Jaeraymie est un street artist un brin provocateur. Une fois encore, il utilise ses talents de peintre pour intervenir dans un débat public. Et quel débat : la présidentielle. Il a placardé en ce mois d’avril des affiches de sa confection sur des panneaux électoraux parisiens, révèle l’AFP.
Sur ses affiches, quatre des candidats à l’élection présidentielle ont changé drastiquement de positionnement politique. Emmanuel Macron est un Gilet jaune doté d’un œil tuméfié, stigmate d’un tir de LBD 40. Marine Le Pen porte un voile après s’être convertie à l’islam. Eric Zemmour arbore une barbe semblable à celle d’un croyant musulman rigoriste, tandis que Valérie Pécresse est représentée en féministe LGBT décomplexée.
« À chaque élection, on nous fait croire à l’émergence d’un sauveur, à une nouvelle fiction politique qui nous manipule par un discours émotionnel, souvent discriminatoire et mensonger, ancré dans la peur (…) A l’approche des élections présidentielles, je veux transformer tous ces sentiments négatifs en un projet artistique positif dont le but est d’interpeller, de provoquer une réaction, une émotion, une interrogation. A ma manière, je veux être dans l’action et nourrir le débat », explique l’artiste sur le site de son projet Distorsions.
« L’idée du projet, c’est de peindre des personnes, des personnalités politiques qui stigmatisent des groupes », explique l’artiste parisien, qui a inventé une histoire pour dépeindre le parcours fictif des candidats et leur nouvelle apparence. « La représentation de Marine Le Pen en musulmane permet de poser un autre regard sur les musulmans », affirme le street artist, en précisant aussitôt qu’il ne s’agit pas de représenter « la vraie Marine Le Pen, mais une Marine Le Pen fictionnelle, qui a une autre vie et a décidé de se convertir à l’islam. Qui a découvert la foi et qui du coup a mis son travail d’avocate au service des réfugiés ».
Les commentaires abondent sur le compte Youtube de l’AFP. Il faut dire que les affiches installées par l’artiste sur de vrais panneaux électoraux, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, ont de quoi faire réagir. Les portraits de candidats sont en couleurs et ressemblent aux illustrations de certaines bandes dessinées très réalistes. Jaeraymie prend d’ailleurs un risque avec cette initiative parfaitement interdite par la loi, comme le précise Public Senat.
Les critiques font remarquer que l’artiste a uniquement détourné des affiches et portraits de candidats de droite et d’extrême droite. Mais c’est inexact puisque François Hollande a aussi les honneurs d’un portrait avec Nicolas Sarkozy. Dans un reportage réalisé par Julia Monfort, journaliste indépendante, l’artiste indique que ces choix se sont portés du côté des personnalités ayant proféré des phrases stigmatisantes. Un moyen, pour lui, « d’amener des gens à s’emparer du débat, à réfléchir, à remettre en perspective les propositions des candidats ».