Il y a un an, les images de la foule de manifestants rassemblés au pied du palais de justice de Paris avaient fait le tour des journaux télévisés. Ravivée par la mort de George Floyd aux Etats-Unis, la mobilisation contre les violences policières et le racisme en France avait poussé le président de la République à réagir . Dénonçant un « fléau » et une « une maladie qui touche toute la société », Emmanuel Macron avait appelé « à être intraitable sur ce sujet ».
Dans son rapport annuel consacré à la lutte contre le racisme, publié ce jeudi, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) dresse un état des lieux contrasté de l’année 2020, marquée par l’épidémie de Covid-19 . Pour réaliser ce bilan annuel, la CNCDH s’est appuyée sur les données du service central du renseignement territorial, rattaché à la police nationale et au ministère de l’Intérieur.
Des préjugés encore « très présents » mais qui reculent
Fortement ralentis à la faveur du premier confinement , les actes racistes ont diminué de 26 % en France par rapport à 2019. Entre 2019 et 2020, les actes à caractère racistes et xénophobes constatés ont largement diminué, passant de 1.983 faits répertoriés à 1.461 l’année dernière. Après une explosion en 2019 , les faits antisémites enregistrés ont, eux, diminué de moitié en un an.
Selon les services statistiques du ministère de l’Intérieur, les faits racistes ont diminué en 2020 par rapport en 2019 en France. – CNCDH
En parallèle, la Commission a réalisé un sondage en ligne* pour mesurer l’ancrage des préjugés racistes au sein de la société française. Si certains restent « très présents », note le rapport, ils perdent tous du terrain. Ainsi, 59 % des personnes interrogées pensent que « l’islam est une menace contre l’identité de la France », contre 62 % en 2019. 45 % des sondés pensent que « les juifs ont un rapport particulier à l’argent » (48 % en 2019) et 33 % d’entre eux estiment que « les enfants d’immigrés nés en France ne sont pas vraiment français » alors qu’ils étaient 40 % en 2019.
« Contrairement aux années précédentes et en raison du contexte sanitaire, nous n’avons pu réaliser le sondage en face-à-face pour établir l’indice de tolérance que nous mesurons depuis trente ans. Mais les résultats de ce sondage en ligne comparé à celui de 2019 montrent la même évolution : il y a un lent et continu recul des préjugés en France », précise Nonna Mayer, directrice de recherche émérite du CNRS au Centre d’études européennes et de politique comparée (CEE) de Sciences Po.
Pour la chercheuse, le renouvellement générationnel, la hausse du niveau d’études, la diversité croissante de la société française et le poids de l’Histoire participent à ce recul : « Les opinions recueillies nous renseignent sur ce qui, aux yeux des sondés, apparaît permis ou défendu, sur les normes en vigueur dans la société. Or la norme antiraciste s’est imposée dans toutes les démocraties occidentales depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, après l’Holocauste. C’est ce qui explique cette progression de la tolérance déclarée à l’égard des minorités. »