 % des jeunes de moins de 25 ans – a une vision très conservatrice d’un islam transformé en identité, bien au-delà de la seule religion, avec une vision autoritaire de leur foi qu’il s’agit d’imposer au reste des musulmans d’abord et à la société ensuite. Parce qu’ils y voient un moyen de s’affirmer, la religion étant leur identité première, défendre leur vision de la religion, c’est défendre leur place dans la société.

Quand les difficultés de l’intégration sont utilisées par les zélotes de l’islam politique

Cette réalité doit se comprendre dans le contexte du processus d’intégration à la française, à la fois exigeante et ambitieuse : exigeante car il s’agit ni plus ni moins que de changer de culture ; ambitieuse car au bout du chemin, il y a la reconnaissance pleine et entière du nouveau citoyen. Mais, qu’est-ce-que l’intégration, si ce n’est une transition difficile, entre deux cultures, entre deux générations, entre deux histoires ? Transition difficile, faite d’allers et retour, de conflit, d’incompréhensions, au sein de la famille et avec la société. Transition qui explique les quêtes d’identité d’adolescents ignorés par leurs espaces géographiques, culturels et familiaux d’origine.

Cette transition est utilisée par les zélotes de l’islam politique : « Vous n’êtes pas complètement Français ; vous n’êtes plus vraiment marocain, algérien, tunisien ou sénégalais ? Ne craignez rien, vous êtes musulmans. » Et, pourrait-on ajouter, vous avez accès à l’identité universaliste que la France vous promet mais qu’elle ne vous donne pas. Car l’islam est une religion universelle. La oumma, la communauté des croyants est accueillante (la racine du mot est la même que pour le mot mère) et sans limite. Mais l’islam des enfants sera différent de celui des parents : il devra marquer une rupture générationnelle. Pour dire le refus des enfants d’être traité comme l’ont été leurs parents. L’islam des enfants sera plus dur, plus revendicatif, plus particulariste car il voudra être le symbole du refus d’une forme de domination. C’est l’islam décrit plus haut, celui de la tentation séparatiste.
 

Contre le séparatisme islamiste, prévenir autant que punir

Derrière le séparatisme, un processus à l’œuvre

Regardons plus en détail ce que signifie ce terme et surtout quel est le processus à l’œuvre. Le sujet est majeur car le danger djihadiste est présent dès le début du processus. Sept étapes du processus de radicalisation peuvent en effet être distinguées. La première, c’est l’altérisation : « Nous ne sommes pas comme eux. » La deuxième, c’est l’auto-exclusion : « Il y a eux et nous. »

Cette dichotomie peut être posée dans les deux groupes : les musulmans qui veulent se distinguer du reste des Français mais aussi tous ceux qui pensent que les musulmans ne seront jamais des Français comme les autres. Elle est dangereuse car elle conduit à la troisième étape, la victimisation : « Ils nous oppriment. » C’était d’ailleurs le mantra de Tariq Ramadan, « l’islam est la religion de tous les opprimés » et particulièrement des « cités françaises ». Vient alors la culpabilisation collective : « Ils sont tous complices. »

C’est alors que la suprématie arrive : « Mais nous valons mieux qu’eux. » Pourquoi valons-nous autant ? Parce que nous sommes musulmans. Mais pas musulman comme nos parents, des musulmans qui affirment leur islamité et l’utilisent pour se distinguer. Il faut donc se protéger du reste de la société qui nous empêcherait de nous affirmer : « Défendons-nous, nous le méritons. » Et nous le méritons tellement, qu’il n’y a plus de limite : « Adoptons la violence. »

La question du séparatisme et de l’influence salafiste n’est donc pas une petite question, c’est un enjeu majeur, pour la société française en général et pour les musulmans en particulier. Je crois donc que ce texte est favorable aux musulmans, mais que l’action législative ne suffira bien sûr pas à endiguer l’influence idéologique du salafisme.
 
Favoriser la mixité, faire plus de prévention… Beaucoup reste à faire du côté de l’Etat
 
Pour contrer l’influence grandissante de ce dernier segment, le texte prévoit un arsenal juridique important qui s’articule autour de quatre grands axes. L’entrave d’abord avec l’instauration d’un contrôle efficace de l’instruction à domicile et du financement des associations. Ensuite, le projet de loi vise à lutter contre les manifestations agressives ou violentes de l’extrémisme, en partie à travers l’amélioration de la protection des agents publics et de la lutte contre la haine en ligne.

Le troisième axe de ce texte a pour objectif de promouvoir l’égalité pour tous en instaurant une protection des héritiers et en luttant contre certains comportements discriminants (polygamie, certificats de virginité, mariages forcés) qui peuvent être pratiqués par des personnes de confession musulmane, même si cela a plus à voir avec des pratiques culturelles qu’avec des pratiques religieuses.

Enfin, le quatrième axe ambitionne de professionnaliser les cultes en élargissant – un peu – les capacités de financement des associations tout en renforçant – beaucoup – leur contrôle, ce qui n’est pas inutile tant l’amateurisme règne encore dans la gestion de certaines mosquées.

 
Contre le séparatisme islamiste, prévenir autant que punir
 
Ces propositions ne sont pas inutiles pour contrecarrer la progression de l’idéologie islamiste. Toutefois, beaucoup reste à faire du côté de l’Etat comme du côté de la communauté musulmane. Premièrement, la politique de répartition de l’immigration doit évoluer. Le modèle d’intégration à la française est un modèle qui fonctionne bien à condition qu’il y ait une vraie mixité entre les groupes majoritaires et minoritaires.

Or, aujourd’hui les populations immigrées sont concentrées de plus en plus dans les mêmes quartiers : la part des immigrés en Seine-Saint-Denis est passé de 15 à 30 % entre 1982 et 2015 alors que dans le même le pourcentage d’immigrés dans la population française passait de 7,5 % à 9,2 %. Par ailleurs, contrairement aux idées reçues, l’État dépense peu pour les quartiers en difficulté.

Enfin, les quartiers populaires sont de grands contributeurs au financement de la protection sociales parce qu’ils sont peuplés essentiellement par des jeunes actifs : le département de Seine Saint-Denis est le 8e contributeur au financement de la protection sociale en France alors qu’il est le dernier receveur. Favoriser l’intégration passe par des efforts d’investissement dédiés à l’humain (éducation, culture, santé) et non pas uniquement réservés à l’immobilier. Il faut créer un ANRU des habitants sur le modèle de l’ANRU des bâtiments !

Ensuite, l’Etat doit dédier plus de fonds à la prévention. La Cour des Comptes estime qu’entre 2015 et 2019, plus de 9 milliards d’euros ont été dépensés dans la lutte contre le terrorisme mais seulement quelques dizaines de millions pour la prévention. Pourtant, le combat idéologique est aujourd’hui nécessaire pour endiguer la montée de l’extrémisme et si l’État ne peut pas le financer, il doit a minima aider les musulmans à s’organiser pour le faire. D’où l’importance pour les musulmans de France de se doter d’un système de financement qui permettra, d’une part, de mener un travail théologique pour favoriser l’émergence d’un islam français et, d’autre part, financera le fonctionnement du culte (ex : formation et salariat des imams) pour le rendre indépendant des ingérences étrangères.
 
Protéger les nouvelles voix de l’islam français
Enfin, il y a aujourd’hui une nouvelle génération de musulmans qui porte un discours progressiste et réformateur mais qui est constamment attaquée. Ceux qui refusent l’idée même que l’islam puisse exister en France les accusent de dissimuler des intentions malveillantes à l’égard de la communauté nationale. A l’inverse, les islamistes les traitent d’égarés ou même de renégats. Il est nécessaire que l’Etat protège ces nouvelles voix et favorise un climat d’apaisement et de sérénité. Aux musulmans aussi de se mobiliser contre le djihadisme.

Après le « Nous sommes victimes, pas coupables », un silence gênant s’est installé. Il faut pourtant dépasser l’injonction paradoxale « Faites de votre religion une affaire privée mais dénoncez publiquement le terrorisme » par une autre sentence : « C’est notre responsabilité comme Français de nous engager contre le terrorisme, c’est notre intérêt comme musulman que de le faire. » Parce que pendant qu’ils se taisent, les discriminations dont ils sont victimes augmentent. Ni victimes, ni coupables. Juste responsables. A eux d’aller dans les mosquées pour déloger les salafistes. A eux de s’organiser enfin pour collecter de l’argent qui permettra de former des imams en France en leur donnant ensuite les moyens de prêcher un islam éclairé, dans les mosquées et sur les réseaux sociaux. A eux d’aller dans les prisons pour combattre les discours radicaux. A eux, collectivement, de parler aux jeunes pour leur transmettre l’islam.

Pour conclure, je voudrais rappeler une règle d’or : travailler aujourd’hui sur l’islam en France nécessite d’aimer le débat, d’accepter la complexité et de chérir la modération. Comme le disait René Char, il faut se tenir « sur la ligne de partage de l’ombre et de la lumière », menacé par l’islamisme d’un côté et la haine anti-musulmans de l’autre.

*****
Hakim El Karoui est essayiste et dirigeant de sa société de conseil stratégique, Volentia. Il est notamment l’auteur du rapport « Un islam français est possible » et « Nouveau monde arabe, nouvelle “politique arabe” pour la France » ou encore « Les quartiers pauvres ont un avenir » avec l’Institut Montaigne. Il est dernièrement l’auteur du livre: “Les militants du djihad”. Portrait d’une génération (Fayard, 2020) avec Benjamin Hodayé. Il est également le président de l’Association musulmane pour l’islam de France (AMIF).
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Les trois fédérations au CFCM, s’expliquent…

Publié le 6 février 2021
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…Islam de France : le non à la charte réaffirmé. 

Rédigé par Hanan Ben Rhouma |
 
Les trois fédérations non-signataires de la charte des principes pour l’islam de France au sein du Conseil français du culte musulman (CFCM) persistent et signent leur refus d’adhérer à la charte des principes pour l’islam de France en l’état. Elles l’ont fait savoir lundi 1er février, exposant en détail leurs multiples points de désaccord. Ce faisant, elles prennent le leadership de la contestation de la charte parmi les musulmans de France. Gérald Darmanin n’entend pas baisser la pression. Le ministre de l’Intérieur a d’ores et déjà menacé les non-signataires.
 
Islam de France : le non à la charte réaffirmé par trois fédérations au CFCM, elles s'en expliquent
 
Le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF), la Confédération islamique Milli Görüs (CIMG) et Foi & Pratique ont fait part de leur refus de signer en l’état la « charte des principes pour l’islam de France » présentée à l’Elysée dès le 18 janvier.
 
Alors que l’échéance des 15 jours, fixée par l’Elysée au CFCM pour obtenir leur signature, est arrivée, elles campent sur leurs positions, regrettant une « gestion expéditive » de cette affaire.

Lire ici ce que proclame la charte des principes pour l’islam de France

« La signature précipitée de la charte et les différentes déclarations ont malheureusement conduit à la perception d’un projet imposé par le haut, sans l’approbation de la base et notamment des acteurs concernés qui sont les imams », ont-elles fait valoir dans un communiqué commun lundi 1er février, jour où les débats autour du projet de loi contre le séparatisme ont débuté dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale.

Elles ont adressé, lundi 1er février, leurs observations et réserves, très nombreuses, à la présidence du Conseil français du culte musulman (CFCM) dont Saphirnews a dévoilé le contenu dans son intégralité ici et en appellent à des amendements afin d’envisager une quelconque signature.
 
De multiples désaccords exposés
« L’usage d’un discours marginalisant les musulmans et les imams, la généralisation de comportements inacceptables perpétrés par des individus isolés à la totalité de la communauté musulmane entameraient sérieusement le crédit de cette charte et donc celui du Conseil national des imams », ont estimé le CCMTF, Milli Görüs et Foi & Pratique, en préambule. « De la même manière, l’usage de propos abstraits pouvant jeter le doute sur les musulmans et ouvrant la voie à des interprétations différentes risque également de nuire à l’acceptation de cette charte et de ce Conseil par les musulmans. »

Certains articles de la charte sont jugés « infondés et outrepassant ses objectifs », à commencer par le titre de la charte, estimant que le concept d’« islam de France » induit « une distinction de l’islam au niveau national (qui) ne saurait être une dénomination correcte ».

Par ailleurs, « dans cette charte, la croyance religieuse et la Constitution sont mentionnées sur le même plan et présentées comme des systèmes contradictoires. Cette méthode n’est pas en accord avec la laïcité puisqu’elle mélange des domaines séparés par la loi et présume que toutes les organisations musulmanes, sans aucune distinction, sont opposées à la Constitution », ont-elles affirmé.

La mention de l’homosexualité dans la charte « contredit les principes de la foi musulmane », écrivent-elles aussi. « La religion musulmane considère l’homosexualité comme un péché. C’est une question sur laquelle l’individu sera jugé dans l’au-delà suivant sa responsabilité individuelle, sa conscience et sa foi. Ainsi, il n’appartient pas à une organisation musulmane ou un imam de punir, d’employer la violence, d’exclure ou d’insulter un individu qui commet un péché, quel qu’il soit », ont souligné les fédérations.
 

Islam de France : le non à la charte réaffirmé par trois fédérations au CFCM, elles s'en expliquent
 
« Certains peuvent considérer comme discriminatoire le fait qu’une religion désigne, en se référant à ses sources, l’homosexualité comme un péché. Pour autant, cela ne leur donne pas le droit de s’immiscer dans les affaires internes, les croyances, le culte et les pratiques de cette religion. La compréhension et le respect sont de mise. »

De même, la présence du terme « misogynie » « renvoie à un préjugé répandu à propos de l’islam et des musulmans, utilisé par les critiques de l’islam et les milieux islamophobes » et sa mention « signifierait l’acceptation d’un parti pris stéréotypé ».

Concernant la lutte « contre l’idéologie du takfir, (anathème), qui est souvent le prélude à la légitimation du meurtre » édictée dans l’article 5, elles assurent qu’il s’agit d’« une approche étrangère à la réalité de la vie religieuse et sociale des musulmans ». « Convaincus qu’il n’y a pas de contrainte en religion, nous considérons le rejet de la violence, qui est la forme la plus intense de coercition, comme une exigence de notre foi », déclarent-elles.

« Il n’existe pas de mécanisme d’enregistrement, de suivi et de sanction de ceux qui acceptent ou rejettent la foi musulmane. L’appel au respect des choix des personnes dans les lieux de culte et les familles, tel que mentionné dans cet article, sous-entend que nos organisations aient adopté une position différente jusqu’à présent. Or, nos organisations rejettent catégoriquement ce genre d’idéologie depuis toujours et rappelle, une fois de plus, qu’il appartient à la justice de notre pays de sanctionner ces dérives inacceptables. »
 
L’article 6 et 9 portant sur l’islam politique et le racisme d’Etat décriés
 
L’article 6 portant sur « le rejet de toutes les formes d’ingérence et de l’instrumentalisation de l’islam à des fins politiques » est appelé, sans surprise, à être fortement amendé. La définition de l’islam politique, désignant dans la charte « les courants politiques et/ou idéologiques appelés communément salafisme (wahhabisme), le Tabligh ainsi que ceux liés à la pensée des Frères musulmans et des courants nationalistes qui s’y rattachent », est clairement rejetée. Pour les non-signataires, elle « ne peut rester en l’état puisqu’il laisse un champ très large de possibilités aux amalgames entre les croyants notamment pratiquants et les extrémistes qui dévoient l’islam pour leurs propres objectifs ».

« Tout comme l’implication et l’activisme des croyants chrétiens, juifs ou bouddhistes ne sont pas considérés comme du communautarisme ou séparatisme, ni qualifié de “christianisme politique”, de “judaïsme politique” ou de “bouddhisme politique”, il devrait en être de même pour les musulmans. Toutes les pratiques religieuses devraient être protégées de la même manière dans le cadre de la liberté religieuse de notre Constitution », déclarent-elles, estimant le concept d’« islam politique » tel que stipulé dans la charte comme une restriction des « droits d’accès des musulmans ou des organisations musulmanes au débat social ou politique puisqu’ils pourront être accusés de faire de l'”islam politique” et empêchés d’exercer leurs droits démocratiques. Cela peut aussi les exposer à la discrimination et criminaliser leurs opinions ».

Condamnant « le détournement de notre religion par certains groupuscules ou organisations criminelles », les trois fédérations préfèrent l’usage de l’expression « extrémistes abusant de la religion contre l’ordre constitutionnel » contre lesquels il faut s’opposer. Une appellation « plus précise » qui « permet d’éviter les amalgames dont les musulmans pourraient être victimes, alors que ces derniers contribuent chaque jour au bon vivre ensemble ».

Quant à l’article 9 portant sur la « lutte contre la haine antimusulmane », les fédérations estiment que le futur CNI « n’a nullement compétence en la matière pour affirmer ou infirmer s’il y a un racisme d’Etat ou un racisme institutionnalisé, s’il y a diffamation ou pas ». « La diffamation publique est un délit encadré par la loi, et il revient aux parties ou institutions concernées de saisir la justice », indiquent-elles, rappelant que la liberté d’expression est « un droit fondamental ».

Par ailleurs, « aucune association religieuse ne peut se substituer aux organisations spécialisées dans le relevé des actes racistes, islamophobes, ou antisémites et qui sont les mieux placées pour affirmer ou infirmer un racisme institutionnel ».

L’ensemble de leurs critiques détaillées sont exposées ici.

Le ministre de l’Intérieur menace les non-signataires

Enfin, sur l’article 10 menaçant les fédérations qui ne respectent la charte d’« exclusion de toutes les instances représentatives de l’islam de France », les termes sont « d’abord antidémocratiques laissant la possibilité à deux fédérations qui se mettraient d’accord d’entamer une procédure d’exclusion en se donnant la possibilité d’en définir le contenu ».

En outre, « donner le rôle de pilotage de la procédure contradictoire à la partie accusatrice, c’est-à-dire au deux fédérations qui ouvrent l’enquête et déterminent le contenu, est également antidémocratique et contraire au principe le plus élémentaire du droit qui est le respect du principe de ne pas être juge et partie en même temps dans une affaire ». Une exclusion des instances musulmanes, si elle devait être prononcée, « représente un esprit totalitaire inacceptable ».

« Nous formons le vœu que nos observations contribuerons à l’amélioration de cette charte, afin qu’elle puisse être reconnue et adoptée par tous », ont signifié le CCMTF, Milli Görüs et Foi & Pratique. Encore faut-il que leurs « observations » puissent être prises en compte par l’ensemble des fédérations signataires.
 

Islam de France : le non à la charte réaffirmé par trois fédérations au CFCM, elles s'en expliquent
 
La fracture au sein du CFCM est nette. En attendant une réaction officielle de la présidence de l’instance, Gérald Darmanin ne s’est pas privé d’avertir les non-signataires s’ils persistent dans leur refus de signer la charte. « Nous allons regarder particulièrement ce qui va se passer dans les lieux de culte qu’ils gèrent car nous n’aurons pas la main qui tremblent lorsque ceux-ci auront ici ou là des actions ou des paroles qui sont contre les valeurs de la République », a-t-il affirmé sur France Inter lundi 1er février.

Les fédérations devraient-elles être exclues du CFCM à terme ? Oui, pour le ministre. Il estime que l’Etat ne pourra « plus discuter » avec les fédérations « qui ne peuvent pas écrire sur un papier qu’ils sont parfaitement compatibles avec les lois de la République, que les lois de la République sont supérieures à la loi de Dieu ».

Or, ces fédérations ne sont pas les seules à s’opposer à la charte en France. Plusieurs mosquées de la région parisienne ont signé leur communiqué du jour signé par le trio. Ailleurs, en France, des responsables musulmans ont aussi fait savoir leur opposition à la signature de la charte, à l’instar du Conseil des mosquées du Rhône, présidé par la Grande Mosquée de Lyon.
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«Les Français dits de souche m’ont servi de modèle!»

Publié le 6 février 2021
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Fille d’immigrés turcs, Çigdem Koç est devenue Claire Koç en 2008…éloge de l’assimilation. 

Dans Claire, le prénom de la honte (Albin Michel), la jeune journaliste raconte le cheminement qui l’a conduite à faire ce choix. Son témoignage est à la fois une plongée dans une France en voie de désintégration et un éloge de l’assimilation.

Par Alexandre Devecchio et Victor Rouart
«Ce qui me frappe, c’est qu’on nous affirme toujours que la France a beaucoup à apprendre ou à s’enrichir de l’étranger. Mais jamais on ne nous dit que l’étranger a beaucoup à apprendre ou à s’enrichir de la France», observe Claire Koç. Jean-Luc Bertini pour le Figaro Magazine
Pourquoi avoir choisi de changer de prénom et de vous appeler Claire?

Claire KOÇ. – Ce prénom est mon adoption à cette grande famille qu’est la France. C’est un choix personnel qui relève de mon identité intérieure. Un choix de cœur et d’esprit.

Vous attendiez-vous à ce que votre choix soit si mal accepté?

Je ne m’attendais pas à un tel dénigrement… En revenant chez mes parents avec ma carte d’identité et mon prénom «français», j’ai été rabaissée, humiliée. «Quoi Claire? C’est quoi ce prénom de merde? Tu as honte de ce que tu es?» Ils affirmaient que Claire voulait dire «sale» en turc, mais c’était faux (en fait, c’est une traduction libre de notre dialecte anatolien). C’est la première chose qui leur est venue à l’esprit.

Pour autant, je ne renie absolument pas mon identité turque, elle est présente, ce serait insensé de la rejeter. J’avais un prénom difficile à prononcer (Çigdem). Je sentais souvent des difficultés de prononciation à l’école, dans les administrations, etc. Je ne voulais plus être une personne différente des autres. Mais, en devenant Claire, je n’avais pas mesuré le prix à payer…

Vous dites que vous avez grandi dans un cadre homogène culturellement. Comment vous est venu cet amour de la France malgré cet environnement défavorable?

Quand nous sommes arrivés en France en 1984, je me souviens de mes années de primaire. Nous vivions dans une cité HLM d’où les Français dits de souche commençaient à partir. Il en restait quelques-uns qui m’ont servi de modèle. On entendait de la musique française. Nos voisins nous apportaient des plats qu’ils avaient préparés pour nous les faire goûter. Nous avons découvert le pot-au-feu! Même le jambon était présent, il n’y avait pas toutes ces querelles et notamment le tabou alimentaire. Nous allions à l’église, on allumait des cierges à Noël, on fêtait l’Épiphanie sans connotation religieuse derrière, nous appliquions les traditions du pays d’accueil.

Au fur et à mesure, notre cité s’est vidée des derniers «Gaulois», comme ils étaient appelés. Chaque famille était remplacée par une famille turque ou provenant d’une immigration de culture musulmane. Tous se sont repliés sur eux-mêmes doucement et l’antenne parabolique est apparue, ce qui constitue le moment fatidique selon moi. Tous étaient connectés en permanence avec la Turquie.

Nous regardions des films français avec Delon. C’était notre vie : nous nous imprégnions de la culture française

Claire Koç

Nous vivions, mangions, dormions à l’heure turque. Nous étions en Turquie, plus en France. Quand je rentrais de l’école où j’avais parlé français toute la journée, à peine mon cartable posé, j’étais revenue en Turquie. La France était devenue inexistante. Des associations conseillaient même à notre communauté de poursuivre sa façon de vivre sans faire le moindre effort d’intégration.

Mais, avant que mes parents se referment sur la communauté qui devenait de plus en plus nombreuse dans notre cité après 1984, ils m’avaient ouverte à la France. Ils ont semé des petites graines mêmes si elles n’étaient pas nombreuses. En plus, j’avais la chance d’appartenir à une famille qui n’était pas liée à la rigueur de l’islam sunnite. Nous sommes alévis, une minorité religieuse turque qui a subi des massacres, qui a été confrontée à l’horreur au cours de l’Histoire. Mes parents ressentaient une certaine hostilité envers la religion. Ils appelaient les voilées et les barbus les «bigots» en turc. Je comprends encore mieux aujourd’hui leur position à l’époque.

Pour eux, la religion n’avait rien à faire au sein du foyer. Ils conservaient les traditions des alévis, mais sans excès. Ils écoutaient les débats politiques en France, ils évoquaient les matchs de football, le chômage. Les problèmes quotidiens en France d’une famille classique. Nous regardions des films français avec Delon. C’était notre vie: nous nous imprégnions de la culture française.

Les commerces deviennent turcs. Mon boulanger était turc, l’épicier aussi. C’est ça le communautarisme. Aucun espace n’est plus accordé à la France

Claire Koç

Et pourtant pour votre famille et votre entourage, l’assimilation n’a pas fonctionné. Pourquoi?

La raison est évidente lorsque l’on est confronté à une forte concentration d’une population endogame dans une zone identifiée. Les individus sont tous les mêmes, il n’y a plus besoin de parler français. Par exemple, en présence d’une forte communauté turque dans une cité, les commerces deviennent turcs: musique, alimentation, vêtements. Mon boulanger était turc, l’épicier aussi. C’est ça le communautarisme. Aucun espace n’est plus accordé à la France. Et les communautés ne se mélangent pas dans les cités. Ces communautés ont aussi importé leurs problèmes en arrivant en France. Les Turcs ont une détestation profonde des Arabes et les Arabes des Turcs. Ils ont leurs cafés, leurs lieux.

Sur fond d’immigration massive et de multiculturalisme, l’assimilation républicaine est-elle vraiment encore possible?

Oui, j’ai envie d’y croire car je ne suis pas seule, nous sommes nombreux mais très silencieux. Les voix vont commencer à s’élever. Il faut gérer et assimiler ceux qui sont déjà là – c’est tellement difficile – pour éventuellement en accueillir d’autres. Et ce sera possible grâce à l’école en revalorisant le métier d’enseignant. Cette profession n’est plus estimée à sa juste valeur. Un professeur gagne très mal sa vie, l’enseignement est mal appliqué, les conditions sont déplorables, un manque d’autorité se fait ressentir.

« Je suis français, je suis fier » devrait être la base de l’enseignement. On a laissé croire que cette formule serait fasciste

Claire Koç

Être fier de son métier et gagner un salaire en adéquation avec la charge de sa mission joue dans le rapport de force avec des enfants et des adolescents. L’école doit d’abord apprendre à être fier d’être un citoyen français. Quand j’étais petite, j’allais dans une école turque pour apprendre la langue. Mes parents souhaitaient que je reste turque dans tous les aspects de ma vie. La première chose dispensée dans cette école, c’était «je suis turque, je suis fière». Comment se fait-il que soit enseignée la fierté d’appartenance à une nation étrangère sur le territoire français? «Je suis français, je suis fier» devrait être la base de l’enseignement. On a laissé croire que cette formule serait fasciste.

Ailleurs dans le monde, l’adhésion aux valeurs du pays d’accueil ne se discute pas. Les citoyens sont attachés à leur pays. Ce qui me frappe, c’est qu’on nous affirme toujours que la France a beaucoup à apprendre ou à s’enrichir de l’étranger. C’est vrai. Mais jamais on ne nous dit que l’étranger a beaucoup à apprendre ou à s’enrichir de la France. Étonnant quand on pense à la fascination que notre pays a exercé sur le monde.

Que pensez-vous de l’influence d’Erdogan sur les ressortissants turcs qui habitent en France?

J’évoque dans mon livre le réseau tentaculaire d’ONG et d’associations turquesqui existent en France et qui ont émergé depuis qu’Erdogan est au pouvoir en Turquie, et même depuis que la Turquie est au Conseil de l’Europe. Erdogan est extrêmement populaire dans son pays parce qu’il a rendu aux Turcs leur fierté. Avant – ou en même temps – d’être un religieux, c’est un patriote. Depuis Atatürk, c’est le premier dirigeant de ce pays à se faire un nom mondialement reconnu. Ça compte et les Turcs adorent. Qui n’a pas compris ça, n’a rien compris.

Cela étant, le gouvernement turc et les ONG ont compris les bénéfices qu’ils pouvaient tirer de la communauté turque en France notamment où j’habitais, à Strasbourg où elle est importante. L’Alsace est la plus grande concentration de la communauté turque dans une même région en Europe. Les partisans d’Erdogan exercent un lobbying en infiltrant des associations, des partis politiques, en imposant des créneaux de piscine pour les femmes. Voilà le séparatisme. Le président turc se fait le chantre de l’antiterrorisme, de l’antiséparatisme dans son pays où il condamne les Kurdes du PKK. Les alévis constituent également l’une des minorités qui a été la plus persécutée.

Pour Erdogan, l’assimilation est à sens unique

Claire Koç

Erdogan voulait assimiler cette minorité et le faire par la force ne lui posait aucun problème. En revanche, quand il tient un meeting à Paris en 2010 en demandant aux ressortissants turcs de ne pas s’assimiler et en affirmant qu’ils sont les ambassadeurs de la Turquie en Europe, tout est permis. Pour lui, l’assimilation est à sens unique. Nous n’avons pas l’obligation, en tant que Turcs, de suivre le chemin sur lequel Erdogan engage la Turquie: celui de l’islamisation.

Vous êtes pour le durcissement des conditions d’obtention de la nationalité française. Existe-t-il, selon vous, un lien entre une immigration mal maîtrisée et la difficulté de s’intégrer et de s’assimiler?

Un problème fondamental auquel la France est confrontée est la présence sur son sol de certains individus qui ne se reconnaissent pas dans la culture française. Il faut en priorité s’occuper de ces individus. Ils ignorent les codes nécessaires pour devenir français. Les raisons qui les poussent à se diriger vers la France sont très souvent économiques et n’ont rien à voir avec l’amour du pays de Voltaire. Il ne s’agit pas de les blâmer, mais la France n’est pas un eldorado. Le problème est aggravé par des mouvements internes: certaines associations ou certains intellectuels militent contre l’obligation pour les nouveaux arrivants d’apprendre le français, pour rendre les conditions d’obtention de la nationalité française moins contraignantes et faire que la culture générale ne soit plus un critère déterminant.

À LIRE AUSSI :Jacques Julliard: «Immigration, sur deux fronts»

Chacun peut donc importer sa culture d’origine sans contrainte? S’il n’y a plus l’obligation d’apprendre la langue d’accueil, comment construire une nation? Dans ce cas, le sentiment d’appartenance n’existe pas. Les nouveaux arrivants qui refusent d’apprendre la culture française devraient méditer sur cette phrase d’Atatürk: «Ce n’est pas grave de ne pas savoir. Ce qui est honteux, c’est de ne pas vouloir apprendre.»

Aujourd’hui pour vous, qu’est-ce que signifie «être français»?

Aimer la France. «Il n’y a pas d’amour, que des preuves d’amour.» Mon prénom Claire, mon livre, constituent des preuves d’amour envers la France.

 
Claire, le prénom de la honte, de Claire Koç, Albin Michel, 208 p, 17,90 €.

À VOIR AUSSI – «Le problème ce n’est pas la laïcité mais l’assimilation»
 
 
 
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En Tunisie,

Publié le 5 février 2021
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 …cette jeunesse qui se détourne d’Allah

Dix ans après les printemps arabes et l’arrivée au pouvoir des islamistes, un tiers des Tunisiens se disent irréligieux. Reportage.

De notre envoyé spécial en Tunisie, Armin Arefi
Publié le 05/02/2021 à 07h00

Une demi-douzaine de bières sont disposées dans un saladier à champagne. De marque tunisienne, elles sont décapsulées à la main par trois amis venus trinquer ensemble. Il n’a beau être que 16 heures à Sousse, à l’est de Tunis, le U Bar, qui fait face à la plage, a déjà des airs de boîte de nuit. La voix grave du rappeur américain 50 Cent s’invite entre les tables où sont entassés hommes et femmes, sans masque. Covid oblige, les touristes étrangers ont délaissé la cité balnéaire, entièrement livrée à ses habitants. Mais l’alcool y coule toujours à flots. De faibles néons dévoilent au mur, enfermées derrière des grilles, des bouteilles de whisky. « Nous, les Tunisiens, sommes de grands consommateurs d’alcool », assure Habib Souissi, 52 ans, en avalant une nouvelle gorgée de Celtia, la bière locale. Jugé « haram » (« péché »), l’alcool est pourtant interdit en islam, religion officielle du pays et de la grande majorité de sa population. Mais, à l’en croire, sa consommation serait devenue la norme en Tunisie. Ancien gérant de bar à Sousse, cet homme au teint hâlé et au physique robuste se retrouve malgré lui client du U Bar en raison de la pandémie qui l’a contraint à fermer boutique. Baptisé Roll’s, son établissement, en plus de servir de l’alcool, avait déjà brisé un tabou : c’était le haut lieu de la communauté athée de Sousse.

Tabou brisé. Habib Souissi est l’un des rares à oser revendiquer publiquement son athéisme en Tunisie. « Nous, athées, avons brisé le tabou sur l’islam, qui est en train de perdre de sa sacralité », se félicite le Soussien, également engagé dans la défense des minorités sexuelles. Ses premiers doutes sur l’existence de Dieu sont apparus vers ses 16 ans, en pleine prière. « Je me suis demandé pour quelle raison il fallait invoquer son nom cinq fois par jour. Pour nous, le but était d’atteindre un jour le paradis. Mais, pour lui, que lui apportaient réellement nos supplications ? Un orgasme ? » La table éclate de rire.

En raison de son caractère subversif, aucune statistique officielle n’existe sur l’athéisme dans le monde arabe. Mais une vaste étude réalisée en 2018 et 2019 par l’Arab Barometer, réseau de recherche universitaire basé aux États-Unis, établit à 13 % le pourcentage de non-croyants dans la région, contre 8 % en 2013, un chiffre qui passe de 11 % à 18 % chez les moins de 30 ans. « Pour la première fois, il existe une vraie tendance à la non-religiosité auprès de la jeunesse arabe, souligne Michael Robbins, directeur de l’Arab Barometer. Et cela ne fera que s’accentuer au cours des prochaines générations. » Ces chiffres sont d’autant plus remarquables que la non-croyance, toujours vue comme une abomination dans le monde arabo-musulman, est parfois sanctionnée de la peine capitale. Sur les dix pays arabes sondés par l’Arab Barometer, celui qui connaît la plus forte progression est sans conteste la Tunisie, dont plus d’un tiers des 11 millions d’habitants se dit irréligieux. « Auparavant, au nom du sacré, il était impossible de parler de l’islam, confie Habib Souissi en décapsulant une nouvelle bière. Maintenant, avec Internet, de plus en plus de jeunes en discutent librement. Ils n’ont plus peur que le ciel leur tombe sur la tête. » 

 

 

Pragmatisme et discrétion. Rencontrés sur les réseaux sociaux, les deux amis assis face à lui ne croient pas non plus en Dieu. Mais eux n’osent pas le clamer haut et fort. « Une bonne partie des Tunisiens sont laïques et irréligieux, mais ils sont tous en sommeil car le dire ouvertement leur apporterait plus de problèmes que d’avantages », chuchote Rachid*, 34 ans. Cet ingénieur de Sousse a pris ses distances avec la religion en entrant à l’université. « En tant que scientifique, j’ai effectué de nombreuses recherches et j’ai remarqué beaucoup d’incohérences dans le Coran », avoue-t-il. Réfutant le terme d’athée, considéré comme une hérésie en Tunisie, l’élégant jeune homme au caban gris et aux fines lunettes noires s’autoproclame « partisan de la liberté de conscience, de penser et de critiquer la religion » : « Au moins,je fais le bien autour de moi pour faire le bien, et pas pour être récompensé après la mort. » Seul interdit à ses yeux, l’idée de s’en ouvrir à sa famille. « Il faut être pragmatique et j’ai besoin de garder des liens forts avec elle, glisse-t-il. Annoncer que je n’y crois pas m’exclurait de fait des miens, soucieux d’entrer un jour au paradis. » Ainsi préfère-t-il vivre dans une certaine hypocrisie, assumée. « En Tunisie, la meilleure façon d’accepter l’irréligiosité est de faire comme si cela n’existait pas. »

Troisième voie démocratique. Dix ans après la « révolution du jasmin », le phénomène prend une ampleur considérable dans le pays, dynamitant l’opposition classique entre islam politique et dictature militaire et suggérant l’existence d’une troisième voie démocratique pour les années à venir. D’après l’étude de l’Arab Barometer, près d’un jeune Tunisien sur deux s’avouerait ainsi non religieux. « La Tunisie est le pays le plus séculier du monde arabe, souligne Michael Robbins. C’est lié à l’histoire de ce pays, le plus ouvert de la région, mais aussi au rejet par la population de l’extrémisme religieux et de l’islam politique. » Ex-protectorat français, le plus petit pays du Maghreb a gagné son indépendance en 1956, avant de subir une vague de laïcisation à marche forcée sous la houlette du président Habib Bourguiba. Le père de l’État moderne tunisien est notamment à l’origine du Code du statut personnel, qui a accordé aux femmes, en 1957, des droits sans précédent dans le monde arabe (vote, mariage par consentement mutuel, divorce devant le juge, interdiction de la polygamie). Son successeur, Zine el-Abidine Ben Ali, s’est démarqué en réhabilitant la place de l’islam dans la société (enseignement religieux, appel public à la prière) pour mieux asseoir son pouvoir sans partage. Ce faisant, il a livré une vraie chasse aux mouvements islamistes, notamment le parti Ennahda (« Renaissance »), dont les membres ont été emprisonnés ou contraints à l’exil. Sans surprise, ces derniers ont été propulsés au pouvoir par le printemps tunisien, en tant que force du renouveau la plus organisée. Mais les années qui ont suivi ont été marquées par de nombreux attentats djihadistes qui ont ensanglanté le pays. Et l’électorat des islamistes – 1,4 million de votes en 2011 – a fondu comme neige au soleil. Lors des législatives d’octobre 2019, Ennahda, toujours première force politique du pays, n’a plus recueilli que 500 000 votes.

 

 

Tournant. Attablé dans le patio fleuri d’un bar animé du centre de Tunis, Mohammad Jandouli a tout d’abord été pris par cette vague d’islamisation du pays. Séduit en 2003 par le discours radical des prédicateurs saoudiens officiant sur les chaînes satellites, le Tunisois, alors âgé de 14 ans, se plonge dans l’étude de la religion. «Ces imams parlaient de toutes les questions de société, et même de science, en s’appuyant sur le Coran, se souvient le jeune homme de 29 ans. Partisans du port du voile, ils expliquaient que chaque cheveu d’une femme devait être protégé comme la prunelle de leurs yeux. Moi qui n’avais pas l’habitude d’entendre ce discours, j’étais émerveillé », avoue-t-il. Après avoir mémorisé par cœur le Livre saint, puis suivi les enseignements d’une école coranique, Mohammad Jandouli devient l’un des imams de la mosquée Ar-Rahma-Ashawat de Djedeida, à l’ouest de Tunis. Il n’a que 18 ans. « Les islamistes me faisaient entièrement confiance, rappelle-t-il, en avalant une gorgée de Celtia. Pour eux, j’étais le candidat idéal. » La révolution de 2011 et l’accession au pouvoir d’Ennahda changent profondément la configuration religieuse du pays. Beaucoup de djihadistes tunisiens rentrent et investissent les mosquées. Nombre de jeunes y sont embrigadés pour être envoyés en terre de djihad. Pointées du doigt, les autorités laissent tout d’abord faire. « Ces adolescents se faisaient laver le cerveau. Je les voyais porter soudainement le qamis (longue tunique traditionnelle) alors qu’ils ne connaissaient rien à la religion », se souvient Mohammad. « Quatre d’entre eux sont morts en Syrie. » Le plus gros contingent étranger de Daech, relativement à sa population, venait de Tunisie.

Liberté de penser. Cette expérience dramatique brouille l’homme de foi avec la religion. L’imam rompt officiellement avec l’islam en 2015. Il a troqué la djellaba pour un cuir et un jean délavé. Mohammad en est désormais convaincu : Dieu n’existe pas. « On peut vivre librement comme athée en Tunisie », affirme celui qui n’hésite pas à le clamer, mégaphone à la main, lors de manifestations à Tunis. « Nous sommes en train de construire une véritable communauté areligieuse, avec plus de 1 400 membres sur Facebook, mais je connais personnellement plus de 50 000 athées tunisiens », s’enthousiasme-t-il. Sa remise en cause progressive de la religion est en réalité antérieure à la révolution du jasmin : « J’ai bien étudié la vie et l’histoire de Mahomet et j’y ai trouvé beaucoup de problèmes. Par exemple, comment le prophète a pu prendre pour épouse Aïcha, une jeune fille de 6 ans ! En fait, j’ai réalisé que le Coran contenait beaucoup d’entraves à la liberté et à la vie privée que je n’avais pas le droit de questionner, sous peine d’aller en enfer. » 

Cette liberté de penser, Mohammad Jandouli l’inculque désormais dans une école maternelle qu’il a créée en 2013 après une courte formation d’enseignant. 120 enfants de 3 à 11 ans y apprennent le français, les mathématiques, le théâtre, mais aussi le Coran. « Les musulmans ne connaissent pas réellement l’islam, explique-t-il. Pour la majorité de la population tunisienne, cette religion est avant tout un héritage culturel, pas une pratique suivie à la lettre. Ils ne font en réalité ni la prière ni le ramadan. » Mohammad a failli payer cette audace de sa vie. En 2016, il est poignardé au ventre par un sympathisant islamiste échaudé par sa liberté de ton. Il en réchappe miraculeusement. Et préfère en tirer un enseignement positif : « Les islamistes ont peur lorsque je parle de cette religion, car je sais ce que je dis. Il faut que l’islam reste dans les mosquées, et ne pas le laisser en sortir. » 

 

 

Sésame. La jeune femme assise à ses côtés paraît beaucoup plus mélancolique. Vêtue d’un pull serré dévoilant les formes de son corps et maquillée à souhait, Amara* enchaîne nerveusement les bières. Cette étudiante de 23 ans mène une double vie. Femme libérée et agnostique à Tunis, elle redevient une fille pieuse et respectable auprès de sa famille, dans son village natal, près de Nabeul, à l’est de la capitale. « Cela me fait très mal. C’est un déchirement psychique que d’avoir deux visages, mais je n’ai pas le choix, lâche-t-elle. Je ne le dirai jamais à mes parents car ils ne l’accepteront jamais. » C’est à l’âge de 11 ans, lors de ses premières règles, que la jeune femme a commencé à douter de l’existence de Dieu. « Je n’arrivais plus à boire ni à manger, et je me demandais pourquoi il m’infligeait cela, explique cette brune aux longs cheveux. Ma mère me répondait que Dieu avait des problèmes bien plus importants à gérer. Or, s’il n’était même pas en mesure de régler les miens, comment pouvait-il s’occuper des autres ? » En quête de réponses, l’adolescente trouve son bonheur dans la lecture. Beaucoup de livres, dont ceux de Nawal el Saadawi, grande féministe égyptienne athée, qu’elle dévore en cachette. « Je pense que l’homme naît athée mais que sa famille lui apporte la religion sur un plat d’or, explique-t-elle en avalant une part de pizza. Mais, en réalité, ce plat n’est pas d’or, et il me faut le briser car il perturbe ma vie. Dans mon village, il n’y a aucune liberté de choix pour les femmes. C’est le système islamique qui choisit pour toi : tes habits et ton mari. »

Flagrant délit. Cette évasion prend fin le jour où Amara est prise en flagrant délit de lecture par sa tante : « J’ai été battue, se remémore-t-elle avec effroi. Ma tante a brûlé tous mes livres. Elle m’a envoyée chez le médecin pour réaliser un test de virginité, et j’ai été enfermée à la maison pendant six mois. » Esseulée face au poids des traditions, Amara échafaude alors une stratégie : le silence et l’obéissance, jusqu’au bac, qu’elle obtient en 2017. Ce diplôme lui ouvre les portes des études supérieures à Tunis. Elle possède enfin le sésame pour une nouvelle vie. Mais le double jeu se poursuit, jusqu’à aujourd’hui. « Mes parents contrôlent toujours mon Facebook, où je donne l’image d’une parfaite croyante, ce qui fait beaucoup rire mes amis athées », soupire-t-elle. Dans sa nouvelle vie, l’étudiante en langue arabe avoue faire « ce qu’elle veut » de son corps, et admet même l’existence d’un « sex friend », qui n’est « pas [son] ami », insiste-t-elle. Elle est décidée à ne plus jamais changer de quotidien : « Je ne retournerai jamais à Nabeul. » Si elle a renoncé à l’idée de convaincre ses parents, la jeune femme affirme en revanche toujours laisser la porte ouverte à Dieu. « Mais il n’a pas encore frappé », sourit-elle enfin.

 

 

Combat. Une Tunisienne a décidé de mener un combat ouvert en faveur de la liberté de conscience, quitte à en subir les conséquences. Secrétaire générale de l’Association des libres penseurs, Rahma Essid est devenue en 2018 la première femme arabe à recevoir un prix d’honneur à l’occasion des Journées de l’athéisme, organisées à Varsovie. Or cette récompense a fait de la juriste de 31 ans une cible : les menaces de mort affluent. Chaque jour, la police l’avertit des risques qui pèsent sur elle. « J’ignore si c’est pour m’aider ou pour me faire peur », confie Rahma, qui ne bénéficie d’aucune mesure de protection, malgré des faits avérés. Ainsi, une djihadiste a été envoyée chez elle en 2019 pour l’assassiner.Minorité invisible. La militante assume pleinement son choix de parler librement. « Les menaces font partie de mon quotidien et je veux continuer à vivre normalement dans mon pays », insiste-t-elle. La jeune femme nous reçoit dans un petit 2-pièces au rez-de-chaussée d’un immeuble vétuste du centre de Tunis. Elle n’y vit pas seule. Assis sur une banquette du salon, entre l’étendoir à linge et les plantes, trois autres jeunes athées et un perroquet, yeux rivés sur une série télé. « Les clichés veulent que tous les Arabes soient des musulmans, or ce n’est pas vrai, souligne Rahma Essid. Il existe en Tunisie une minorité invisible dont personne ne parle, mais il est difficile d’afficher son athéisme car la majorité des Tunisiens restent conservateurs. Ceux qui osent franchir le pas risquent d’être exclus de leur famille et de devenir sans-domicile fixe. » Ses compagnons du jour en ont fait l’amère expérience.

« Protéger le sacré ».. La Tunisoise, tailleur et jupe noire assortis, est régulièrement traitée de « mécréante » par des députés islamistes ou de simples badauds. Des accusations qu’elle rejette en bloc. « Je n’ai en réalité jamais été musulmane, déclare l’activiste aux longs cheveux. Je suis née d’un père athée qui m’a toujours parlé d’irréligion et de liberté critique. Je n’ai donc jamais changé de foi. » À la tête de son association, Rahma Essid affirme se battre pour assurer la « laïcité de l’État tunisien ». « Même si le Code du statut personnel de Bourguiba était une révolution, nous souffrons toujours de certaines lois rétro- grades en Tunisie », souligne la trentenaire, également à la tête d’un cabinet de formation dans l’entrepreneuriat. Basés sur la charia, les textes en matière d’héritage accordent deux fois moins à une Tunisienne qu’à ses frères. L’homosexualité est pénalisée. Et le droit de ne pas jeûner durant le ramadan fait toujours débat. Depuis 2014, la militante lutte pour que les cafés et les bars, visés depuis 1977 par une circulaire ordonnant leur fermeture, restent ouverts durant le mois sacré. Si la Constitution, votée en 2014, autorise la liberté de conscience, elle confère dans le même temps à l’État la mission de « protéger le sacré ». Or sans l’existence d’une Cour constitutionnelle, les anciens textes font toujours foi. « Il n’y a pas de réelle volonté politique pour que cette Cour soit mise en place, affirme Rahma. Car la situation actuelle fait le jeu des conservateurs et des islamistes au pouvoir. » Juriste lui aussi, le président tunisien, Kaïs Saïed, élu en octobre 2019, est connu pour ses positions conservatrices. À l’occasion de l’anniversaire du Code du statut personnel, en août 2020, il s’est publiquement opposé à l’égalité homme-femme en matière d’héritage en invoquant le Coran.

 

 

Première victoire. À force de manifestations et de campagnes sur les réseaux sociaux, les athées tunisiens ont remporté une première victoire en arrachant le droit de manger et de boire publiquement durant le ramadan. Les bars peuvent même continuer à servir de l’alcool en plein mois sacré. Mais le chemin vers une liberté de conscience pleine et entière est encore long. La blogueuse Emna Charki l’a appris à ses dépens. Le 14 juillet 2020, cette militante athée de 27 ans a été condamnée à six mois de prison ferme pour atteinte à la religion et incitation à la haine. Son crime : avoir partagé en mai, sur Facebook, un texte parodique sur le coronavirus, appelant à se laver les mains et à respecter la distanciation physique, qui reprenait la forme des sourates du Coran. « Ce que j’ai fait entre dans le cadre de la liberté d’expression et de croyance censée être garantie par la loi, souligne l’insoumise. Mes avocats ont eu beau l’expliquer au juge, celui-ci m’a tout de même condamnée. » Son combat attendra. Pour s’éviter un séjour derrière les barreaux, elle n’a eu d’autre choix que de quitter son pays cet été. « J’ai décidé de partir pour sauver ma vie », confie-t-elle depuis le pays européen où elle vit désormais en exil. « Je vivais dans un État où les juges sont soumis aux partis islamistes au pouvoir. » §

* Ces prénoms ont été changés.

AUGUSTIN LE GALL/HAYTHAM-REAPOUR « LE POINT » (X3) – FAUQUE NICOLAS/IMAGES DE TUNISIE/ABACA

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Haïm Korsia:

Publié le 5 février 2021
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 «La laïcité ne peut être utilisée pour fonder une société athée»

Le grand rabbin de France, qui a été auditionné cette semaine par le Sénat au sujet de la loi sur le séparatisme, met en garde contre la tentation de se défier des religions.

Par Jean-Marie Guénois
«Cette loi doit être accompagnée par un fort volet social pour dynamiser un nouveau tissage associatif de proximité», déclare Haïm Korsia, grand rabbin de France. JULIEN FAURE/Le Figaro Magazine
Quelles sont vos inquiétudes sur le projet de loi séparatisme?

Haïm KORSIA.- Avant de parler des inquiétudes, il faut dire l’enjeu de disposer d’un texte qui permettra aux acteurs publics d’agir. On constate souvent des situations inacceptables, mais nous n’avons pas les textes législatifs pour y répondre. Il est donc nécessaire de rappeler cette évidence: il nous faut des lois pour lutter contre les pulsions séparatistes de certains! J’ajoute une autre prémisse: reconnaissons et saluons le fait que l’ensemble des cultes soient associés à la préparation de cette loi. Quant aux inquiétudes, lors de mon audition au Sénat cette semaine, j’ai demandé que soit mieux précisé, dans l’article premier, le principe même de la liberté de pratique religieuse. Cela permettrait de lever une petite inquiétude issue du texte qui pourrait laisser penser que les religions seraient un facteur de déstabilisation de la République… Or, loin s’en faut: l’État sait très bien que les religions contribuent à la structuration sociale de la République. La liberté de pratique religieuse doit donc être clairement réaffirmée comme une composante de la société. Je l’affirme en effet: aucune religion en France ne cherche à revenir sur le principe de la laïcité! Seuls des opérateurs isolés surfant sur l’abandon de tant de jeunes dans les quartiers leur offrent une apparence de soutien qui est en réalité un endoctrinement.

La liberté de conscience n’est-elle pas plus importante que la liberté du culte?

Le sénateur Loïc Hervé m’a posé la même question. Je me suis permis de rappeler aux sénateurs que seul «Dieu sonde les reins et les cœurs»… La liberté de conscience est une évidence et personne de nos jours, n’interdit de croire en ce que l’on veut. Par conséquent, le cœur de la laïcité est donc bien la liberté de pratique du culte religieux. C’est elle qui doit être confirmée, car elle n’est pas seulement une question de liberté de conscience. C’est essentiel, car dans une société très sécularisée, la pratique du culte musulman surprend parfois. Même si, reconnaissons-le, chaque culte a ses pratiques et ce sont toujours les pratiques des autres qui inquiètent. La loi garantit de fait la liberté de pratique religieuse dans la limite du respect de l’ordre public, mais cette liberté de pratique est capitale: pour nous c’est la liberté de l’abattage rituel, de la circoncision, du respect du Shabbat, la liberté d’être pleinement engagé dans des parcours citoyens à l’école et de ne pas être confronté au terrible choix entre sa foi et sa citoyenneté. La pratique du judaïsme a ses spécificités, mais notre religion s’est construite sur une logique simple rappelée par une phrase du Talmud qui dit: «La loi de l’État a force de loi.» Le génie de la France est de ne jamais soumettre quelqu’un à un choix cornélien entre sa foi et la loi. Il faut donc bien intégrer la liberté de pratique religieuse dans la loi de laïcité, qui est avant tout une loi de liberté. On dispose ainsi d’un espace commun où chacune et chacun est respecté dans sa foi ou dans son absence de foi.

Pour chasser ceux qui ne veulent pas du tout jouer le jeu républicain, on en vient à voter des lois et prendre des décisions qui vont impacter tout le monde… L’intelligence des législateurs réside justement dans le fait de garder l’esprit des lois pour que les textes ne deviennent pas des entraves à la liberté.

Haïm Korsia

À ce propos, vous avez mis en garde les sénateurs sur la confusion possible entre laïcité et société athée…

Jamais la laïcité ne peut être utilisée pour fonder une société athée. Ce qui m’inquiète, sur ce point, c’est le risque de dépôts d’amendements qui iraient dans ce sens. À l’Assemblée par exemple, un amendement demandait l’interdiction de port de signe religieux pour les enfants de moins de 15 ans! Il a été fort heureusement retoqué au nom de la liberté éducative des parents et du choix des enfants. On voit bien l’intention de lutter contre un endoctrinement, mais le risque de durcissement existe. Il faut donc être vigilant pour permettre aux religions de continuer à faire société.

Vous avez également mis en garde contre un durcissement de la loi qui toucherait comme un «effet collatéral» les autres religions pourtant exemplaires en termes de laïcité…

Pour chasser ceux qui ne veulent pas du tout jouer le jeu républicain, on en vient à voter des lois et prendre des décisions qui vont impacter tout le monde… L’intelligence des législateurs réside justement dans le fait de garder l’esprit des lois pour que les textes ne deviennent pas des entraves à la liberté. Et il y a des points pour lesquels il faudrait aller plus loin et d’autres où il faut être prudent, parce qu’il ne faut pas toucher aux équilibres acquis. Le contrôle des flux financiers qui viennent de l’étranger ne me pose aucun problème, même si c’est une contrainte supplémentaire. Quant à la réaffirmation de «l’engagement républicain» pour toutes les associations qui reçoivent des fonds publics, non seulement elle ne me gêne pas, mais je l’étendrais à toutes les associations, pas seulement les cultuelles. Car toute association en France devrait travailler à l’affermissement de la République. Faut-il le dire: notre religion, le judaïsme, a toujours baigné dans un esprit et une volonté républicaine. J’ajoute enfin cette proposition du président du consistoire Joël Mergui pour rendre plus attractif le passage des associations loi 1901 à activité religieuse vers des associations cultuelles loi 1905, en augmentant la déduction fiscale des don.

Vous êtes donc globalement satisfait?

Nous sommes satisfaits de cette loi, mais nous disons attention, pour que les textes ne soient pas contraignants pour ceux qui ont toujours respecté l’esprit républicain. Mais il faut aussi que l’on soit impérativement capable de proposer quelque chose sur le terrain social. Légiférer est un signe positif, mais attention aux grandes déclarations! Il y a des territoires perdus de la République, il y a aussi des générations perdues… Comment fait-on pour que des enfants qui n’ont pas un goûter l’après-midi, qui n’ont pas de prof pour les aider à faire leurs devoirs, ne tombent pas dans les mains de ceux qui vont les instrumentaliser pour pouvoir les contrôler et les embrigader? Cette loi doit être accompagnée par un fort volet social pour dynamiser un nouveau tissage associatif de proximité.

Les autres religions ne partagent toutefois pas votre optimisme sur ce projet de loi…

Il faut entendre toutes les religions. Je comprends que la question de la scolarisation des enfants à la maison inquiète, mais personne n’a jamais dit qu’elle serait interdite! Il faut respecter la liberté et le besoin de scolarisation à domicile de certains enfants mais des cliquets de contrôles doivent être mis en place pour que les extrémistes ne dévoient pas les systèmes de liberté du pays.


» À voir aussi – Est-il déjà trop tard pour lutter contre le séparatisme islamiste?
 
 
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Ce que la philosophie vient faire dans l’islam

Publié le 5 février 2021
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Le nécessaire passage de Platon à Kant, le sociologue Lahouari Addi analyse le discours religieux musulman… 

Dans La crise du discours religieux musulman. Le nécessaire passage de Platon à Kant, le sociologue Lahouari Addi analyse le discours religieux musulman au prisme des représentations culturelles. La « crise de l’islam » est pour lui une crise de la culture musulmane, qui a exclu la philosophie de son champ d’étude dès le 12e siècle, enfermant le croyant dans ce qu’il nomme un « sacré livresque ».

Al-Mu’tazila V6  Zeruch/Deviantart

Lahouari Addi, La crise du discours religieux musulman. Le nécessaire passage de Platon à Kant, Presses universitaires de Louvain, 2019 ; Alger, éditions Frantz Fanon, 2020.

Les notes sont de la rédaction.

Nadia Agsous. Vous soutenez l’idée que le discours religieux musulman est en crise. De quelle nature est cette crise ? Quels sont les facteurs qui en sont à l’origine ?

Lahouari Addi. Ce que j’entends par discours religieux, c’est la théologie et les représentations culturelles dominantes qu’elle irrigue et qui font office de savoir auprès des gens sur la société, l’histoire, la politique, l’économie, etc. Ce discours, qui avait sa cohérence dans la société traditionnelle, est en crise parce qu’il n’aide pas à percevoir les dynamiques qui structurent la réalité historique. C’est un savoir qui favorise l’utopie et mène parfois à l’intolérance.

L’origine de la crise remonte à l’expulsion de la philosophie de la culture musulmane, vers le 12e siècle. Le contact avec l’Europe ne l’a pas provoquée, il l’a révélée. La philosophie permet non seulement d’imposer un minimum de rigueur dans l’interprétation des textes sacrés, mais elle favorise aussi l’émergence d’un savoir profane autonome de l’autorité religieuse. En comparaison avec l’Europe, où l’averroïsme1 avait trouvé refuge, la philosophie s’est développée tout en favorisant la connaissance scientifique de l’homme et de la société. Cette évolution n’a pas eu lieu dans les sociétés musulmanes, alors que les potentialités existaient. Ce problème ne concerne que les sciences humaines, car la théologie musulmane a accepté facilement les sciences de la nature comme la physique ou la chimie.

PASSER DE PLATON À KANT

N. A. Vous appelez à passer de Platon à Emmanuel Kant. Comment la philosophie de Platon a-t-elle influencé et imprégné la pensée religieuse musulmane ?

L. A. Platon a fourni aux théologiens du monothéisme, y compris musulmans, une argumentation rationnelle sur la pertinence de la révélation divine. La métaphysique de Platon est conforme à l’eschatologie2 biblique. La théologie musulmane a été encore plus fidèle au système de Platon dans la mesure où le Coran fait une séparation nette entre les mondes sensible et intelligible, à la différence du christianisme qui établit un lien humain entre le monde terrestre et le monde divin par l’intermédiaire de Jésus, fils de Dieu. Or, aujourd’hui la métaphysique de Platon ne permet pas de comprendre la réalité historique.

LA FOI EST AUSSI UN FAIT SOCIAL

N. A. Vous écrivez : « Laisser la religion aux seuls oulémas, c’est couper celle-ci de son environnement historique et de son fondement culturel et anthropologique. (…) Il faut faire accepter à l’opinion que la croyance est aussi un fait social analysé par la sociologie, l’histoire, la philosophie ». Quel impact ces trois disciplines des sciences sociales exercent-elles sur la pensée et la croyance religieuses ?

L. A. Lorsque la Nahda (Renaissance), et principalement Mohamed Abdou3 ont essayé d’impulser les sciences sociales, les autorités religieuses d’Al-Azhar s’y sont opposées. Pour les théologiens musulmans, la réflexion sur l’homme et sur la société relève de la théologie, et donc de leur monopole. C’est ce qui explique le retard du monde musulman en sciences sociales. Il n’y a pas de philosophe, d’anthropologue ou même d’historien reconnu au niveau international ; ou s’il en existe, ils enseignent dans les universités occidentales. Cette aridité intellectuelle s’explique par l’absence de la philosophie.

Avec la disparition de cette discipline, même la théologie avait perdu le niveau intellectuel qu’elle avait avec le théologien et philosophe Al-Achari (874-936) et le philosophe perse Al-Ghazali (1058-1111). Bien sûr, Al-Farabi (philosophe musulman, 872-950), Ibn Roshd (philosophe, théologien, juriste et médecin, 1126-1198) sont des penseurs médiévaux, mais leur philosophie contenait en elle-même les germes de son dépassement. C’est ce qui s’est passé en Europe où « la philosophie naturelle » a donné naissance à l’histoire, la science politique, la sociologie… Ces sciences humaines se sont emparées plus tard de la religion comme objet d’étude.

Le vécu religieux est un fait social qui échappe au domaine de la théologie. Un Émile Durkheim ou un Max Weber a plus de compétence pour parler des rapports entre le sacré et l’homme qu’un théologien. Les sciences humaines font refluer la théologie vers son domaine propre : le commentaire des textes sacrés. Concernant l’islam, l’étude de la religion et du Coran est venue des orientalistes européens avec leurs qualités épistémologiques et leurs défauts idéologiques, dont ceux mis en lumière par Edward Said.

LA RAISON OU LA RÉVÉLATION

N. A. Vous affirmez que dans les sociétés musulmanes, la théologie a étouffé la philosophie. Par quel processus cette discipline a-t-elle été écartée ? Quelles en sont les conséquences ?

L. A. Le processus a duré plusieurs siècles et a été marqué par des luttes sévères entre mu’tazila4 et philosophes d’un côté, et théologiens orthodoxes de l’autre. L’enjeu était la dialectique raison/révélation : fallait-il expliquer le Coran par la raison ou bien le lire à la lettre ? Un compromis avait été élaboré par Al-Achari, mais avec Al-Ghazali, et surtout Ibn Taymiyya (théologien et jurisconsulte musulman, 1263-1328), il a été affaibli et la philosophie délégitimée canoniquement. Les conséquences ont été terribles sur le plan culturel et scientifique. Les sciences profanes, y compris les mathématiques, ont décliné. La philosophie s’est réfugiée dans le soufisme et est devenue une méditation métaphysique et spirituelle au lieu d’être au fondement de la connaissance de l’homme et de ses rapports avec l’histoire.

SÉPARER LE RELIGIEUX DU POLITIQUE ?

N. A. De votre point de vue, l’approche de la recherche universitaire relative à l’islam est celle de la science politique et des relations internationales. Quels sont les motifs, les enjeux et les travers de cette orientation ?

L. A. L’islam ne peut pas être étudié de la même manière en France et au Maghreb. Les questionnements ne sont pas les mêmes. En Occident, l’islam est approché par certains universitaires sous l’angle de la menace contre la cohésion sociale et la paix dans le monde. Pour d’autres universitaires occidentaux, il n’est pas un danger. Dans un cas comme dans l’autre, le débat est du ressort de la science politique et des relations internationales. Les spécialistes de l’islam qu’étaient Louis Massignon, Roger Arnaldez, Jacques Berque ou Henri Corbin étaient par le passé des arabisants avec une formation d’historiens, d’anthropologues, de philosophes… La nouvelle génération est dominée par des politistes qui approchent l’islam en tant qu’acteur de la conflictualité mondiale.

Dans les pays musulmans, l’étude de l’islam ne relève pas de cette approche ; elle est plutôt motivée par d’autres questionnements, notamment la potentialité des sociétés musulmanes à se séculariser, à séparer le religieux du politique et à vivre la foi dans le respect de la liberté de conscience. Les sciences sociales, avec les différentes orientations théoriques qui les traversent, répondent à une demande cognitive qui provient de la société du chercheur. Souvent, celui-ci n’en est pas conscient.

N. A. Votre approche se démarque des études qui traitent de l’islam, puisque vous l’appréhendez par le prisme de la philosophie, de la sociologie religieuse et de l’anthropologie. Quel est l’intérêt d’adopter ce biais pour analyser la crise du discours religieux dans les sociétés musulmanes ?

L. A. Avec la mondialisation et les flux transnationaux qu’elle favorise, les relations internationales prennent le dessus sur la sociologie et l’anthropologie, dont relève le fait religieux. Si on veut analyser le vécu religieux dans les sociétés musulmanes, il faut s’inspirer des cadres méthodologiques d’Émile Durkheim, de Max Weber, de Clifford Geertz… Ces auteurs nous ont appris que les dynamiques religieuses se situent dans des cadres historiques et culturels propres aux sociétés.

« MARCHER AVEC LES PIEDS ET NON AVEC LA TÊTE »

N. A. Kant est au centre de votre ouvrage. Quel est l’apport de sa philosophie sur la pensée religieuse musulmane ?

L. A. La philosophie morale de Kant a sorti la théologie chrétienne de l’enfance. Elle lui a fait perdre l’illusion de réaliser sur terre la perfection morale de l’homme en utilisant la peur du châtiment divin. Kant a attiré l’attention sur ce qu’il a appelé « l’anthropologie pratique » qui dévoile ce que sont le bien et le mal en rapport avec la nature humaine. Kant estime que le dogmatisme des théologiens les empêche de réfléchir sur la dialectique du bien et du mal résumée dans différentes paraboles bibliques, notamment celle du péché originel. Pour se libérer des conséquences de ce péché, Kant recommande au croyant de prendre conscience de sa liberté dans le choix de faire le bien. Friedrich Nietzsche a écrit que Kant a rétabli la compréhension des valeurs bibliques. Ce n’est pas faux.

Ce débat, cette rencontre avec Kant, les musulmans ne l’ont pas eue. Le théologien musulman lit encore le Coran comme un enfant ; il croit qu’au cœur de la problématique du sacré, il y a Dieu, alors qu’il y a l’homme et sa quête de la transcendance. La philosophie de Kant approche l’idée de Dieu à partir de l’homme ; la théologie dogmatique approche l’homme à partir de l’idée de Dieu. Kant dit aux théologiens : il faut marcher avec les pieds et non avec la tête.

LA SÉCULARISATION PASSE AUSSI PAR LES FEMMES

N. A. Vous soutenez l’idée qu’un modèle musulman de sécularisation est en cours dans les sociétés musulmanes. Quels sont les éléments qui étayent votre thèse ? Comment ce phénomène se manifeste-il ?

L. A. La sécularisation des sociétés musulmanes est plus avancée que ne le disent les discours. Prenons la question de la femme. Pour le fiqh (droit religieux médiéval), la présence de jeunes femmes dans les universités à côté de jeunes hommes est illicite, interdite. Or les étudiantes représentent la moitié des effectifs des universités. Dans les administrations, l’éducation, les services hospitaliers…, les femmes sont fortement présentes. Bien sûr, il y a des résistances ou des accommodements comme le voile, mais même les islamistes ne s’opposent pas à ce qu’une femme soit médecin.

La psychologie sociale aussi a changé, comme l’atteste au Maghreb le déclin du phénomène social massif de la sainteté. L’individualisme s’est renforcé, favorisé par la vie urbaine et le salariat. Même si dans le discours, la symbolique religieuse est présente, les motivations individualistes sont plus fortes que le devoir religieux qu’imposait la société traditionnelle dans le passé.

Par ailleurs, les systèmes politiques des pays musulmans, à l’exception des monarchies, ne reposent pas sur le principe de la légitimité religieuse, même quand la Constitution proclame que l’islam est religion d’État. Cette disposition, problématique dans les pays musulmans où il y a des minorités non musulmanes, est plus une concession verbale qu’une affirmation du caractère religieux de l’Etat. Certains diront qu’elle légalise l’application de la charia (« la voie », loi islamique), confondue avec le fiqh5. Mais ce dernier est inapplicable. L’idée de passeport qui empêcherait un musulman de s’établir dans un autre pays que le sien est impensable dans le fiqh. Autre exemple, dans le fiqh, le musulman qui ne fait pas la prière est passible de la peine de mort. Il n’y a aucun pays musulman qui applique cet article, même pas l’Arabie saoudite. Le droit en vigueur dans la majorité des pays musulmans est une synthèse du fiqh et des normes juridiques européennes.

UN CONSERVATISME NON VIOLENT

N. A. Pensez-vous que le féminisme islamique est un mouvement qui s’inscrit dans la dynamique de sécularisation de la pensée musulmane ?

L. A. Avec l’apparition des femmes dans l’espace public, il fallait s’attendre à l’émergence d’un courant idéologique qui se réclame tout autant de la modernité que de l’islam. Le féminisme islamique conteste l’interprétation traditionnelle des oulémas accusés d’avoir une lecture misogyne du Coran. Une autre lecture du Coran favorable à l’égalité hommes-femmes est-elle possible ? Les féministes répondent par l’affirmative. Elles ont raison dans la mesure où toute croyance religieuse est portée par des représentations culturelles. Or, les oulémas ont une interprétation médiévale de la religion. Dans les pays musulmans, la théologie n’a pas changé depuis le 12e siècle. La tentative de réforme de Mohamed Abdou au 19e siècle a échoué. Il y a aujourd’hui des signes qui indiquent que cette réforme est politiquement et idéologiquement possible.

N. A. « L’islamisme est une idéologie religieuse mobilisatrice qui accompagne les changements profonds dans la perception sociale du sacré », écrivez-vous. Cette idéologie est généralement connue pour être conservatrice. Comment contribue-t-elle à promouvoir des changements chez les musulmans et dans la société ?

L. A. L’islamisme a pour objectif proclamé de rattraper le retard sur l’Occident en appliquant le Coran et ce qui est appelé la charia. Ceci veut dire qu’il y a une volonté de changement, une aspiration à un bien-être. Mais l’islamisme veut la modernité avec l’idée que la souveraineté appartient à Dieu, ce qui est une contradiction. Parler au nom des masses sans songer à institutionnaliser le caractère humain de la représentation politique est une contradiction qui libère une dynamique de dépassement de l’islamisme. Depuis la fin des années 1990, le discours islamiste est moins mobilisateur, en particulier dans les universités. Beaucoup d’islamistes ont cherché la modération, allant jusqu’à refuser l’appellation « islamiste », lui préférant celle de « démocrates musulmans ».

Aujourd’hui, dans le monde arabe, les principaux obstacles à l’État de droit et à la démocratie, ce sont les monarchies et les régimes militaires. Ceci ne signifie pas que les islamistes militent pour la démocratie électorale sans arrière-pensée. En tout cas, ce qui est nouveau dans le discours, c’est qu’ils ne sont plus contre la démocratie et l’alternance électorale. Il me semble que la tendance majoritaire de l’islamisme a renoncé à la violence pour devenir un courant conservateur avec lequel il faut compter dans le champ politique en cas d’élections libres.

LAHOUARI ADDI

Professeur émérite de sociologie à Sciences Po Lyon ; chercheur au laboratoire interdisciplinaire Triangle (UMR 5206). Il est l’auteur… (suite)

NADIA AGSOUS

Journaliste.

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