La conférence de presse de Rémy Heitz, procureur de la République de Paris, qui avait qualifié l’affaire d’extrêmement importante, s’est tenue hier à 17 heures, au lendemain d’une forte mobilisation contre le texte de loi sécurité globale et les violences policières, manifestation particulièrement violente comme en attestent les video: si Reporters sans frontières a dénoncé des violences policières “inacceptables” contre un photographe syrien indépendant, collaborateur de l’AFP, si d’autres manifestants ont été blessés, une soixantaine de policiers furent tabassés par des manifestants et nombre de dégâts matériels volontaires notés.
Après les images de l’évacuation brutale d’un camp de migrants à Paris, il aura fallu la révélation de l’agression de Michel Zecler pour que l’atmosphère s’électrise, que monte l’indignation, et que finisse de se démontrer -s’il le fallait encore- l’intérêt extrême des images, qu’elles soient délivrées par des caméras de vidéosurveillance ou par des vidéos tournées par des journalistes ou encore des témoins.
Après deux jours de garde à vue dans les locaux de l’IGPN, connue comme la police des polices, au cours desquels les trois premiers fonctionnaires de police finirent par admettre que les coups portés, même donnés sous la force de la panique, n’étaient pas justifiés, mais contestèrent les propos racistes, la mise en examen a été requise pour les quatre hommes, assortie de détention provisoire pour trois d’entre eux et d’un placement sous contrôle judiciaire pour le 4ème.
Rappelons qu’une enquête avait été ouverte contre eux dès mardi pour violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique, avec la circonstance aggravante de racisme, et faux en écriture publique, l’ensemble ayant conduit à leur placement en garde à vue dès le vendredi.
La détention provisoire des trois agents soupçonnés d’avoir porté des coups au producteur a été demandée pour éviter un risque de concertation entre les auteurs ou de pressions sur les témoins, a expliqué Rémy Heitz. Le quatrième agent, qui aurait jeté la grenade lacrymogène dans le studio, est placé sous contrôle judiciaire.
Pour rappel, c’est le site Loopsider qui révéla l’affaire en publiant, jeudi, une enquête vidéo où l’on voit cet homme frappé pendant plusieurs minutes dans son studio de musique, samedi 21 novembre à Paris, par trois policiers, avant qu’un quatrième intervienne et jette depuis l’extérieur une grenade lacrymogène à l’intérieur du local. Dans une seconde vidéo fournie par un voisin et publiée vendredi, on voit Michel Zecler, une fois extrait du studio, être de nouveau tabassé au sol, cette fois sous les yeux de nombreux autres policiers.
Si le ministre de l’intérieur avait aussitôt réagi en accusant les policiers d’avoir sali l’uniforme de la République et en annonçant leur suspension, puis leur révocation, dès que les faits seraient établis par la justice, le PR avait via les réseaux sociaux dit sa honte et le directeur général de la Police nationale avait dénoncé “des comportements de délinquants” et promis que ces événements seraient traités avec la plus extrême sévérité une fois les responsabilités établies.
Alors que nausée, exaspération, saturation et fatigue s’emparent de tout un chacun chargé de suivre une actualité décidément inédite, on se prend à se demander comment 3 hommes, desquels le Procureur dit qu’à ce jour leurs états de service étaient bons, voire très bons, (sic), auront pu ainsi se déchainer sans qu’un seul arrêtât les 2 autres. Comment encore la victime, qui elle-même devança les media et parla de son passé de délinquant, devint sur les réseaux sociaux un bandit de grand chemin et demain un presque meurtrier.
Et puis ce côté surréaliste lorsqu’on l’entend raconter la chose : Je me disais : je vais appeler la police.
Comment rester placide en entendant l’indignation répétée ad nauseam des joueurs de foot, acteurs, Gens de la musique, que l’on n’entendit guère il y a peu encore, lorsque fut décapité Samuel Paty.
Comment se satisfaire de ces indignations sélectives, faisant par exemple que les féministes se turent honteusement lorsque Mila fut menacée à son tour et que l’on n’entendit pas, alors, ces “célébrités” chanter leur “mal à la France”.
Comment enfin s’empêcher, dans un exercice de grand écart qui va finir par tenir du prodige, de questionner encore et encore le rôle des 2 brigades de police qui n’agirent pas et permirent la mise à mort par défenestration de Sarah Halimi, et le faire tout en vouant admiration et empathie sincères à un corps de métier particulièrement mis à mal, à ceux d’entre eux morts par suicide lorsque ce ne fut pas sous les coups du terrorisme. Un ami psychiatre me confiait récemment n’avoir jamais reçu dans sa patientèle … autant … de policiers.