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La voie pour respecter la loi de Dieu.
Tout est affaire d’interprétation.
En arabe, le terme « charia » signifie « voie », « chemin ». Dans un contexte religieux, il désigne “le chemin, la voie d’accès pour respecter la loi de Dieu”. La charia est ainsi une sorte de code de conduite islamique, qui fixe aux musulmans un ensemble de règles interdites ou sanctions. Elle est la « loi islamique », mais dans un sens plus général : elle régit “l’ensemble des droits et des devoirs tant individuels que collectifs des musulmans”.
L’Ange Gabriel annonce sa mission au Prophète Mohamed en l’an 632. Miniature, XVIIIè Musée de Topkapi.
Un grand nombre d’aspects de la vie d’un musulman sont dictés par la charia : Les règles alimentaires, la tenue vestimentaire, les transactions financières, le droit de la famille, l’héritage, les infractions pénales, les affaires judiciaires.
La charia représente, dans l’islam, diverses normes et règles doctrinales, sociales, culturelles et relationnelles édictées par la révélation. Le terme utilisé en arabe, dans le contexte religieux, signifie «chemin pour respecter la loi [de Dieu]». Il est d’usage de désigner, en Occident, la charia par le terme de loi islamique, qui est une traduction approximative puisque n’englobant que partiellement le véritable sens du mot (ce terme est d’ailleurs utilisé en place de droit musulman). La charia codifie à la fois les aspects publics et privés de la vie d’un musulman ainsi que les interactions sociales. Les musulmans considèrent cet ensemble de normes comme l’émanation de la volonté de Dieu (Shar). Le niveau, l’intensité et l’étendue du pouvoir normatif de la charia varient considérablement sur les plans historiques et géographiques.
Dans le monde, certaines de ces normes sont considérées incompatibles avec les droits de l’homme, notamment en ce qui concerne la liberté d’expression, la liberté de croyance, la liberté sexuelle et la liberté des femmes.
Tout est affaire d’interprétation : Le problème, c’est que la charia n’est pas formellement codifiée dans un texte. Sur les 6 236 versets que compte le Coran, seuls 80 sont assez précis pour fonder des règles pratiques. Le Coran ne mentionne d’ailleurs qu’une seule fois le terme exact de « charia » :
« Nous t’avons mis sur une voie (charia) selon un ordre ; suis-la, et ne suis pas les passions désordonnées de ceux qui ne savent pas. » (sourate 45, verset 18)
La carte des différends pays soumis à la charia (la loi islamique). Cependant la référence à cette dernière, dans le monde arabe, varie d’un pays à l’autre.
Le contenu de la charia est donc affaire d’interprétation. À partir du Coran et de la Sunna (guide de comportement tiré de la vie du prophète Mahomet), ce sont des juristes musulmans qui sont chargés de tirer les règles précises découlant de la charia.
La diversité des interprétations possibles explique que, selon les États, la charia soit appliquée avec plus ou moins de rigueur.
Au Soudan et en Arabie Saoudite, la charia est un code très restrictif qui autorise certains châtiments traditionnels (lapidation, flagellation, amputation). Dans d’autres pays, comme en Égypte, la charia impose simplement de suivre des principes religieux généraux.
Un État peut donc très bien revendiquer la charia comme référence suprême et avoir une législation progressiste.
Elle est une revendication idéologique avant tout. Dans la plupart des pays musulmans, le droit est, certes, influencé par la religion mais le modèle juridique est souvent d’inspiration européenne (codification, procédures, organisation des tribunaux…). Reconnaître officiellement la charia ne signifie donc pas que ces règles soient les seules applicables, ni qu’elles soient prioritaires.
En réalité, la charia est davantage utilisée de nos jours comme un marqueur idéologique que comme une législation à proprement parler. Certains États entendent, grâce à elle, revendiquer leur héritage musulman sans forcément en assumer toutes les déclinaisons pratiques.
Pour aller un peu plus loin, à l’intention des chercheurs…
Dans tout le Coran, qui compte 6 236 versets et 77 439 mots, le mot charia n’est mentionné qu’une seule fois dans un seul verset (l’Agenouillée 45/18).
Selon la tradition islamique, la charia a été révélée sur une période de 23 ans, correspondant à la durée de la prophétie. Considérée comme étant l’ensemble des normes, la charia est une voie immuable. À l’intérieur de cette voie se trouve le fiqh, qui est une matière en constante évolution.
Foudil Benabadji avec Dalil Boubakeur.
La charia naît d’un processus long de mise en place prenant place sous le gouvernement des omeyyades et des abbassides. Jusqu’au milieu du VIIIe siècle, le terme charia n’a pas encore son sens actuel et n’est employé que très rarement pour désigner certaines injonctions contenues dans le Coran. Le Coran contient potentiellement toute la loi divine, mais pas de manière explicite, ni factuelle. Un processus graduel a donc permis de codifier cette loi dans une forme exotérique qui soit applicable à tous les domaines de la vie d’un musulman.
Pour les sunnites, les principes de la loi divine contenus dans le Coran ont été expliqués dans les hadiths de la sunna, qui forment ensemble la deuxième source primaire de la loi. Ces sources (Usul al-Fiqh) ont, par la suite, été acceptées et comprises par consensus (ijma) dans la société islamique de l’époque. Enfin, le raisonnement par analogie (qiyas) a permis de compléter cette loi lorsque cela était nécessaire.
Le Coran et les hadiths sont les deux sources les plus importantes, acceptées par l’ensemble de la communauté musulmane (oumma). L’ijma et le qiyas ne sont pas reconnues par les chiites, et les différentes écoles (madhhab) divergent quant à l’utilisation du qiyas.
À ces sources s’ajoutent plusieurs autres secondaires, comme l’opinion personnelle (le ray’), l’ijtihad (transformé en Djihad ‘sic’, est l’effort de réflexion personnelle basée sur les principes généraux de l’islam.) ou la coutume (ma’rouf ou ‘âdah). C’est ainsi que des coutumes préislamiques ont été intégrées dans la loi musulmane.
Elle évolue en fonction des changements de conjonctures diplomatiques et sociologiques, et n’est pas à envisager comme un système contraint à la stagnation.
Observations :
Le wahabisme, secte salafiste a réussi, depuis trente ans) à coup de centaines de millions de pétrodollars à s’imposer et propager sa vision d’un islam intégriste et puritain. Pour mémoire : Oussama Ben Laden, était un pur produit du wahhabisme.
De nombreux pays arabes se sont inspirés de la loi islamique pour rédiger leur Constitution. D’une interprétation restrictive à une interprétation évolutive, la charia influence les lois de manières diverses et varie d’un pays à l’autre. Au nom de la loi islamique, on peut par exemple imposer le voile (en Iran), voire la burqa (sous l’Afghanistan des talibans), un héritage inégal entre garçons et filles (à l’avantage des hommes), des interdits alimentaires ou comportementales. Souvent la place de la femme dans la société est ce que l’on retient le plus. La polygamie et la répudiation sont encore autorisées dans de nombreux pays arabes.
L’Arabie Saoudite, les pays du Golfe, l’Iran notamment en font la source principale du droit. L’Egypte en a fait sa principale source de législation qu’en 1980. Ainsi, la répudiation existe par exemple toujours en Egypte mais est encadrée comme l’est la polygamie que la Syrie autorise aussi. Le prêt à intérêt est interdit en Egypte.
La plupart des autres pays en font mention dans leur Constitution mais n’est que l’une des sources parmi d’autres. La Tunisie et le Maroc font exception mais ont inscrit l’islam comme religion de l’Etat. En Turquie, si le parti au pouvoir est islamo-conservateur, le pays n’a pas l’intention d’inscrire la charia dans la Constitution et est complètement exclue du domaine judiciaire.
Influencés par les pays d’Occident, les pays arabes ont pour beaucoup, entrepris des réformes de leurs principaux codes, comme sous la Tunisie de Bourguiba. En fait, la législation ensuite votée dans les Parlements est obligée de tenir compte de l’évolution de la société
En Arabie Saoudite, la Mutawa, police religieuse assure l’application de la charia en veillant au respect de l’ordre en matière de prière, de jeûne, d’abstinence ou de stricte séparation des sexes.
En Algérie, la Constitution est un mélange de droit yougoslave et français respectant les valeurs de l’Islam, les références à la charia sont quasi-inexistantes.