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La régulation de la formation des imams en France ressemble à un labyrinthe sans issue. Et ce n’est pas le septième rapport sur le sujet – en trois décennies – qui devait être remis, jeudi 16 mars, aux ministres de l’Intérieur et de l’Éducation nationale, respectivement Bruno Le Roux et Najat Vallaud-Belkacem – qui ouvre des perspectives innovantes.
La formation de l’écrasante majorité des quelques 1800 imams actifs en France échappe à tout contrôle, sinon à celui des anciennes fédérations musulmanes
Leur diagnostic d’une situation complexe tient en deux idées-forces: la formation de l’écrasante majorité des quelques 1800 imams actifs en France échappe à tout contrôle sinon à celui des anciennes fédérations musulmanes ; la tentative de renforcer la formation universitaire en islamologie voit plutôt les quelques apprentis imams qui s’y rendent contester cette lecture universitaire du coran. Ils la récusent même en bloc. «Les enseignants du supérieur, écrivent-ils, se heurtent à des contestations croissantes».
«L’Etat n’a pas vocation à contrôler les instituts de formation théologiques»
En revanche les «propositions» de ce rapport de 72 pages ne sont pas renversantes. Tout simplement parce que cette «mission de réflexion sur les formations des imams et de cadres religieux musulmans» dont étaient chargés les trois auteurs, prend un tel soin – par souci de laïcité – de délimiter «les options à écarter» qu’il reste peu de liberté pour l’innovation et pour lutter de façon radicale contre la… radicalisation.
Contrairement à ce qui se fait dans certains pays étrangers, essentiellement par respect de la laïcité, il faut exclure en France la création d’une Faculté de théologie musulmane publique
Contrairement à ce qui se fait dans certains pays étrangers donc, et essentiellement par respect de la laïcité, il faut en effet exclure en France «la création d’une Faculté de théologie musulmane publique», «la délivrance de diplômes nationaux par les instituts privés» musulmans (même si des systèmes administratifs de «jurys rectoraux» ou de «conventions» pourraient ouvrir quelques portes). Et bannir, à fortiori «une reprise en main» de ces instituts «par «l’État». Tout comme des financements directs qui sont, finalement, laissés aux fidèles.
La philosophie de cette longue liste d’empêchements est d’ailleurs clairement exprimée: «L’État n’a pas vocation à contrôler les instituts de formation théologiques (…) ni à déterminer le programme de leurs enseignements». L’État laïque n’est pas théologien.
«Un label interne au culte musulman»
Que reste-t-il donc? La première proposition du rapport est caricaturale d’une vision administrative française: il faut commencer par «créer des instances de pilotage»! Le rapport propose ensuite de renforcer l’enseignement de la langue arabe «selon une vision plurielle et diversifiée» et non comme seule «langue religieuse des musulmans». Il appelle aussi à «renforcer une islamologie diversifiée» de haut niveau universitaire car la France a beaucoup perdu, sur ce terrain, face à la puissance des études d’islamologie en anglais.
Les formations courtes rencontrent un beau succès d’estime, mais passent à côté de leurs cibles principales pour une raison simple: ces imams comprennent mal le français qu’ils ne pratiquent pas…
Quant à la formation religieuse concrète des imams – dont la diversité des appartenances et des écoles théologiques antagonistes est bien décrite – le rapport encourage les «responsables du culte musulman» à déterminer «en commun le contenu et le niveau des enseignements religieux» en vue de «créer un label interne au culte musulman».
Des DU qui ratent leurs cibles
Enfin, à côté de mesures comme le développement de «campus numérique», le rapport se félicite de l’existence de «diplômes universitaires de formation sur le fait religieux et la laïcité», les DU, qu’il convient de développer ou de mieux adapter aux contextes locaux. Il y en a quatorze en France financés par le ministère de l’Intérieur. Ils offrent une formation au «contexte socio-historique, au droit et aux institutions de la France», à la «gestion d’institutions cultuelles» et à une «approche universitaire du fait religieux».
Mais ces formations courtes – pensées pour familiariser des imams étrangers au contexte français – rencontrent un beau succès d’estime mais passent à côté de leurs cibles principales pour une raison simple: ces imams comprennent mal le français qu’ils ne pratiquent pas… Ils ne s’inscrivent donc pas, ou très peu, dans ces cursus! D’où l’une des rares instantes recommandations du rapport: «Renforcer d’urgence le soutien aux cours de français et de culture française donnés préalablement à l’inscription à ces DU pour les cadres religieux d’origine étrangère (quelle que soient leur confession) [sic!], afin de leur permettre de donner des prêches en français, de connaître et respecter l’environnement dans lequel ils sont amenés à exercer».
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