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Une tribune de Kamel Bencheikh
« Souvent, le racisme sert de manteau à l’ignorance, à la petitesse, aux frustrations et aux aigreurs des personnes complexées et faibles d’esprit. »
Kama Sywor Kamanda
Nous sommes donc en début de week-end sous un ciel parisien plombé par des cumulo-nimbus charnus et plâtreux. Alors que le coronavirus a été, jusqu’à ce jour, le sujet qui a mis hors-jeu les palabres sur le temps comme il va, voilà soudain que le microcosme s’agite autour d’un non sujet qui, il faut bien se rendre à l’évidence, m’occupe aussi. De quoi s’agit-il en vérité ?
Danièle Obono BASTIEN LOUVET/BRST/SIPA Numéro de reportage : 00968047_000012
Transposons les choses à leur juste place : Valeurs actuelles a publié une fiction avec, comme héroïne, la députée LFI de Paris, en la mettant précisément dans le contexte de sa propre doctrine racialiste. Cette fable représente Obono en esclave, elle qui se gausse d’être la descente d’esclaves ayant fait l’objet d’un commerce triangulaire, oubliant au passage que les slaves blancs ont été les premiers esclaves de l’humanité (d’où le mot utilisé) et oubliant que les premiers esclavagistes ont été les arabo-musulmans et les noirs africains eux-mêmes.
Entre deux identitaires, je m’interdis de choisir. Les deux camps sont le miroir l’un de l’autre et s’acharnent, l’un comme l’autre, à déstructurer les valeurs universalistes
Que je le dise tout de suite à ceux à qui ça a échappé et que je le rappelle à ceux qui me connaissent : je suis à équidistance entre Obono et Valeurs actuelles. Ce journal a mis en lumière un phénomène qui est passé au travers des mailles des extrémistes de gauche : l’indigénisme avéré d’Obono. Elle est une ennemie affichée de la laïcité, de l’universalisme et même une ennemie de la République. Pour parachever le tout, je n’hésite pas à soutenir que c’est une raciste qui met en avant la seule couleur de peau. C’est donc une militante d’une mouvance qui a été jusqu’à apporter son soutien à Dieudonné. Elle n’a jamais su agir autrement qu’en fractionnant les citoyens en bons ou en méchants. Nous sommes quand même quelques-uns, souvenez-vous, à l’avoir déjà dénoncée ici et ailleurs.
Selon l’évangile de la gôche bien-pensante, ne peut se prévaloir du statut de victime que celle ou celui qui fait partie de la minorité, qu’il s’agisse d’un islamiste ou d’un racialiste. Cette fameuse gôche, qui transpire l’amalgame, s’est levée pour défendre une militante d’une cause indéfendable. C’est à ce point précis que l’on mesure la perte des valeurs dont se prévalaient ceux qui défendaient l’unicité de la nation.
Le camp de la vertu est donc venu, comme Zorro, au secours de la veuve et de l’orphelin. J’aurais voulu, pour ma part, voir ces citoyens intègres et irréprochables, noyés dans le miel de l’angélisme, s’indigner lorsque Danièle Obono indiquait, toute fière : « Je n’ai pas pleuré Charlie. J’ai pleuré toutes les fois où des camarades ont défendu, mordicus, les caricatures racistes de Charlie Hebdo ou les propos de Caroline Fourest au nom de la ‘liberté d’expression’ (des Blanc-he-s/dominant-e-s) ou de la laïcité ‘à la Française’. Mais se sont opportunément tu-e-s quand l’Etat s’est attaqué à Dieudonné, voire ont appelé et soutenu sa censure ».
J’aurais aimé constater que ces angelots se savoir offensés contre le fait quand Obono soutenait que « la non mixité sociale n’était pas dangereuse » et qu’elle se targuait d’avoir comme camarades ceux qui se disaient sexistes, antisémites, homophobes, pour qui la couleur de la peau passe avant le combat universaliste, qui défendent la vision des islamistes et qui se donnent comme nom celui des indigènes, effaçant du même coup la lutte des seuls indigènes qui se sont soulevés héroïquement contre le colonialisme.
J’aurais aimé voir s’irriter et se scandaliser ces professionnels de la tempérance lorsqu’Obono, pourtant élue de la République, a osé dire que la loi sur les signes religieux ostentatoires était une loi «raciste et islamophobe»
Mais qu’attendre d’autre du niveau intellectuel de ces agitateurs qu’ils soient députés ou journaux d’extrême-droite. Ils tendent vers un seul but : détruire l’émancipation laïque et sociale du peuple et de la République une et indivisible qu’ils sont supposés servir. C’est, à l’évidence, une sortie incongrue maquillée sous un vrai-faux débat de société.
Je n’ai absolument rien à apporter comme soutien à Danièle Obono, de la même façon que je vomis Valeurs actuelles . Je n’y suis pour rien dans cette caricature.
Entre deux identitaires, je m’interdis de choisir. Les deux camps sont le miroir l’un de l’autre et s’acharnent, l’un comme l’autre, à déstructurer les valeurs universalistes. L’un et l’autre sont responsables des insultes que nous subissons en tant que républicains.
Pour quelqu’un qui n’a jamais apporté le moindre soutien à Charlie, qui n’a pour seul viatique que la couleur de la peau, qui fricote avec les pires du PIR, vous ne pouvez pas savoir comme je m’en balek de ce qui lui arrive. Qui sème le vent…
Nos mollets sont plus que souvent mordus par ces chiens. Danièle Obono et ses sbires ont de tout temps applaudi au plus fort des morsures. Ils ont été jusqu’à mettre du sel sur nos plaies à vif.
Je n’oublie pas non plus que ces gens ont défilé à la marche des islamistes du 10 novembre 2019 place de la République en s’affichant avec les pires réactionnaires. Charb, Tignous, Cabu, Wolinski, Honoré, Elsa Cayat et Bernard Marris savent que ces abjects indigénistes n’ont pas eu un mot lorsqu’ils ont été abattus comme des chiens. Pire, certains sont allés jusqu’à se frotter les mains et à cracher sur leurs noms à défaut de le faire sur leurs tombes.
Entre deux abjections, mon cœur ne balance pas, il ne choisit pas, il refuse de céder à la politique de l’émotion. En revanche, je choisis de laisser les crocodiles se déchiqueter dans le marigot. Je n’apporterai jamais une once de solidarité à ceux qui ont dansé sur les tombes de Charlie .
C’est juste que deux groupes d’identitaires se canardent dans une cour de récréation. Les identitaires blancs et les identitaires indigénistes se crachent dessus. Et cette personne, que certains défendent contre vents et marées, est tout simplement la cible des racismes blancs sur lesquels elle a vomi son propre racisme. Je ne défendrai ni l’un ni l’autre. Qu’ils s’entredévorent dans un cul de basse-fosse. Ça ne me concerne pas.
Une fiction publiée par l’hebdomadaire Valeurs actuelles présente la députée d’extrême gauche Danièle Obono en esclave. Faut-il s’en indigner ?
Rien à secouer d’Obono et rien à secouer de Valeurs . Je ne mettrai pas un genou à terre comme trop le font. Je ne suis pas responsable et je ne serai pas, plus, prise en tenaille, la fameuse tenaille identitaire…
J’ai lu le dernier numéro de Valeurs Actuelles et la fiction de Harpalus. L’avez-vous lue ? Tout le monde parle d’un “torchon”.
L’auteur a romancé les thèses indigénistes, appliqué leur doctrine à la lettre ainsi que leur représentation de l’histoire coloniale et celle de l’esclavage. Il a mis une militante indigéniste qui se rêve descendante d’esclaves et victime d’un racisme d’état « systémique » au centre de tout ça. C’est tout.
À travers une fiction, l’auteur de Valeurs Actuelles montre que la députée Danièle Obono devrait avoir honte d’elle, de son instrumentalisation de l’histoire des victimes de la traite négrière, de tous ses stratagèmes qui font penser qu’en étant non blanc aujourd’hui en France, on vivrait comme du temps de l’esclavage.
L’article de Valeurs actuelles au centre de la polémique.
Quel est donc le problème ? Qu’est-il arrivé pour que des ténors de la cause républicaine se déchainent sur les réseaux sociaux pour voler au secours de Madame Obono ?
« Le dessin est horrible » me dit-on. En quoi ? Les indigénistes scandent bien que le racisme anti-blanc n’existe pas et que la traite des blancs à travers l’histoire ne compte pas, ils affirment que toute personne non-blanche vit comme les ramasseurs de coton du temps de l’esclavage… Cela vous choque ? Moi aussi. Et c’est la seule raison pour laquelle ce dessin peut révulser, non par son racisme mais par l’escroquerie indigéniste qu’il entend illustrer.
Que ceux qui se moquent régulièrement des « poseurs de genoux à terre » se regardent dans un miroir.
Nous ne sommes pas responsables de ce qui arrive à Obono. Son camp est en revanche à l’origine du plus gros de la haine contemporaine en France, des moqueries, en passant par les insultes, le cyber-harcèlement et les menaces de mort. Son camp est aussi à l’origine du relativisme, ce cancer envers ceux qui veulent nous tuer.
Les identitaires de l’extrême droite aussi nous en mettent plein la figure lorsque l’on exprime nos positions universalistes mais soyons juste, soyons honnêtes, qui nous attaque ? Qui nous traque ? Qui vous fait peur actuellement ?
Républicains, nous sommes lynchés régulièrement et le camp d’Obono ne condamne jamais ce qui nous arrive, ils ne tiennent même pas en laisse leurs trolls, leurs racailles, leur milice. Pire, Obono a craché sur les tombes des victimes de Charlie Hebdo en écrivant qu’elle a plutôt pleuré pour Dieudonné que pour les victimes de Charlie… Mais tout est pardonné.
Si certains sont gênés que Valeurs Actuelles les ait mis dans une position où ils se sentent obligés de défendre l’inénarrable Daniele Obono, moi, petit moi de rien du tout, je leur en veux de me mettre dans une position où je dois défendre Valeurs Actuelles . Leur fiction, c’est du Charlie à leur sauce, mais du Charlie quand même, un raisonnement par l’absurde qu’on leur refuse pour saisir l’occasion de briller par bien-pensance, pour avoir l’ascendant moral…
J’assiste éberluée à cette conjuration des fragiles effrayés que l’on puisse les traiter de racistes encore une fois, qui se sentent responsables… un cercle infernal, tout se répète. De nouveau, on laisse le champ libre aux vrais racistes, on nourrit leur syndrome de persécution, on s’auto-flagelle. Nous n’avons rien appris.
Si ce roman d’été doit choquer, je répète que c’est parce qu’il nous présente en réalité les idées du Parti des Indigènes de la République, d’Obono et d’une partie de la France Insoumise, d’Eric Piolle et d’une partie d’EELV, et ces idées sont à vomir, oui.
Qu’ils s e bouffent entre eux! Pas besoin d’exprimer ma solidarité à une personne qui était présente le 15 octobre 2019 au séminaire « Gauche et race » à Sciences Po et qui n’a pas bougé le petit doigt lorsqu’elle a entendu la sociologue Hourya Bentou-hami me dire : « Il est assez commun que des personnes refusent de s’identifier à des causes auxquelles elles doivent naturellement être sensibles. Leur but étant de séduire la classe dominante pour bénéficier de passe-droits auxquels elles n’auraient pas accès autrement ».
C’est en présence de Danièle Obono, de dizaines d’étudiants et d’une dizaine d’autres « sot-ciologues » et militants indigénistes que j’ai alors été traitée de « collabeurette » avec un langage de bourgeois culturel. Et contrairement à tous les autres, Obono était la seule députée de la République. Elle n’a pas réagi.
Non rien n’est pardonné et je n’ai rien à me faire pardonner, pas de virginité à racheter.
Ne pas rejoindre le groupe des pénitents qui s’indigne contre le papier de Valeurs actuelles ne fera pas de moi quelqu’un de raciste, ni de moins universaliste, ni de moins féministe.