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24 février 2022
Ukraine: Que veut Poutine?
Ukraine: les forces en présence, les stratégies..
L’armée ukrainienne est-elle bien préparée face à la Russie ? Ce qu’en disent les spécialistes
Les alliés de l’Ukraine acheminent des tonnes d’armes et de munitions pour renforcer son armée nationale. Trop tard et trop peu selon plusieurs spécialistes qui l’estiment incapable de tenir face aux Russes.
Des soldats des forces armées de l’Ukraine lors d’un transfert vers la zone tenue par les séparatistes du Donbass. | AFP / ALEKSEY FILIPPOV
L’armée ukrainienne est-elle en mesure de contenir une offensive russe ? Convaincu que ses forces ne sont pas en mesure de résister, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a annoncé le 1er février un plan pour mettre fin au service militaire et le remplacer par une armée professionnelle. Il a aussi promis le recrutement de 100 000 soldats supplémentaires d’ici trois ans, la création de vingt nouvelles brigades, la fin du service militaire d’ici 2024, et de meilleurs salaires et avantages pour les soldats et leurs proches.
La leçon de 2014 n’a pas été retenue
Trop tard… Trop peu… Les dirigeants civils et militaires ukrainiens n’ont visiblement pas retenu les leçons des piteux combats de 2014-2015 qui avaient tourné à l’avantage des forces russes.
L’analyse de l’historien militaire Michel Goya sur l’offensive russe d’août 2014 était alors éclairante ; elle est aujourd’hui d’une actualité totale : Si le commandement ukrainien et les puissances occidentales avaient anticipé cette offensive, il aurait été possible de se préparer et de compenser ces niveaux d’écart par la livraison et la maîtrise de missiles antichars modernes de type Javelin ou TOW II par exemple. Rien n’a été fait dans ce sens », écrivait alors l’ancien officier français.
Pour résister un peu plus, il aurait fallu également que les forces ukrainiennes se fortifient autant que possible non seulement sur la frontière, mais aussi à l’intérieur sur les lignes de contact de manière à résister à la fois à l’artillerie et aux blindés lourds par des obstacles, mines et tirs d’artillerie à vue. Cela demandait un effort considérable et du temps, mais ce n’était pas inconcevable. Encore une fois, cela n’a jamais été sérieusement envisagé, car jugé peu nécessaire ». Et d’ajouter : « Il aurait peut-être été possible aussi de se préparer à mener un combat de harcèlement sur les forces mobiles adverses.
Une aide conséquente
Huit ans après ces affrontements, et en dépit des quelque 2,7 milliards de dollars d’équipement et de formation fournis par les États-Unis, l’état des lieux suscite des inquiétudes. L’armée ukrainienne est peu expérimentée ; et ce ne sont pas les escarmouches dans le Donbass qui ont aguerri ces forces longtemps mal équipées et chroniquement fragiles en particulier dans les domaines aérien et naval.
Joseph Henrotin, le rédacteur en chef de la revue DSI, a dressé en janvier un portrait peu flatteur des forces armées ukrainiennes. Selon lui, les forces de Kiev sont dysfonctionnelles aux plans opératifs et stratégiques.
Mais, il faut cependant se garder de les sous-estimer, en particulier les bas échelons qui ont toujours fait preuve de détermination et de courage », reconnaît-il. Il y a donc une incohérence entre des forces tactiques capables et les échelons supérieurs qui n’ont pas conduit la réforme pour sortir d’une logique à la soviétique avec la manœuvre de grandes unités.
Aides massives
Le constat de Michel Goya a finalement, mais trop tardivement, été partagé par l’Otan dont les membres ont acheminé en catastrophe des centaines de missiles antichars et antiaériens et des centaines de tonnes de munitions. Le 25 janvier, 300 missiles Javelin et 80 tonnes de munitions ont ainsi quitté les États-Unis pour Kiev ; c’était le 3e envoi de ce type. Une semaine plus tôt, les Britanniques avaient eux livré des missiles antichars de fabrication suédoise.
Même les pays moins bien équipés que les USA ou le Royaume-Uni, ont contribué. Le 13 février, la Lituanie a, pour sa part, livré des missiles sol-air Stinger dont les forces ukrainiennes auront bien besoin pour menacer les hélicoptères de combat russes en cas de conflit. Cinq jours, plus tard, c’était un petit lot de Stinger estonien qui atteignait Kiev.
Au total, deux mille tonnes d’armes et de munitions ont été livrées et renforcent les capacités ukrainiennes, selon Oleksii Reznikov, le ministre de la Défense.
« Les hommes ne sont même pas entraînés à les utiliser »
Mais tous ces armements vont se trouver neutralisés simplement parce que les hommes ne sont même pas entraînés à les utiliser, prévient Joseph Henrotin. Effectivement, la formation sommaire des soldats et miliciens gouvernementaux a de quoi inquiéter. Quant aux réservistes des Forces de défense territoriale d’Ukraine, ils s’entraînent avec des armes en bois et apprennent dans les faubourgs de Kiev les rudiments du combat d’infanterie et les bases du secourisme.
Des épreuves difficiles sont devant nous. Il va y avoir des pertes. Nous allons devoir traverser la douleur, surmonter la peur et le désespoir, a reconnu mardi matin Oleksiï Reznikov dans une déclaration publiée par le ministère de la Défense. Mais nous allons vaincre sans aucun doute. Nous sommes sur notre terre, a-t-il ajouté.
Ukraine: Biden et l’OTAN déclenchent la guerre économique
Biden, Trudeau et d’autres annoncent de nouvelles sanctions contre la Russie, promettent plus
« C’est le début d’une invasion russe de l’Ukraine », a averti Biden.
(crédit photo : REUTERS/KEVIN LAMARQUE)
Le président américain Joe Biden a annoncé mardi soir une série de nouvelles sanctions contre la Russie en réponse à la reconnaissance par le président russe Vladimir Poutine de l’indépendance des séparatistes en Ukraine. Biden a souligné que les nouvelles sanctions seraient « bien au-delà » de l’ampleur des sanctions prononcées pendant le conflit en 2014, ajoutant que davantage de sanctions seraient prononcées si la Russie avançait.
Les sanctions comprennent des « sanctions de blocage total » contre deux institutions financières russes : VEB et la banque militaire russe. Des sanctions globales seront également imposées sur la dette souveraine de la Russie afin de « couper le gouvernement russe du financement occidental ». À partir de demain, des sanctions seront également imposées à l’élite russe et aux membres de leur famille. « Ils partagent les gains corrompus de la politique du Kremlin et devraient également partager la douleur. »
La décision de Biden d’imposer une première tranche de sanctions contre la Russie était un « premier pas » fort, a déclaré le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba, ajoutant qu’il avait également obtenu la promesse de plus d’armes de la part de responsables américains.
« Les sanctions que le président Biden a annoncées aujourd’hui – elles semblent fortes si nous les considérons comme un premier pas », a déclaré mardi le ministre ukrainien des Affaires étrangères dans une interview à Fox News. Il a ajouté que l’Ukraine ne recherchait pas de troupes américaines sur le terrain pour résoudre la crise.
Biden a ajouté que les États-Unis travaillaient avec l’Allemagne pour s’assurer que le gazoduc Nord Stream 2 n’avance pas.
Biden a ajouté que son administration s’efforcerait de protéger les entreprises et les consommateurs américains de la hausse des prix de l’essence et de protéger l’économie américaine, mais a souligné que « la défense de la liberté aura également des coûts pour nous ».
« C’est le début d’une invasion russe de l’Ukraine », a déclaré Biden, avertissant que les États-Unis croient toujours que la Russie est sur le point d’aller « beaucoup plus loin ». « Qui, au nom du Seigneur, pense Poutine, lui donne le droit de déclarer de nouveaux soi-disant pays sur un territoire qui appartient à ses voisins ? » demanda le président. « Il s’agit d’une violation flagrante du droit international et exige une réponse ferme de la communauté internationale. »
« Il est encore temps d’éviter le pire scénario qui apportera des souffrances indicibles à des millions de personnes s’ils agissent comme suggéré », a souligné Biden, affirmant que les États-Unis et leurs partenaires restaient ouverts à la diplomatie. Le président a toutefois exprimé des doutes quant à la volonté de Poutine d’être prêt pour la diplomatie, affirmant que « rien dans la longueur des remarques de Poutine n’indique un intérêt à poursuivre un véritable dialogue sur la sécurité européenne en 2022″.
Une éventuelle rencontre entre Biden et Poutine n’est « certainement » pas une option pour le moment, a déclaré la Maison Blanche. « A ce stade, ce n’est certainement pas prévu », a déclaré la porte-parole de la Maison Blanche, Jen Psaki, qui a ajouté qu’une désescalade du conflit avec l’Ukraine serait nécessaire pour un tel sommet.
Biden a ajouté que les forces et équipements américains déjà stationnés en Europe étaient déplacés vers l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie en réponse au refus de la Russie de retirer des troupes de la Biélorussie, soulignant qu’il s’agissait d’une décision « totalement défensive » et que les États-Unis n’avaient aucune intention de se battre. avec la Russie.
« Nous voulons envoyer un message sans équivoque, cependant, que les États-Unis, avec nos alliés, défendront chaque centimètre carré du territoire de l’OTAN et respecteront les engagements que nous avons pris envers l’OTAN », a déclaré Biden. Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a également annoncé mardi une première série de sanctions économiques contre la Russie.
Le Japon impose des sanctions à la Russie pour ses actions en Ukraine, notamment en interdisant l’émission d’obligations russes au Japon et en gelant les avoirs de certaines personnes russes, a déclaré mercredi le Premier ministre Fumio Kishida.
Mercredi également, le Premier ministre australien Scott Morrison a déclaré s’attendre à de nouvelles tranches de sanctions. « Ce n’est que le début de ce processus », a déclaré Morrison.
Les sanctions émises par les États-Unis, le Canada, l’Australie et le Japon rejoignent les sanctions émises par le Royaume-Uni et l’Union européenne mardi.
L’UE a accepté de sanctionner 27 Russes et entités, y compris tous les membres de la chambre basse du parlement russe.
Le Royaume-Uni a imposé des sanctions à Gennady Timchenko et à deux autres milliardaires étroitement liés à Poutine, ainsi qu’à cinq banques – Rossiya, IS Bank, GenBank, Promsvyazbank et la Black Sea Bank.
Reuters a contribué à ce rapport
Pire crise depuis la fin de la Guerre froide
Le président russe Vladimir Poutine a reconnu lundi l’indépendance des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk (DNR et LNR), régions séparatistes ukrainiennes prorusses, et ordonné aux troupes russes d’entrer dans ces territoires, en défiant les Occidentaux dont les relations avec Moscou traversent la pire crise depuis la fin de la Guerre froide en raison de la situation autour de l’Ukraine.
Peu avant cette décision du maître du Kremlin, dénoncée aussitôt par Kiev et les Occidentaux, M. Lavrov a annoncé qu’il allait s’entretenir avec M. Blinken jeudi à Genève pour tenter de désamorcer la crise russo-occidentale.
Une violation de la « la souveraineté et l’intégrité territoriale »
De son côté, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé mardi dans une adresse à la Nation une violation de la « la souveraineté et l’intégrité territoriale » de l’Ukraine après la reconnaissance l’indépendance des deux « républiques » séparatistes du Donbass par Moscou, dont il affirme ne pas « avoir peur ».
« L’Ukraine qualifie les derniers actes de la Russie de violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de notre Etat », at-il dit, ajoutant que les Ukrainiens étaient « sur leurs terres », et n’avaient « peur de rien ni de personne » et ne céderaient pas « une seule parcelle du pays ».
Huit ans après les accords de Minsk et malgré les menaces de sanctions, Vladimir Poutine a reconnu officiellement les deux régions séparatistes de l’est de l’Ukraine en annonçant l’entrée de son armée. Une décision dénoncée dans le monde entier
Tout comme les forces armées russes, les forces armées ukrainiennes participent à des exercices, se préparant à l’éventualité du combat.
À quand remontent les tensions en Ukraine ?
À plus de 1000 ans ! Au IXe siècle naît le premier état slave appelé le « Rus » ou la Ruthénie. Russie et Ukraine y sont confondues. Mais le territoire connaîtra pendant 1000 ans des vagues d’envahissement successives turques, occidentales et russes. Il est intégré à l’URSS en 1922 et subira la répression de Staline qui organise une famine pour forcer les paysans à rejoindre les exploitations nationalisées. L’Ukraine prend son indépendance à l’explosion de l’Union soviétique en 1991 mais reste très marquée. Selon National Geographic, les populations de l’Est gardent des liens avec la Russie, alors que les habitants de l’Ouest sont davantage pro-occidentaux.
La Russie revendique, pour des raisons historiques, un droit de regard sur la politique ukrainienne. (Reuters)
En 2004, le candidat pro russe Viktor Ianoukovitch est élu mais la population dénonce des fraudes. C’est le début de la « révolution orange ». Le scrutin est finalement annulé sous la pression des Occidentaux qui se rapprochent par la même occasion de l’Ukraine, explique Arte. Mais Ianoukovitch arrive finalement au pouvoir en 2010. Dans un pays en crise, explique Géo, il cesse les discussions avec l’Union Européenne et conclut finalement des accords avec la Russie qui lui propose notamment une baisse du prix du gaz.
Que sont les accords de Minsk qu’aurait violé Vladimir Poutine ?
La population hostile aux Russes se soulève cependant une nouvelle fois contre Ianoukovitch avec la révolution de Maïdan. Le dirigeant est destitué en février 2014 et trouve l’asile en Russie. Soucieux de voir le pays quitter le giron russe et passer dans celui des Occidentaux, Poutine décide de frapper fort.
Il annexe la Crimée, une péninsule située en bordure de la mer Noire et qui fait face à la région russe de Krasnodar. La population locale se prononce pour la Russie dans un référendum contesté par les Occidentaux. En parallèle, Moscou décide de soutenir les milices séparatistes pros russes du Dombass, une région située à l’Est de l’Ukraine. Deux territoires y proclament leur indépendance et débutent un conflit armé avec l’armée régulière : la République populaire de Donetsk et la République populaire de Lougansk. Des accords de « Cessez-le-feu » sont signés en septembre à Minsk entre toutes les parties. Ils garantissent une autonomie à ces territoires, mais ne seront jamais réellement appliqués. Selon France Info, 13000 personnes sont mortes dans la région en huit ans.
Quelles conséquences pour la campagne présidentielle en France ?
Jusqu’à la veille de la reconnaissance des régions séparatistes, le président de la République Emmanuel Macron s’est dit tout faire pour éviter la guerre. Également en sa qualité de président de l’Union Européenne, il a multiplié les coups de téléphone avec Vladimir Poutine, retardant dans le même temps l’annonce de sa candidature. C’est pour l’heure un échec et ses adversaires n’ont pas manqué de le lui rappeler.
Marine le Pen l’accuse d’avoir « fait de la communication » et de « chercher à se servir de cette séquence diplomatie pour appuyer une entrée en campagne« . Pour Eric Zemmour sur France Inter, il « n’est pas crédible et il n’est pas respecté par Vladimir Poutine » : « Jamais la France et l’Allemagne n’ont forcé l’Ukraine à faire appliquer ces accords de Minsk 2 donc Vladimir Poutine en a eu assez à la fin et a pris ces mesures de force, je le reconnais volontiers et évidemment on peut le critiquer, mais il faut comprendre« . Jean-Luc Mélenchon plaide, lui, pour une politique de « non-aligné » : « On ne peut plus supporter que les discussions sur la sécurité de l’Europe soient faites entre Biden et Poutine.«
Des « ambiguïtés » affligeantes pour Yannick Jadot alors que Valérie Pécresse demande à « l’Union européenne d’être ferme« .
Jforum avec jpost.fr , lamontagne.fr, laprovence.com et Ouest-France
Vladimir Poutine — Alexei Nikolsky/AP/SIPA
Un CHAR roule dans une rue de Donetsk hier, après que le président russe Vladimir Poutine a ordonné le déploiement de troupes russes dans deux régions séparatistes de l’est de l’Ukraine, à la suite de la reconnaissance de leur indépendance. (crédit : REUTERS/ALEXANDER ERMOCHENKO)