Slim Ben Achour : D’abord, je les entends, je les écoute. Vous avez raison, le droit est de leur côté. Mais il y a des normes sociales qui ne sont pas juridiques, qui agissent et qui, très souvent, impressionnent les personnes discriminées et qui les convainquent de ne rien faire.
Je leur dirais tout d’abord de considérer qu’elles ne sont pas seules, parce que la discrimination, même si elle est souvent vécue de façon intime, touche très souvent des semblables. Vous avez fait référence aux critères de discrimination et ces critères, en réalité, se répondent les uns aux autres parce que les personnes qui discriminent, en général, discriminent un peu dans tous les sens. Je dirais donc dans un premier temps « Vous n’êtes pas seul ».
Deuxièmement, je leur dirais de trouver une oreille, de trouver quelqu’un qui puisse les entendre et qui puisse, peut-être à l’occasion d’une affaire, régler l’affaire d’une part, mais régler aussi ce problème qui se pose pour d’autres personnes. Voilà, ça, c’est un conseil individuel, mais en réalité, la lutte contre les discriminations nous concerne tous. On doit donc être très vigilants et très attentifs à la demande d’égalité. Et on doit être aussi attentifs à ne pas discriminer. On doit faire très attention à sa position sociale, à ce qu’on peut représenter, et à ce qu’on peut faire en direction des autres.
Et puis, vous avez un acteur qui est incontournable aujourd’hui, qui a gagné une légitimité très forte en un temps réduit, probablement lié à la problématique que vous abordez aujourd’hui, c’est le Défenseur des droits, qui a un numéro d’ailleurs, le 39 28. S’il y a des observations devant les juges, c’est parce que vous avez des personnes qui décident de contester, et si cette contestation ne se règle pas soit dans l’entreprise, soit dans le logement, quel que soit le champ social, on peut toujours saisir le juge qui s’appuie très souvent sur les positions du Défenseur des droits pour statuer. On va donc souhaiter le meilleur à la nouvelle Défenseure des droits (Claire Hédon, arrivée au poste en juillet 2020, ndlr).
C’est vrai que c’est compliqué de ne pas renoncer, de préserver le statu quo parce qu’on se dit toujours qu’il peut y avoir pire. Mais il est clair que la solution est dans la lutte.
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Pierre Henry est le président de l’association France Fraternités, à l’initiative de la série « Les mots piégés du débat républicain », disponible également en podcast sur Beur FM.