Le chef de l’Etat français Emmanuel Macron en présence du Premier ministre Jean Castex et du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, a rencontré hier mercredi les autorités religieuses du pays à l’Élysée. Devant les représentants des cultes, catholique, protestant, orthodoxe, juif, musulman, bouddhiste, il a prononcé une allocution au cours de laquelle, il a noté, malgré une baisse de 17 %, les actes antireligieux (injures, vandalisme, profanations, etc.), recensés au nombre de 1380 entre janvier et octobre 2021.
Aussi a-t-il prêché, la vigilance face à ces actes, ainsi qu’aux discours de haine. L’allusion étant on ne peut plus claire. Mais surtout, il est à retenir qu’Emmanuel Macron a confirmé la création d’un Forum de l’islam de France (Forif) comme principal interlocuteur de l’Exécutif français, une forme de représentation de l’Islam basée sur les acteurs départementaux et non plus sur l’Islam dit « consulaire » qui trouvait sa raison d’être, à partir de la tutelle des fédérations de mosquées affiliées à des pays (Maroc, Turquie, Algérie…). Jusque-là, et depuis 2003, le Conseil français du culte musulman (CFCM) était l’interlocuteur des pouvoirs publics en France. Mais Emmanuel Macron avait promis entre autres d’exercer sur le CFCM « une pression immense » dans le but d’une mise en place, d’une labellisation des formations et d’une certification des imams d’où ce désamour.
Le Forif a pour ambition de faire avancer des dossiers urgents comme la formation et le statut des cadres religieux (imams et aumôniers), au point mort depuis des années en raison des dissensions entre les huit fédérations musulmanes – UMF, GMP, MF, CCMTF, CIMG France, RMF, FFAIACA et FP. Si le Forif prospère, celles-ci, souvent accusées d’être l’instrument de « l’islam consulaire », seraient de facto marginalisées. Pour Mohammed Moussaoui, président du CFCM, c’est un bien pour un mal, « Il s’agit de faire évoluer les actuelles instances. Cette réforme passe par une refonte du CFCM », a-t-il déclaré. Moussaoui pourtant, était jusqu’à il y a peu, l’interlocuteur historique des pouvoirs publics. « L’idée est d’avoir des instances représentatives à partir des départements, c’est ma position de longue date, je m’en réjouis », a-t-il ajouté.
Bref, la « structuration » de l’islam comme « partenaire de la République », prônée par Emmanuel Macron dans sa lutte contre « les séparatismes », est petit à petit en train de se mettre en place avec le Forif. Ce dernier qui prend le relais des ATIF, les Assises territoriales de l’islam de France vise à contourner la paralysie totale dans laquelle est plongé depuis un an, le Conseil français du culte musulman (CFCM). Ce n’est pas pour déplaire à un homme, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin qui s’en trouve sous les feux de la rampe. Au printemps dernier lors des Assises territoriales, il avait exhorté les préfets de faire émerger des acteurs musulmans désireux de s’impliquer. Il avait réussi à rassembler un millier de personnes pour in fine, en sélectionner une centaine afin d’étudier les problèmes très concrets auxquels se heurtent mosquées et personnels cultuels. Les « élus “ont ainsi travaillé sur des thématiques comme la formation des cadres religieux, la prévention des actes anti-musulmans, l’application du volet ‘droit des cultes’ de la loi contre le séparatisme votée à l’été 2021, et les aumôneries (pénitentiaires et hospitalières). Ils sont tenus de rendre compte à la fin ce mois ou en début février.
L’Exécutif français en optant pour le Forif, joue la carte des acteurs de terrain contre ce qu’il appelle ‘l’oligopole paralysant des fédérations ‘dans le seul but de voir émerger une nouvelle instance de porte-paroles ‘qualifiés ‘et crédibles et qui surtout, soient à leur goût.