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Auteur : Foudil Benabadji
Membre du comité directeur de la Fraternité d’Abraham
A fait sa carrière à la protection Judiciaire de la Jeunesse, Diplômé de l’École Nationale de la Santé Publique, de l’École des Hautes Études des Pratiques sociales, Licencié en Sciences de l’Éducation, Président-fondateur de l’Union des Enfants d’Abraham, administrateur à la Conférence Mondiale des Religions pour la Paix, il se consacre au rapprochement des religions, 1er prix, ex-aequo André Chouraqui, Palme d’Or du Bénévolat et Chevalier de la Légion d’Honneur, fondateur du site : www.education-citoyenneteetderives.fr
Dès 2011, la violence djihadiste s’est installée en Europe, mais aussi en France. Depuis trois décennies, l’Islam ne cesse, hélas, de défrayer la chronique sur notre continent. Comment en est-on arrivé à cette négation des valeurs fondamentales de l’Islam qui altère et attaque la République française ? Une partie, heureusement minoritaire, de la communauté d’origine maghrébine de notre pays, s’est laissé séduire par des sirènes islamistes venues le plus souvent du Proche-Orient arabe et du Pakistan.
Le rôle joué dans cette évolution par des imams autoproclamés est grand. Leurs interventions ne sont pas neutres. Rappelons-nous les assassinats qui ont causé 273 victimes en France, avec l’électrochoc récent de l’assassinat de Samuel Paty.
Ces derniers mois, les échanges entre le Conseil national du culte musulman (CFCM), et le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin, seraient en « nette diminution ». En cause, le refus de certaines fédérations musulmanes de signer la Charte des principes pour l’Islam de France, demandée par le Président de la République, le 18 janvier 2021. L’instance, que Gérald Darmanin qualifie de « représentation de l’Islam consulaire[1] », serait morte. Créé en 2003 par le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy pour représenter les musulmans de France, le CFCM n’existerait plus pour les pouvoirs publics, il ne serait plus l’interlocuteur de la République dès lors que l’on veut mettre fin aux imams venus du Maghreb, de Turquie, etc., et aussi clarifier la situation en exigeant une reconnaissance sincère par toutes les composantes de l’islam en France des valeurs fondamentales de la République.
Devant les représentants des cultes, le Président de la République intronise donc le Forum de l’Islam de France (Forif), comme nouvel interlocuteur de l’exécutif français. Il s’agit d’une forme de représentation de l’Islam fondée sur les acteurs départementaux. En optant pour le Forif, l’exécutif français veut jouer la carte des acteurs de terrain.
Une nouvelle voie semble donc être recherchée par le gouvernement, peut-être inspirée par la Deutsche Islam Konferenz, la DIK, la Conférence allemande sur l’Islam.
Le Forif a pour ambition de faire avancer des dossiers urgents comme la formation et le statut des cadres religieux (imams et aumôniers), au point mort depuis des années en raison des dissensions entre les huit fédérations musulmanes constituant le CFCM.
Un groupe de travail s’est constitué à l’initiative des préfectures, sur l’application de la loi dite « séparatisme ». Il se propose de se transformer en « un groupe de contact » entre les pouvoirs publics et les associations cultuelles, avec pour mission d’accompagner et de former ces dernières « vis-à-vis de leurs nouvelles obligations et possibilités créées par la loi ».
Voici bientôt vingt ans que la formation des imams de France devrait faire l’objet de toute l’attention des pouvoirs publics « C’est particulièrement vrai pour les aumôniers que l’Etat rémunère dans les hôpitaux », nous dit Didier Leschi, ancien chef du bureau central des cultes au ministère de l’intérieur de 2004 à 2008. C’est dans la perspective d’aider tous les fidèles que cette formation devrait être réalisée. « Certes ils guident la prière, mais ils sont aussi des conseillers dans la vie sociale. Comme les ministres des autres cultes, on leur demande d’être rassurants, de pouvoir parler à leurs fidèles et à l’ensemble de la société ». Il s’agit, avant tout, de pouvoir disposer d’imams, d’aumôniers, qui soient en phase avec les milieux dans lesquels ils sont appelés à intervenir, notamment dans les prisons, les hôpitaux mais aussi dans les quartiers et les cités vis-à-vis de la jeune génération.
Alors, quel avenir pour ce “Forum de l’Islam de France“ qui prendrait le relais des ATIF, les Assises territoriales de l’Islam de France, visant à contourner la paralysie totale dans laquelle est plongé depuis un an le CFCM ?. Ne nous leurrons pas : former des imams en France, supprimer le système de l’“imam consulaire “nécessitera de mobiliser des moyens financiers (privés ? publics ?) – ce qui ne semble pas être à l’ordre du jour du Forif – et de renouveler en profondeur la façon dont est appliquée notre laïcité, sans revenir sur ses principes fondateurs : liberté de conscience, liberté d’expression religieuse, neutralité de l’État, égalité de traitement des différentes religions et convictions.
Les musulmans doivent être responsables, choisir une forme de représentation capable de répondre à leurs attentes, celle d’un nouveau mode de représentation du culte musulman émanant des départements, en créant des moyens nouveaux de financement par une large participation des fidèles ? s et le respect de la laïcité, telle qu’elle a été fondée en 1789 et 1905.
Est-ce un objectif réaliste ou, dans l’histoire mouvementée de l’islam de France et celle non moins mouvementée de ses relations avec les pouvoirs publics, ne sera-ce qu’un vœu pieux ? L’avenir nous le dira.
[1] Cette organisation, naguère tolérée, voire encouragée, par l’administration française, permet à des imams d’exercer leur ministère en France tout en étant recrutés, formés et rémunérés par les administrations cultuelles de pays étrangers, essentiellement l’Algérie, le Maroc et la Turquie.