Cette loi a notamment pour objectif de renforcer la neutralité et la laïcité des services publics. Elle vise également à s’assurer que les associations percevant des subventions respectent bien les principes républicains, mais aussi à contrôler davantage l’enseignement à domicile, ou bien encore à encadrer les constructions de lieux de culte, lutter contre les mariages forcés et les discours de haine et illicites en ligne.
Plusieurs de ces mesures concernent donc directement les collectivités territoriales.
Les principes de laïcité et de neutralité
Ces principes doivent être respectés dans les services publics, par les agents, les élus, et les associations percevant des subventions.
En matière de service public
La loi prévoit que l’organisme en charge de l’exécution d’un service public, qu ’il soit public ou privé, est tenu d’assurer l’égalité des usagers devant ce service, et de veiller “…. à ce que les personnes sur lesquelles il exerce une autorité hiérarchique ou un pouvoir de direction s’abstiennent notamment de manifester leurs opinions politiques ou religieuses, traitent de façon égale toutes les personnes et respectent leur liberté de conscience et leur dignité…. ».
A noter, que le juge peut suspendre, sur déféré préfectoral, un acte pris par une collectivité qui est de nature à “porter gravement atteinte aux principes de laïcité et neutralité des services publics“. .
Impact sur la commande publique
Cette obligation s’applique également au titulaire d’un contrat de la commande publique qui a pour objet l’exécution d’un service public, ainsi qu’aux sous-traitants. Le titulaire du contrat est ainsi tenu d’assurer l’égalité des usagers devant le service public et de veiller au respect des principes de laïcité et de neutralité du service public.
Les clauses du contrat doivent rappeler ces obligations et préciser “…les modalités de contrôle et de sanction du cocontractant lorsque celui-ci n’a pas pris les mesures adaptées pour les mettre en œuvre et faire cesser les manquements constatés“.
Les contrats de la commande publique pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis de publicité envoyé à la publication à compter du 25 août dernier, sont concernés par ces dispositions.
Concernant les agents publics et les élus
La loi complète le troisième alinéa de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, en précisant que ces derniers doivent être formés au principe de laïcité.
Pour les policiers municipaux, la loi prévoit que préalablement à la prise de fonction, tout agent doit déclarer « solennellement servir avec dignité et loyauté la république, ses principes de liberté, d’égalité et de fraternité, sa Constitution, par une prestation de serment ».
De plus, afin de protéger les agents publics dans l’exercice de leur mission le texte prévoit de punir “…de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait d’user de menaces ou de violences ou de commettre tout autre acte d’intimidation à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public”.
Pour les élus la loi complète l’article L.2122-34-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) en précisant que le maire ainsi que les adjoints et les membres du conseil municipal agissant par délégation du maire, pour les attributions qu’ils exercent au nom de l’Etat, sont également tenus à l’obligation de neutralité et au respect du principe de laïcité.
Référent laïcité
Pour accompagner la mise en œuvre du respect des principes républicains, la loi prévoit que les administrations de l’Etat mais aussi les collectivités territoriales désignent un référent laïcité.
Ce référent est chargé :
- d’apporter tout conseil utile au respect du principe de laïcité à tout fonctionnaire ou chef de service qui le consulte.
- d’organiser une journée de la laïcité le 9 décembre de chaque année.
Les missions, les modalités et les critères de désignation de ces référents seront déterminés par décret en Conseil d’Etat.
Concernant les associations
La loi mentionne que celles qui sollicitent l’octroi d’une subvention auprès d’une autorité administrative ou d’un organisme chargé de la gestion d’un service public industriel et commercial (SPIC), doivent s’engager, par la souscription d’un contrat d’engagement républicain à :
“- respecter les principes de liberté, d’égalité, de fraternité et de dignité de la personne humaine, ainsi que les symboles de la République au sens de l’article 2 de la Constitution ;
– ne pas remettre en cause le caractère laïque de la République ;
– s’abstenir de toute action portant atteinte à l’ordre public”.
Dispositions relatives à l’instruction en famille
L’instruction en famille, dispensée par les parents, par l’un d’entre eux ou par toute personne de leur choix, est accordée pour les raisons suivantes :
– “L’état de santé de l’enfant ou son handicap ;
– La pratique d’activités sportives ou artistiques intensives ;
– L’itinérance de la famille en France ou l’éloignement géographique de tout établissement scolaire public ;
– L’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif“.
Cette instruction en famille qui nécessitait au préalable qu’une déclaration préalable des parents est désormais soumise à autorisation préalable de l’Etat. A noter que cette autorisation “… est accordée de plein droit, pour les années scolaires 2022-2023 et 2023-2024, aux enfants régulièrement instruits dans la famille au cours de l’année scolaire 2021-2022….”.
Ces dispositions figurent dans l’article 49 de la loi et entreront en vigueur à la rentrée scolaire 2022.
A noter, qu’en matière d’instruction, la loi prévoit qu’un identifiant national sera attribué à chaque enfant soumis à l’obligation d’instruction « afin notamment de renforcer le suivi de l’obligation d’instruction par le maire et l’autorité de l’Etat compétente en matière d’éducation et de s’assurer ainsi qu’aucun enfant n’est privé de son droit à l’instruction » (article L.131-6-1 du code de l’éducation).
Parmi les Autres mesures
Mariages
Afin de lutter contre les mariages forcés, la loi complète notamment l’article 63 du code civil relatif aux actes de mariage. Les nouvelles dispositions prévoient ainsi qu’avant la célébration du mariage l’officier de l’état civil peut “...demander à s’entretenir individuellement avec chacun des futurs époux lorsqu’il a des raisons de craindre, au vu des pièces fournies par ceux-ci, des éléments recueillis au cours de leur audition commune ou des éléments circonstanciés extérieurs reçus, dès lors qu’ils ne sont pas anonymes, que le mariage envisagé soit susceptible d’être annulé…”.
Lieux de cultes
Des mesures sont notamment prises concernant les locaux accueillant ces lieux.
La loi prévoit ainsi que lorsqu’une collectivité a l’intention de conclure un bail ayant pour objet l’affectation à une association cultuelle d’un édifice du culte ouvert au public, elle doit en informer le préfet trois mois au moins avant la conclusion de ce bail.
Le préfet doit également être informé dans ces mêmes délais, de la décision d’une commune ou d’un département de garantir les emprunts contractés par les associations cultuelles pour financer la construction “…d’édifices répondant à des besoins collectifs de caractère religieux….”.
Pour la délivrance de permis de construire en vue de la réalisation d’une construction et d’installations destinées à l’exercice d’un culte, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) doit recueillir l’avis du préfet du département.
Enfin, il est à noter que le texte complète la loi de 1905 relative à la séparation de l’église et de l’Etat, par un article 19-2 dont le III mentionne que ces associations “…ne peuvent, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l’Etat ni des collectivités territoriales ou de leurs groupements...”. En revanche ce nouvel article précise que “..ne sont pas considérées comme subventions les sommes allouées pour réparations ainsi que pour travaux d’accessibilité aux édifices affectés au culte public, qu’ils soient ou non classés monuments historiques.”
Lutte contre les discours de haine et les contenus illicites en ligne
Afin de protéger toute personne contre la diffusion ou la transmission des informations relatives à sa vie privée, familiale ou professionnelle susceptibles de l’exposer à un risque direct d’atteinte à sa personne ou à ses biens, la loi prévoit de sanctionner ces faits par une peine d’emprisonnement de trois ans et de 45 000 euros d’amende.
La peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amendes, notamment lorsque les faits sont commis à l’égard d’une personne dépositaire de l’autorité publique chargée d’une mission de service public ou du titulaire d’un mandat électif.