La République est un combat. La République est un impérieux besoin. La République est une exigence éthique et philosophique. La République est l’avenir de la nation française telle que nous voulons la construire !
Au fond, ce moment de grand trouble est peut-être aussi, paradoxalement, un moment de grande clarification, un moment « refondateur ».
Des leaders de ce que fut – et que l’on appelle peut-être encore à tort – la gauche sont passés de l’éloge funèbre de Charb à la défense inconditionnelle de l’islam, de la manifestation « Tous Charlie » du 11 janvier 2015 à la manifestation du 10 novembre 2019 où des « Allahou akbar » furent proférés à deux pas du Bataclan. Ces personnes sont passées en quelques années de l’universalisme au racialisme.
Notre temps est un temps politique. L’histoire n’est pas achevée. Nous avons la conviction qu’à la façon de l’outre-noir de Pierre Soulages, la lumière peut jaillir des ténèbres.
Au fond, nous pouvons essayer de résumer ce moment en trois questions. Qui veut abattre la République ? Qui leur prête main-forte ? Qui s’oppose à ces funestes visées et défend en la faisant vivre la République ?
Ceux qui veulent réduire les citoyens à une identité unique et figée. Ceux qui défendent une opinion ou une croyance en rejetant et en interdisant les autres. Ceux qui imposent la censure au nom d’un diktat de blasphème qui n’existe pas en France. Ils forment les deux mâchoires de la tenaille identitaire par laquelle l’extrême droite, d’un côté, et l’islamisme politique, de l’autre, tentent de broyer nos valeurs humanistes universelles.
Qui leur prête main-forte ? Tous ceux qui, sciemment ou non, parce qu’ils font de la défense des minorités un culte aveugle, sont prêts à liquider des siècles de principes philosophiques qui ont amené notre société au degré de civilisation où elle est. Ceux qui ne voient les relations sociales que par la dialectique dominants-dominés, bourreaux-victimes. Mais aussi ceux qui pensent que la mondialisation est la réponse à tout, les ultra libéraux qui veulent tout financiariser, d’un côté, et, de l’autre, une mouvance environnementaliste qui ne croit plus le cadre national capable de concourir à forger et mettre en œuvre des règles capables de sauver la planète.
Les ennemis de la République progressent et les rangs de leurs complices enflent. Un pourcentage, certes minoritaire mais signifiant, de nos jeunes concitoyens ne condamne pas les assassins de Charlie.
Devant ce triste constat, gémir ne suffit pas, alors, il faut espérer, et pour pouvoir espérer, il faut agir !
90 % des Français considèrent que la laïcité les protège et, parmi eux, une très large majorité de nos concitoyens musulmans de culte ou de culture. Eux savent qu’ils sont les premières cibles de la tenaille identitaire, et notre devoir est de les en protéger.
Là se pose la troisième question parce qu’elle seule est constructive : qui travaille à la République ?
Ceux qui pensent que nous devons avant tout travailler à forger du commun, y compris, bien sûr, en mettant dans ce commun nos différences et nos divergences (on ne bâtit pas une démocratie sur des consensus, mais sur des dissensus maîtrisés et rationalisés), ceux-là bâtissent la République.
Ceux qui rappellent, à l’occasion du procès des assassins de Charlie Hebdoqu’il n’existe pas de droit au blasphème parce que dans la République française le blasphème n’existe pas, ceux-là bâtissent la République.
Ceux qui affirment que la République française reconnaît le droit à la liberté absolue de conscience, la liberté de croire ou de ne pas croire, ou de changer de croyance, la liberté de pensée, la liberté d’opinion, la liberté d’expression, et donc la liberté de critiquer toutes les idées quelles qu’elles soient et d’où qu’elles viennent, ceux-là bâtissent la République.
Ceux qui, Républicains de progrès, refusent la logique victimaire et se battent pour l’émancipation des citoyens, qui veulent tenir ensemble les maillons de la chaîne nationale : la prospérité économique et le progrès social qui doit en découler à condition que l’on y veille, la protection des libertés et la recherche d’égalité, l’altérité et la fraternité, ceux-là bâtissent la République.
L’histoire ne se répète jamais, mais elle bégaye parfois et elle connaît des cycles.
Au pupitre 300 qui est le mien dans l’hémicycle, et qui fut celui de Jean Zay, je garde un livre depuis juin 2017, que je parcours régulièrement, L’Étrange Défaite de Marc Bloch.
Au moment où nous commémorons la proclamation de la République, nous ne pouvons pas nous résigner à une possible victoire de l’extrême droite dans dix-huit mois, nourrie des abandons, des lâchetés, des coups de boutoir et d’une forme de « soumission ».
Les Républicains de progrès doivent se ressaisir en affirmant dans les mots et par les actes ce que l’État peut et doit apporter, par l’instruction publique aux élèves, par la souveraineté économique française et européenne aux salariés, par la santé publique aux malades et aux personnes âgées, par la sécurité, la recherche, la protection de la planète, le sport et la culture à tous !
La République a été proclamée. Nous devons la faire vivre. La nation française en a plus que jamais besoin ! *Député LREM du Cher
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