Un scénariste hollywoodien n’aurait pas pu imaginer un tel destin. Et pourtant, il existe Noël Dubus. Le petit gars de Beauvais, ancien postier, aligne depuis près de vingt ans les coups tordus dans les affaires, le renseignement et même la politique. (…)
Personnage de l’ombre, Dubus, alias Noël Delarosa, alias « Monsieur Noël » est incapable de résister à l’attrait des projecteurs. Marianne le piste depuis plus d’un an. Sous le nom de « Monsieur Antoine », il se faisait alors passer pour un policier antiterroriste et venait soudainement d’apparaître dans un coin de notre enquête sur la proximité du comédien avec la « fachosphère ». Affable, blagueur, il n’a pas hésité à nous rencontrer au très chic restaurant parisien Les Jardins du Presbourg, où, accueilli comme un ministre, il donne tous ses rendez-vous d’« affaires ». Entre pâtes « alle vongole » – son péché mignon – et rasades de Chateldon, Dubus reviendra sur sa « carrière », enjolivant le vrai pour beaucoup de faux.
ESCROC, ESCROC ET DEMI
Un abord débonnaire propice à endormir jusqu’aux plus soupçonneux. Mais pas assez malin pour échapper à la justice. Condamné au moins douze fois depuis 1996 (« J’ai fait six ans ferme », confesse-t-il) pour, entre autres méfaits, « escroqueries, association de malfaiteurs ou trafic de fausse monnaie ». Selon l’occasion, le garçon se bombarde coordinateur du renseignement auprès de la Cour pénale internationale (CPI), correspondant de la DGSE, des douanes ou de l’antiterrorisme. Faux agent mais véritable indic. Son patronyme figure sur le fichier « Cristina » de la DGSI, qui recense les informations top secret relevant du terrorisme et de l’espionnage. Pour raccourcir ses séjours réguliers en prison, cet arnaqueur-né a noué des accords avec les services. Pas exactement par idéal patriotique… Comme en 2012, où il fait la connaissance de Takieddine avant de le piéger un an plus tard en lui délivrant un faux passeport diplomatique de la République dominicaine. À l’époque, mis en examen, le marchand d’armes était soupçonné d’avoir alimenté, via des rétrocommissions, une autre campagne présidentielle : celle d’Édouard Balladur, en 1995. Takieddine pensait prendre la poudre d’escampette, mais le coup tordu de Dubus le cloue au sol. Mise en détention. Merci Noël ! D’autres n’auraient pas pardonné. (…)
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À la barre du tribunal, tête baissée, mains derrière le dos tel un écolier réprimandé, à des lieues de l’assurance supposée de sa qualité de fonctionnaire international qu’il a pourtant osé décliner sous serment, Dubus ne fait pas le malin. Les assises, c’est du sérieux. Il le sait bien, en grand habitué, côté correctionnel, du Palais de Justice de Paris. Ce 10 février 2021, le procès en appel de Georges Tron pour viols et agressions sexuelles entre dans sa dernière ligne droite. Poli, voire obséquieux, Dubus répond d’une petite voix maladroite aux questions tranchantes de l’énergique présidente. Celle-ci veut savoir s’il a tenté de monnayer auprès de l’ancien secrétaire d’État un enregistrement réalisé à l’insu d’une de ses victimes par son acolyte Thomas N’Lend, alias Mathias Cardet. Déjà entendu la veille par la cour, celui-ci, lui aussi dans ses petits souliers, s’est embrouillé dans des explications fumeuses et des souvenirs parcellaires qui ont eu le don d’agacer la cour.
Ce personnage, un temps bras droit d’Alain Soral, désormais scénariste, Marianne le connaît bien. Et pour cause. Dans un article de juillet 2020, nous avions mis dans la lumière le personnage qui aurait escroqué deux producteurs de cinéma et se faisait passer – tout comme son mentor en arnaques Dubus – pour un membre de la DGSE infiltré au sein de la sphère soralienne. Recommandé pourtant par des gens sérieux, un certain « Monsieur Antoine », se présentant au téléphone comme ex-agent de la Sdat (Sous direction antiterroriste de la police judiciaire) et dont la tête avait été mise à prix par le PKK, nous avait confirmé la version rocambolesque de N’Lend. Ce qui avait notamment permis à l’apprenti scénariste d’attaquer Marianne pour diffamation. Sauf qu’à l’époque nous ignorions que Noël Dubus et « Monsieur Antoine » ne faisaient qu’une seule et même personne…