« Soucieuse du bien commun, la Conférence des évêques de France (CEF) continue d’inviter chacun à se mobiliser contre le virus. Elle appelle les catholiques à entrer dans cette perspective en prenant leur propre responsabilité vis-à-vis du vaccin », a déclaré la CEF le 13 juillet 2021, au lendemain du discours d’Emmanuel Macron annonçant la mise en place d’un passe sanitaire.
« L’Église ne prescrit rien, elle laisse à chacun sa liberté de conscience,décrypte Laurent Stalla-Bourdillon, prêtre du diocèse de Paris et enseignant au Collège des Bernardins. Sa responsabilité est de rehausser chez les citoyens la conscience de leur engagement, de leur liberté et du commun. À la société, ensuite, de parvenir à un consensus, ce qu’elle a de plus en plus de difficultés à faire. »
Liberté individuelle contre bien commun
« Enfermés depuis des années dans une logique de libertés individuelles qui priment sur tout, nous avons perdu le sens du bien commun. Résultat, l’autorité politique use de son pouvoir pour le générer artificiellement via des obligations », poursuit le prêtre.
Au Vatican, le pape a adopté un ton plus tranchant. Lui-même vacciné depuis janvier 2021, il a très clairement appelé à faire de même, parlant à la télévision italienne du « négationnisme suicidaire » des antivax.
« Il faut nuancer les positions romaines, décrypte Marie-Jo Thiel, médecin et théologienne. Le pape a pris cette position extrêmement claire, mais d’autres locuteurs au Vatican, chacun dans leur rôle, se sont aussi prononcés ».
De la moralité de la vaccination
La Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF), « une instance juridique et dogmatique », a ainsi publié une note sur le sujet, le 21 décembre 2020. L’Église était alors interpellée avec insistance sur le recours dans le procédé de fabrication de certains vaccins, particulièrement celui d’AstraZeneca, à des chaînes cellulaires issues de tissus obtenus à partir d’avortements effectués au siècle dernier.
Pour la CDF, il est « moralement acceptable » d’utiliser de tels vaccins car « la coopération au mal (coopération matérielle passive) de l’avortement provoqué d’où viennent les lignes cellulaires » est « lointaine ». En outre, « le devoir moral d’éviter cette coopération matérielle passive n’est pas contraignant s’il y a un grave danger tel que la diffusion, autrement impossible à arrêter, d’un agent pathogène grave », situation à laquelle semble correspondre la pandémie de Covid-19.
La CDF soutient également que « la moralité de la vaccination dépend non seulement du devoir de protéger sa propre santé, mais aussi du devoir de poursuivre le bien commun ». Elle rappelle néanmoins que la vaccination n’est pas une « obligation morale », et qu’elle doit être « volontaire ».
Des enjeux bioéthiques profonds
Une troisième instance vaticane a pris la parole sur la vaccination en février 2021 : l’Académie pontificale pour la vie, dont fait partie Marie-Jo Thiel. « Nous avons pris une position ouverte, plus nuancée que celle du pape, mais incitant à se faire vacciner au nom de la responsabilité éthique et d’une autonomie que j’appelle “relationnée”, c’est-à-dire tenant compte des autres », résume la théologienne.
Pour cette experte en bioéthique, l’Église « ne peut pas se taire sur ces questions qui touchent à la vie et à la dignité humaine ». Des enjeux majeurs et profonds sous-jacents au débat vaccinal actuel.