Le chantier de la future mosquée, dont la construction a déjà englouti 2,3 millions d’euros depuis 2016, avance au ralenti et les dons des fidèles se raréfient à mesure que le doute grandit sur leur destination. Le président de l’association, Mohamed Briwa, était donc ravi d’annoncer fin août que le Royaume du Maroc acceptait de financer les 4,5 millions d’euros manquants, en échange d’un transfert de propriété.
Un casse-tête
C’était sans compter sur la fronde des anciens que cette cession révulse. Ils estiment de leur côté qu’un million d’euros suffirait pour terminer l’édifice et s’inquiètent de perdre le contrôle de la mosquée dont ils rêvent depuis quarante ans. « Avant de construire des murs, il faut construire des cœurs pour un islam modéré, avec un vrai imam qui dialogue en français. Sinon, les jeunes, ils vont voir sur Google et ils tombent sur des prédicateurs daechiens », prévient Salah Achbani. « Cette cession, c’est du gagnant-gagnant, une occasion unique pour les musulmans d’Angers », répond Mokhtar Hédia, le porte-parole de l’association. « Le Maroc n’est pas un pays fantôme, le royaume entretient d’étroites relations avec la France et respecte la laïcité. Et puis, là où il intervient, il n’y a plus de querelles », ajoute Mohamed Briwa.
En ce jour de prière, les fidèles ont posé leur tapis où ils peuvent : la salle actuelle est bien trop petite pour les accueillir. Certains sont à genoux sur les pelouses, d’autres sur le parking, même le centre culturel attenant sert de salle de prière provisoire. Une télévision y diffuse en direct le prêche de l’imam, qui salue la mémoire de Samuel Paty, le professeur d’histoire-géographie assassiné une semaine plus tôt par un fanatique islamiste. « On est entre 1 500 et 1 700 pour la prière du vendredi, il y a urgence. Dans toutes les villes, vous trouvez de belles mosquées. Ici, ça traîne, ça traîne, tout ça pour des querelles de personnes », tacle Mohamed Briwa.
Pour les élus d’Angers, cette situation est un casse-tête, mais ils ont trouvé une parade : ils contrôlent la zone où la nouvelle mosquée est en construction et peuvent refuser toute cession tant que l’édifice n’est pas achevé. Ils devraient se prononcer publiquement lundi soir, lors d’un conseil municipal. Et il ne fait guère de doute qu’ils aimeraient gagner un peu de temps pour faire tomber la pression.