L’avocate pointe notamment l’« erreur grave et manifeste d’appréciation » commise par le renseignement territorial. Dans une note révélée par le quotidien Libération, le service assurait que rien ne laissait présager le passage à l’acte d’Abdoullakh Anzorov, jeune citoyen russe d’origine tchétchène qui a décapité le professeur.
Toutes ces alertes ont été lancées et on en est quand même arrivé là
« On ne peut pas arriver à cette conclusion : tous les marqueurs étaient au rouge », fulmine aujourd’hui Me Virginie Le Roy. Cette dernière rappelle que la principale du collège, elle, était bien consciente du danger encouru par Samuel Paty. Et pour cause, Abdelhakim S., un militant islamiste fiché « S », gravite dans cette affaire. La principale a d’ailleurs alerté le renseignement territorial, à l’instar du rectorat, précise l’avocate au Monde. « Toutes ces alertes ont été lancées et on en est quand même arrivé là, c’est ça qui est terrible », poursuit-elle.Me Virginie Le Roy rappelle également que les premières vidéos inquiétantes du parent d’élève Brahim C. circulent à partir du 10 octobre sur Internet et sont abondamment relayées. « Le 12 octobre, le renseignement territorial conclut que le père n’est pas suivi ni relayé sur les réseaux sociaux et qu’Abdelhakim S. n’est pas un imam, qu’il n’a que peu d’écoute. C’est une grave erreur d’analyse », s’étrangle l’avocate dans les colonnes du quotidien national. Cette affaire intervient de surcroît dans un contexte de regain de la menace terroriste causé par la republication des caricatures de Charlie Hebdo. Al-Qaïda a exhorté au mois de septembre ses affidés à passer à l’acte.
« Samuel Paty n’aurait pas dû mourir »
Autre erreur de la note du renseignement territorial pointée par l’avocate : la considération que les choses se calment lors de la deuxième semaine. Pourtant, Samuel Paty explique à ses collègues le dimanche soir se sentir menacé. Très inquiète, la principale décide de porter plainte le 13 décembre, trois jours avant le passage à l’acte du terroriste, après la réception de messages de menaces. De son côté, Brahim C. ne relâche pas la pression et exige avec véhémence la radiation du professeur. Pour l’avocate, « le fait de conclure le rapport en expliquant qu’il y avait une tendance à l’apaisement et que de ce fait il ne pouvait pas être présagé d’une attaque physique et au surplus terroriste contre Samuel Paty est soit une erreur d’appréciation gravissime, soit un artifice ». Virginie Le Roy pense que cette posture permet aux autorités de fermer des portes qui « peuvent être très dérangeantes ». Pourtant, elle en est sûre : « Samuel Paty n’aurait pas dû mourir. »