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Covid-19 : faut-il s’inquiéter de la sixième vague au Portugal ?
Le variant BA.5 est devenu dominant au Portugal en une dizaine de jours. SILVIO AVILA / AFP
La prédominance d’un nouveau variant Omicron a fait exploser le nombre de cas positifs en trois semaines au Portugal.
Alors que les Français apprécient depuis quelques semaines leurs trajets dans les transports en commun sans porter de masque, un autre pays européen se trouve menacé par une nouvelle vague d’infection au Covid-19.
Au Portugal, l’augmentation journalière du nombre de cas est importante : en trois semaines, le pays est passé de 650 à 2500 cas positifs par jour. Rapportés au nombre d’habitants, ces chiffres en font le deuxième pays au monde avec le plus grand nombre de contaminations chaque jour et laissent penser que le Portugal est déjà traversé par une sixième vague.
Des variants «petits-cousins»
Il était attendu par les autorités sanitaires portugaises mais ce basculement à quelques semaines des vacances scolaires et de l’afflux de touristes pourrait contraindre le pays à réinstaurer certaines mesures. Si le masque est toujours obligatoire dans les transports et les hôpitaux portugais, la Directrice générale de la santé portugaise, Graça Freitas, recommande désormais d’élargir le port du masque aux «milieux fermés et surpeuplés».
Cette augmentation du nombre de cas positifs est vraisemblablement liée à la prédominance des variants BA.4 et BA.5 sur le territoire. Des variants omicron qui sont les «petits-cousins» du variant BA.2, «aujourd’hui dominant à 98% en France», explique Robert Sebbag, infectiologue à l’hôpital de la pitié Salpêtrière. «Il y a quelques semaines, le Portugal aussi était largement dominé par le BA.2. En une dizaine de jours, c’est le BA.5 qui a pris le dessus»,constate le spécialiste.
Ce scénario est-il forcément amené à se reproduire en France ? S’il souhaite «rester prudent» sur la question, Robert Sebbag estime qu’on «devrait y avoir droit». D’abord, parce qu’«avec les virus, les frontières n’existent pas». Mais surtout parce que le variant BA.5 est «nettement plus contagieux» que les variants précédents.
«L’augmentation en proportion répétée dans différents pays, comme au Portugal et en Afrique du Sud, indique que ce variant se propage mieux que les précédents», explique Florence Débarre, chercheuse en biologie évolutive au CNRS. Et si le variant BA.5 se propage davantage, il «présente également une mutation précédemment identifiée comme permettant de contourner les défenses immunitaires des personnes infectées», pointe la spécialiste. En d’autres termes, ce variant risque davantage de réinfecter les personnes infectées précédemment, ou celles ayant des anticorps grâce au vaccin.
Malgré tout, Florence Débarre estime qu’il y a «moins de raisons d’être inquiets», comparé aux prémices de la vague Omicron l’hiver dernier. Le 20 avril, l’analyse de risque de Santé publique France ne recensait que 3 cas concernés par ces variants. Un mois après, l’analyse de risque fait état de 11 cas confirmés de BA. 4 et 36 cas confirmés de BA.5. «La proportion de BA.4 et BA.5 est toujours faible mais en légère augmentation : 0,3% pour BA.4 et 0,5% pour BA.5», développe l’analyse. «À ce rythme, il nous faudrait environ un mois pour que ce variant devienne majoritaire», commente la chercheuse.
Vaccin nouvelle génération
Une augmentation progressive qui, sans nous inquiéter, devrait selon Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches, conduire à revenir sur certaines mesures. «Avec l’arrêt de l’obligation du port du masque dans l’espace aérien européen, tous les éléments sont réunis pour que le variant se propage plus rapidement en France», estime-t-il.
Autre point sur lequel la prédominance de ce variant au Portugal devrait faire réfléchir : la nécessité de faire évoluer les vaccins. «Même si la situation semble s’être améliorée, il ne faut surtout pas perdre de temps», alerte Benjamin Davido, soulignant notamment qu’une grande partie de la population portugaise – dont les enfants – est vaccinée.
«Ce nouveau variant nous montre bien qu’aucune immunité n’est éternelle, poursuit-il. Le vaccin que nous proposons aujourd’hui n’est plus adapté à ces nouvelles souches, il ne suffira pas à protéger les personnes les plus fragiles en cas de nouvelle vague.» «Les variants BA.4 et BA.5 nous rappellent donc qu’il est indispensable de chercher un vaccin de nouvelle génération»,conclut l’infectiologue.
Par Jeanne Paturaud www.lefigaro.fr