EXTRAITS – À la veille du débat parlementaire où il défendra son projet de loi contre les séparatismes, le ministre de l’Intérieur publie «Le Séparatisme islamiste. Un manifeste pour la laïcité» (Éditions de l’Observatoire).
Pas simplement communautaire, l’islamisme se fait militant et radical là où il se sent chez lui, sans la République et ses valeurs pour limiter son influence. Ainsi, quelques années après avoir souligné dans un précédent ouvrage, consacré à la Seine-Saint-Denis, «l’ubiquité des enseignes halal, la prégnance du port du voile, la généralisation du ramadan» (1), marqueurs de la présence importante d’une population de confession musulmane, Gilles Kepel souligne avec stupeur, dès 2014, dans l’introduction de Passion française, que «la présence du salafisme – favorisée par l’accoutrement spécifique des adeptes – est un symptôme nouveau et fulgurant. Elle exprime une rupture en valeurs avec la société française, une volonté de la subvertir moralement et juridiquement, qu’il serait illusoire de se dissimuler et qui pose des questions essentielles.» (2) […]
La contagion islamiste
Cet entrisme dans la vie sociale a souvent des répercussions dans la vie institutionnelle locale. Les élections municipales ont montré la porosité de certains élus locaux, quelle que soit leur appartenance politique, aux revendications islamistes et les dernières élections ont particulièrement mis en lumière ce phénomène. Sans jamais, évidemment, afficher la couleur – la taqiyya démocratique fonctionnant -, les thèses islamistes ou au moins celles de l’acceptation des «arrangements» ont progressé. […]
“Aujourd’hui, le risque est grand pour le pays de diluer son âme et sa cohésion”. Gérald Darmanin
Petit à petit, la contagion islamiste gangrène nos quartiers sous la férule d’élus tantôt résistants tantôt collaborateurs. L’islamisme est un cheval de Troie renfermant la bombe à fragmentation de notre société. Il est là aujourd’hui, en Europe. En France. Face à un ennemi si dangereux et si insidieux, dont on sait qu’il est bien loin de la religion du Prophète, il est normal que les pouvoirs publics prennent des mesures sans précédent. […] Aujourd’hui, le risque est grand pour le pays de diluer son âme et sa cohésion. Il est grand pour les musulmans de France de se voir happés par une idéologie qui risque de les enfermer dans un particularisme étouffant et mortifère. Le risque est grand aussi de voir le corps social se durcir dans une réaction de rejet et de stigmatisation des musulmans dans leur ensemble. Cette position est déjà celle des groupes extrémistes appartenant à l’ultradroite. La tentation pourrait gagner un public plus large déstabilisé par les effets socio-économiques de la mondialisation, travaillé depuis des années par l’idéologie anti-immigration et déçu par la faiblesse des réponses apportées par les gouvernements successifs. Il faut donc agir sur deux jambes: d’une part, casser l’imposition des références et des normes islamistes dans l’espace public ; d’autre part, réinventer une promesse de République fraternelle. […]
Réimposer la laïcité
Réimposer la laïcité, c’est un noble combat républicain. Réaffirmer ce qui fait la nation française dans ses profondeurs, une communauté unique d’individus citoyens obéissant aux mêmes lois, c’est être fidèle au génie français. Combattre sans relâche les ennemis de l’intérieur sans jamais confondre l’idéologie avec la religion, c’est vivre conformément aux valeurs de la République. L’islamisme est un séparatisme. Le plus dangereux d’entre tous car il est organisé, efficace, tenace. Les Français attendent que les gouvernants se saisissent avec vigueur de ce danger.
Sans naïveté, sans faiblesse, sans fausses pudeurs. Mais ils attendent aussi qu’ils le fassent avec la détermination calme propre aux grandes actions. Sans démagogie, sans repli sur soi, sans anathème. Il faut refuser cette facilité qui pousse ceux qui n’ont rien fait hier à demander, avec la foi des convertis, des décisions toujours plus dures. Ces résistants de la dernière heure épousent même désormais l’essentialisme et, parfois, le racialisme, déclarant l’incompatibilité entre une religion et la France. Concluant naturellement à l’expulsion des musulmans français, sans doute vers une hypothétique «Musulmanie», ils nient la nationalité, la citoyenneté, l’histoire de France. Ils sont les idiots utiles des islamistes. À l’opposé, il y a ceux qui ne voient pas le problème. Ils dénoncent des fantasmes, réfutent en bloc l’identité de notre pays. À l’intersection des luttes, ils dénoncent sans cesse une prétendue xénophobie d’État. Ils mêlent leurs voix et leur protestation aux cris et aux actes de ceux qui attaquent la France. Ils sont les complices des islamistes.
Entre ces deux extrêmes, il y a les partisans de la République. Aujourd’hui, cette dernière reprend des couleurs avec la réaffirmation de l’autorité et de la laïcité. Elle doit aussi continuer à renforcer sa politique d’intégration, cette si belle promesse d’avenir, son école et lutter contre toutes les discriminations. Une République sociale qui doit se refonder autour de la réussite et du mérite: voilà le programme républicain déjà entrepris depuis de longs mois, dont nous devons continuer à creuser le sillon malgré les crises.