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L’origine obscure de l’étoile de David.
Certaines parties du Talmud traitent de la réception de la Loi au Sinaï. (Chabbat, 87). On y trouve un passage susceptible de nous donner une interprétation de l’origine obscure de l’étoile de David.
Ce sont Israël et la Torah, inséparablement liés l’un à l’autre, comme le corps et l’âme, la Torah étant l’âme du peuple.
On nous y rapporte en effet la parole d’un Sage de Galilée: « Béni soit l’Eternel qui transmit la lumière de sa triple parole (Pentateuque, Prophètes, Hagiographes) aux trois parties du peuple (Cohen, Lévi, Israël) le 3éme mois (Sivan) par le 3ème enfant (Moïse, troisième enfant de Yo’heved) « .
Indépendamment d’une explication plus profonde de cette parole, on en déduit que le peuple juif ainsi que la Torah, peuvent être considérés comme étant divisés en trois parties. Le » Maguène-David » est-il autre chose que deux triangles étroitement enlacés ?
Etoile juive
Ce sont Israël et la Torah, inséparablement liés l’un à l’autre, comme le corps et l’âme, la Torah étant l’âme du peuple.
Ce signe est à juste titre le « bouclier » de chaque roi juif, voire de tout Juif, aussi longtemps qu’il reconnaît faire partie de cette nation et accepte de recevoir en lui, son âme, la Torah.
L’inspiration géniale de Rosenzweig consiste en ceci : dans la Bible le trinôme Création Révélation Rédemption est linéaire.
La Création est à l’origine ; la Révélation est au milieu, la Rédemption à la fin. De ce schéma linéaire, Rosenzweig fait un schéma stellaire.
Une première constellation est représentée parla triade philosophique universelle : Dieu, le Monde,l’Homme. Une seconde par la triade philosophique biblique et juive : Création, Révélation, Rédemption. Sans les éléments constitutifs de la seconde triade, ceux de la première resteraient isolés, coupés l’un de l’autre, cloîtrés dans leur ipséité.
L’Etoile de la Rédemptionde Franz Rosenzweig (1886-1929)
C’est la triade juive qui permet à Dieu de communiquer avec le Monde (Création), qui permet à Dieu de communiquer avec l’Homme (Révélation), qui permet à l’Homme de communiquer avec le Monde (Rédemption : transformation du Monde en vue de sa finalité divine).
Ces trois types de rapports représentent pour Rosenzweig la structure authentique de l’expérience humaine. La Création, c’est l’expérience immédiate faite par l’homme que l’être –là du monde est bon. La Révélation désigne l’expérience de la parole divine dans la prière et dans le rituel : la Rédemption, c’est l’effort utopique qui est le fondement de tout agir humain.
« Ce n’est pas que le faire entraîne nécessairement un comprendre. Mais on comprend autrement quand on comprend à partir d’un faire. »
« Dans les deux triangles superposés, l’Etoile reflétait ses éléments et la composition de ses éléments de manière à reflèter une voie unique ; de même, les organes du visage se partagent aussi en deux niveaux. En effet les points vivants du visage ne sont-ils pas ceux qui le font entrer en relation avec le monde alentour, que cette relation soit réceptive ou active ? De même que la structure du visage est dominée par le front, de même sa vie, c’est-à-dire tout ce qui tourne autour des yeux et qui en rayonne, se concentre sur la bouche…C’est dans les yeux que brille l’éternel visage de l’homme. »
Dieu se prive de soi-même en faveur du monde dans l’acte de la création, et en faveur de l’homme au moment de la révélation. L’homme pour sa part, se dédie-il au monde, et son agir dirigé vers utopie radicale désigne la rédemption.
C’est L’Etoile de la Rédemption, titre du livre, clef de son système de pensée qui peut se résumer ainsi :
d’abord la pensée juive, avec son schéma biblique tri thématique, a un sens universel ; dans un second temps la pensée juive donne à l’universel un sens.
Le thème de la Rédemption est particulièrement présent. Dans une lettre datant de l’année 1917, Franz Rosenzweig évoque le récit talmudique suivant :
« Un jour, Rabbi Yoshoua ben Levi rencontra le prophète Elie à l’entrée de la grotte de Rabbi Shimon ben Yohai et lui demanda : Quand le Messie viendra-t-il ? Elie lui répondit : Va lui demander.- Mais où puis-je le trouver ? – Aux portes de Rome. – Et comment pourrais-je le reconnaître ?- Il est assis parmi les pauvres et les malades et panse leurs plaies (…). Rabbi Yoshoua alla trouver le Messie (…) et lui demanda, Maître, quand viendras-tu ? Le Messie lui répondit : Aujourd’hui. Sur ce, Rabbi Yoshoua retourna vers le prophète Elie. Celui-ci lui demanda : Que t’a dit le Messie ? (…) Rabbi Yoshoua lui répondit : Il m’a menti, car il dit : Aujourd’hui mais il n’est pas venu. Alors Elie lui répondit : (Tu n’as pas compris sa réponse) ; le Messie t’a cité un verset des Psaumes (95, 7) : « Aujourd’hui, si vous écoutez Sa voix. » (Sanhédrin, 98A)
Dans la suite de sa lettre, Rosenzweig commente ce récit en distinguant entre deux significations du mot « aujourd’hui » :
« Il y a un aujourd’hui qui n’est qu’un pont vers demain, et il y a un autre aujourd’hui qui est un tremplin vers l’éternité. »
Rosenzweig déchiffre le sens des deux représentations de la Rédemption selon le judaïsme et le christianisme, dans les formes de leur vie communautaire, dans leur calendrier, dans leur liturgie et dans leurs institutions.
Ce sont « les deux cadrans du temps toujours renouvelé ».
Les deux sont caractérisés par la création d’un « temps sacré » qui leur évite les péripéties et les contingences de l’histoire et de vivre dans l’éternité. Le temps sacré est fondé sur le retour régulier des fêtes, provoque l’arrêt du flux continu et infini du temps naturel et du temps historique, en créant ainsi une espèce d’éternité au milieu du temps.
« Tous les jours de l’année l’ânesse parlante de Bilam me paraît relever de la légende sauf pendant le chabbat où on lit la péricope de Balaq ; là elle me parle »
Dans cette perspective, christianisme et judaïsme sont deux alliances valables : d’une part, « voie éternelle » offerte au monde païen grâce au christianisme, d’autre part « vie éternelle » accordée au peuple juif afin qu’il poursuive le Royaume de Dieu, hors du flot de l’histoire jusqu’à la Rédemption : il montre à l’humanité le modèle d’une vie communautaire qui est détaché du processus de développement immanent à la temporalité.